
Antin défie la malédiction des introductions en Bourse à Paris

C’est l’exception qui confirme la triste règle. Le cours de l’Antin Infrastructure Partners s’envole de 26% ce vendredi à la Bourse de Paris, pour le premier jour de cotation du fonds d’infrastructure français. Cette réussite, liée à la spécificité d’Antin IP, dénote alors que depuis le début de l’année toues les introductions en Bourse menées à Paris ont connu des débuts difficiles.
Jeudi, Exclusive Networks était venu confirmer cette série noire. Annoncée comme la plus grosse introduction à la Bourse de Paris de l’année, devant celles de Believe et d’Aramis en juin dernier, Exclusive Networks a finalement connu le même triste sort que ces deux prédécesseurs.
L’action du distributeur de solutions de cybersécurité, un domaine pourtant particulièrement recherché par les investisseurs si l’on en croit la multitude de fusions-acquisitions ces derniers mois, a chuté de 5% jeudi, malgré un prix d’offre fixé en bas de fourchette. Le groupe, propriété du fonds Permira depuis 2018, capitalise 1,65 milliard d’euros, bien moins que les 2 milliards d’euros qu’il pouvait espérer au moment du lancement de son offre.
A la décharge d’Exclusive Networks, cette semaine n’était probablement pas la meilleure pour entrer en Bourse. Les craintes sur le risque de défaut du groupe d’immobilier chinois Evergrande ont provoqué un pic de volatilité, ce qui n’est jamais bon pour une introduction en Bourse (IPO). Abreuvés d’IPO depuis la rentrée, les investisseurs peuvent aussi faire les fines bouches. Des opérations ont eu du mal à se placer récemment ailleurs en Europe, et certaines ont été décalées comme Babbel Group à Francfort.
Méfiance sur les valorisations
Mais comment expliquer que toutes les IPO menées cette année sur le marché réglementé d’Euronext Paris, hors celles des sociétés chèques en blanc (Spac), ont débuté dans le rouge. Seule HDF a progressé pour sa première cotation, mais le groupe d’hydrogène perd depuis plus de 6%.
« Il y a une malédiction », grince un banquier avant d’apporter un premier élément d’explication : « les investisseurs français ont une forme de méfiance pour les IPO de sociétés de technologies, en raison de leur valorisation parfois complexe à appréhender ». Believe, Aramis et Exclusive Networks sont toutes les trois entrées en Bourse au plus bas de la fourchette de prix indicative.
Les échecs des opérations Believe et Aramis en juin n’ont pas aidé à renforcer la confiance des investisseurs, qui ont parfois le sentiment de se faire forcer la main par la multitude de banquiers mobilisés sur ce type d’opération. Dans le cas d’Exclusive Networks, cinq banques travaillaient sur le dossier (JPMorgan et Morgan Stanley en coordinateurs, avec BNP Paribas, Citigroup et la Société Générale en teneurs de livre associés) en plus de Lazard comme conseil de la société. Pour Believe, elles étaient sept (Citi, JPMorgan, la Société Générale, BNP Paribas, Goldman Sachs, HSBC et UBS) avec Rothschild & Co.
Surtout, «on a expliqué aux investisseurs que les opérations Believe et Aramis étaient emblématiques et fondamentales pour l’attractivité de la Bourse de Paris… ils ont vu le résultat», glisse ce spécialiste des introductions en Bourse.
Echaudés, les investisseurs institutionnels français ont donc tendance à passer de petits ordres sur ces opérations et n’ont pas nécessairement envie de se mobiliser sur le marché secondaire, une fois que l’action est cotée, pour venir en soutien du cours de Bourse. Les investisseurs institutionnels étrangers ne se battent pas non plus pour ce type de dossiers dont la taille, relativement modeste à l’échelle internationale, n’en fait pas des valeurs incontournables, à la différence par exemple d’un Universal Music Group, leader mondial et valorisé plus de 40 milliards d’euros. Rien à voir avec les quelque 2 milliards de Believe.
Résultat, les hedge funds, qui aiment participer à ce type d’opérations mais qui n’hésitent pas à sortir en quelques minutes d’un dossier s’ils voient qu’il débute mal, dictent leur loi.
OVHcloud brisera-t-il la malédiction ?
L’histoire différente proposée par Antin Infrastructure Partners, le fonds d’infrastructure qui doit faire ses premiers pas ce vendredi sur Euronext Paris, pourrait lui permettre d’échapper à la malédiction. Le prix d’introduction de ses actions a été fixé jeudi tout en haut de la fourchette.
En revanche, le vrai test sera l’IPO d’OVHcloud, l’une des grandes stars de la French Tech mais dont le profil alternatif par rapport à ses immenses concurrents américains pourrait refroidir certains investisseurs. L’opération a été lancée en début de semaine. La fourchette de prix sera dévoilée dans les prochains jours, pour une valorisation estimée autour de 4 milliards d’euros, proche de celle d’Antin. Une réussite viendrait briser la malédiction. Des débuts poussifs risqueraient de glacer définitivement le marché pour le plus grand bonheur des fonds de private equity qui, avec des ressources inépuisables et des contraintes réglementaires moindres par rapport aux marchés publics, ont fait main basse ces dernières années sur les plus belles entreprises françaises.
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Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse