
Denis Kessler conforte son ascendant sur Scor

Après l’assemblée générale (AG) houleuse de 2019, celle d’hier a été une simple formalité pour le patron de Scor. Lors de la réunion annuelle qui s’est tenue à huis clos ce 16 juin, en raison de la crise sanitaire, les actionnaires du réassureur français ont approuvé la rémunération de Denis Kessler, sujet à débat depuis plusieurs années. Les résolutions portant sur 2019 et sur la politique de rémunération pour l’année en cours ont totalisé respectivement 78,04% et 68,94% de votes positifs. Certes, ces chiffres sont inférieurs au niveau de 2018, mais Denis Kessler améliore son score, après l’approbation de justesse de sa rémunération au printemps 2019.
«Il fait un moins mauvais score cette année car il a diminué son bonus 2019. S’il ne l’avait pas fait, il n’aurait pas obtenu de vote positif», estime Catherine Berjal, co-fondatrice du fonds activiste Ciam, qui revendique un peu plus de 1% du capital de Scor. «Et si nous n’avions pas fait campagne, Denis Kessler n’aurait pas baissé sa rémunération», ajoute-t-elle. Les émoluments du PDG du groupe de réassurance font l’objet de critiques récurrentes de Ciamet sont les plus élevés des patrons français de la banque et de l’assurance.
Bonus en baisse
En amont de l’AG 2020, décalée du mois de mars à juin, Denis Kessler a renoncé à 30% de son bonus 2019 initial, ramené de 1,08 million à 760.000 euros environ. «L’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ndlr), à l’occasion de cette crise (du Covid-19, ndlr), a appelé les organismes d’assurance à faire preuve de modération dans l’attribution des rémunérations variables», a expliqué Augustin de Romanet, président du comité des rémunérations et des nominations de Scor. Peu de groupes financiers cotés ont suivi cette recommandation, hormis les dirigeants de Crédit Agricole SA, d’Amundi et de la Société Générale qui abandonnent la moitié de leur prime de l’année écoulée ou à venir. Chez Scor, l’effort du PDG est en réalité limité. Les 325.000 euros auxquels il a renoncé représentent moins de 5% de sa rémunération totale de 6,8 millions d’euros, composée à plus de 60% d’un plan d’intéressement à long terme.
Désaccord entre agences de vote
Pour l’année en cours, «le vote sur la politique de rémunération est moins favorable, à 68%, et fait l’objet d’une abstention marquée, qui représente 10 millions d’actions. Le vrai ‘oui’ est en fait à 64% selon nos calculs», souligne Catherine Berjal. Scor a pourtant amendé les principes de rémunération de son PDG en février dernier, «en réponse à la demande d’un certain nombre d’entre vous», a concédé hier Augustin de Romanet, président du comité de rémunérations et des nominations. Suite à ces concessions, qualifiées de «cosmétiques» par Ciam, le cabinet de conseil en vote ISS a recommandé de voter en faveur du package de Denis Kessler, mais son concurrent Glass Lewis a publié un avis négatif.
Les actionnaires de Scor devront en revanche patienter pour connaître la future gouvernance du groupe. Les traditionnelle «Rendez-vous de septembre» de la réassurance à Monaco étant annulés, l’annonce prévue à ce moment-là est décalée. Mais ce sera «suffisamment en amont de l’assemblée générale 2021», a promis Augustin de Romanet. «Le mandat de Denis Kessler arrive à échéance dans un an, il n’y a donc pas de caractère d’urgence», complète un porte-parole de Scor. «La pandémie de coronavirus a également quelque peu retardé les travaux du comité des nominations, du fait notamment de la difficulté à prendre des contacts durant cette période», ajoute-t-il.
La gouvernance «tranchée en temps et en heure»
Des arguments insuffisants pour Ciam. «Il y a eu cinq réunions du comité des nominations l’an dernier et trois avant la crise sanitaire, et rien n’en est sorti. C’est le signe qu’ils n’ont rien fait», réagit Catherine Berjal, qui craint que Denis Kessler s’accroche à sa fonction de directeur général ou de président malgré la limité d’âge fixée à 70 ans. Il aura 69 ans au printemps prochain. Cette année, Ciam a toutefois a renoncé à déposer une résolution demandant la dissociation des deux fonctions du PDG, pour que «le conseil puisse se concentrer sur la gestion de cette crise [économique] inattendue». Scor ne ferme plus la porte à une nouvelle gouvernance mais cette question «sera tranchée en temps et en heure», a répondu le groupe hier, en réponse à une question écrite posée par Ciam.
Au-delà de la gouvernance, le fonds activiste pousse un cran plus loin sa critique de la stratégie du réassureur dont le cours de Bourse a chuté de 33% depuis le début de l’année, soit plus que ses pairs européens. «Nous avons demandé la nomination d’une banque d’affaires car le dernier plan stratégique de Scor, Quantum Leap (présenté en septembre 2019, ndlr) ne convainc pas les marchés, estime Catherine Berjal, à qui le groupe a adressé une fin de non-recevoir. Nous continuons de penser que Scor gagnerait à être plus diversifié en s’adossant à un autre acteur. Cela lui permettrait aussi d’améliorer ses ratios financiers, et en particulier sa solvabilité. Avec l’échec du rachat de Partner Re par Covéa, Scor devrait redevenir une cible prioritaire pour le groupe mutualiste». Après la guerre ouverte entre les deux groupes, le procès intenté par Scor à l’encontre du patron de Covéa Thierry Derez a été reporté le mois dernier, en raison du confinement.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse