
Arm ravive la fièvre des particuliers pour les actions

L’introduction sur le Nasdaq d’Arm jeudi, la plus importante cotation à Wall Street depuis deux ans, a été un succès… pour SoftBank. La société d’investissement propriétaire du concepteur britannique de puces, qui n’a mis sur le marché que 10% du capital d’Arm et préféré ne pas sortir sur un prix supérieur à la fourchette annoncée malgré la forte demande, a vu la valeur de sa participation grossir de 25% dès le premier jour de cotation. Introduite à 51 dollars (haut de la fourchette de prix annoncée), l’action a bondi à 63,59 dollars dès son premier jour de cotation, soit une valorisation de 65,2 milliards de dollars.
L’action a notamment été portée par un flux d’achat massif de la part d’investisseurs particuliers dès l’ouverture des échanges. Plusieurs importants clients et partenaires d’Arm, au nombre desquels Apple, Amazon, Intel, Nvidia, Alphabet, Microsoft ou encore Samsung Electronics, s’étaient engagés à participer à hauteur de 735 millions de dollars sur les 5 milliards visés. Le reste a été probablement acquis principalement par des investisseurs institutionnels ou des ETF anticipant une probable entrée d’Arm dans l’indice, la faible taille de l’offre limitant l’accès de cette opération aux particuliers, selon Bloomberg.
Du coup, dès la cotation, ces derniers semblent s’être rués sur l’action, pour jouer le potentiel de développement lié à l’intelligence artificielle (qui n’est qu’une petite partie de l’activité d’Arm qui cherche à se diversifier au-delà du secteur des téléphones mobiles dans lequel il est très présent), espérant avoir entre les mains un futur Nvidia. Porté par le potentiel de l’IA, l’action du fabricant californien de semi-conducteurs à haute valeur ajoutée a déjà bondi cette année de plus de 200%.
Lors du roadshow de l’introduction, les dirigeants d’Arm ont dévoilé des perspectives de croissance des ventes cette année et d’environ 25% en 2025 grâce aux développements dans les centres de données et l’intelligence artificielle. Pour autant, Arm, au même titre que Nvidia, fait partie des valeurs les plus chères de la cote. Vendredi, les investisseurs continuaient de chasser l’action Arm mais son cours marquait une pause après son bond la veille. Sur la plateforme de trading de Fidelity, l’action Arm était la plus échangée jeudi, devant les valeurs les plus populaires auprès du retail. Tesla, Apple et Nvidia étaient les trois actions les plus achetées par les particuliers sur le marché américain sur 5 jours au 14 septembre, selon les données compilées par Vanda Research. Vendredi, elle restait la plus échangée sur le marché.
Depuis la pandémie de Covid, les investisseurs particuliers sont revenus en force sur les marchés actions, aux Etats-Unis et dans une moindre mesure en Europe. Cette vague de nouveaux investisseurs plus jeunes, aux pratiques de trading radicalement différentes, a même provoqué des remous sur les marchés. Aux Etats-Unis, les particuliers sont la plus importante catégorie d’investisseurs, à hauteur de 40% du marché (contre 10 à 15% en Europe), selon des données compilées par Barclays. Les investisseurs internationaux détiennent 17% du marché américain tandis que les fonds traditionnels et les ETF sont à parts égales (14% et 13% respectivement) et les fonds de pension pèsent 9%.
Effet IA
Ces dernières années, à la faveur du rebond de Wall Street, la part du retail a progressé par rapport au point bas de 2008. Mais la véritable renaissance a été à partir de 2020, avec des transactions autour de 1.000 milliards de dollars par trimestre, et un pic de près de 1.500 milliards au deuxième trimestre 2021. «Les flux en provenance des investisseurs particuliers américains ont été relativement forts en 2020 et 2021, mais ont diminué depuis l’an dernier», note Magesh Kumar, stratégiste actions chez Barclays. L’appétit des investisseurs retail, qui avaient pour beaucoup joué les «valeurs Covid», qui ont depuis chuté pour la plupart, et les grandes valeurs de croissance, s’est confronté à la réalité du marché. Jusqu’à la fièvre de l’IA.
«Des données alternatives à plus haute fréquence montrent une activité accrue pendant le rallye lié à la thématique IA en mai et juin, les investisseurs achetant davantage d’options d’achat et les courtiers comme Charles Schwab voyant les flux vers les actions augmenter», relève Magesh Kumar. L’indicateur bull/bear de l’association américaine des investisseurs individuels (AAII) montre dans ces enquêtes mensuelles ce regain de confiance du retail cette année, confirmé par les flux. «Les investisseurs privés ont joué un rôle de soutien en juin et juillet, mais pas en août», constate toutefois Florian Ielpo, responsable macro chez Lombard Odier IM.
Marco Lachini, stratégiste chez Vanda Research, qui collecte des données sur les flux retail, relève également le moindre intérêt des investisseurs particuliers ces derniers mois. Il note par ailleurs que ces derniers ont de moins en moins d’impact sur les grandes capitalisations comme Tesla ou Nvidia que sur les small caps dans lesquelles ils sont investis. Emmanuel Cau, stratégiste actions chez Barclays observe aussi cette moindre activité avec une baisse des achats d’options de petite taille (celles traitées par les particuliers) en raison de la sous-performance du Nasdaq, mais pas un arrêt du Fomo (fear of missing out) des particuliers. La participation de ces derniers dans les ETF (exchange traded funds) les plus populaires reste encore à un niveau très élevé.
L’introduction d’Arm a peut-être relancé l’appétit des investisseurs pour les actions en attendant les prochaines IPO sur ce marché.
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