
BNP Paribas est épinglée par la justice sur l’égalité salariale

Des efforts considérables ont été déployés par BNP Paribas depuis sa condamnation pour discrimination sexuelle envers une ancienne salariée en 2010. Active dans la promotion des carrières féminines, la banque française a conclu un accord « sur la diversité et l’inclusion » le 24 juillet 2020, encadrant ses actions pour corriger les écarts de rémunérations entre hommes et femmes. Mais, pour le tribunal judiciaire (première instance), la méthodologie employée par BNP Paribas est illégale, a-t-il tranché dans une décision rendue le 27 septembre révélée par l’agence Bloomberg.
Cette décision, que L’Agefi a consultée, fait suite à des poursuites engagées par la CFDT, organisation syndicale représentative, qui conteste l’accord signé par BNP Paribas et l’organisation syndicale majoritaire, le SNB. La banque a mis en place un processus RH destiné à « vérifier individuellement si, à niveaux de formation, de responsabilité, d’efficacité professionnelle (telle qu’elle ressort des évaluations professionnelles), de compétence et d’expérience comparables, la rémunération de base d’une salariée est équivalente à celle d’un salarié placé dans la même situation professionnelle ».
Non-respect du Code du travail
Pour ce faire, BNP Paribas compare, par métier, niveau de classification et tranche d’âge, « la rémunération de base des femmes par rapport à la médiane de rémunération des hommes », prévoit l’accord d’entreprise. « Dès lors que cette comparaison fait apparaître un écart supérieur à 5% de la médiane de rémunération des hommes au sein de l’entreprise, les gestionnaires ressources humaines en sont informés et doivent examiner les dossiers avec une attention toute particulière », poursuit l’accord. Pour le juge, cette méthodologie ne tient pas compte de la « rémunération effective » des femmes comme le stipule le Code du travail. Il rappelle ainsi à BNP Paribas que cette dernière « doit correspondre à la rémunération effectivement perçue par la salariée, et ne saurait se réduire à la rémunération de base ». Elle doit donc inclure les éléments variables et les bonus.
Pour se défendre, BNP Paribas avait invoqué le « caractère discrétionnaire » des rémunérations variables assises sur des objectifs de performance individuelles et les résultats du groupe. Or, c’est justement en matière de bonus que les écarts entre hommes et femmes sont les plus marqués. Pour le tribunal judiciaire, la terminologie de la loi « à travail égal, salaire égal » l’emporte.
Des banques françaises sous pression
Comme toutes les entreprises de plus de 50 salariés, les banques françaises sont tenues de publier chaque année l’index de l’égalité professionnelle, « ou index Pénicaud » du nom de l’ancienne ministre du Travail à l’origine de sa création. Si leur note est inférieure à 75 sur 100 trois ans après leur première publication, elles se voient infliger une amende pouvant atteindre 1% de la masse salariale. Le score global des banques françaises, qui inclut différents indicateurs dont les écarts de rémunération, est plutôt bon. En 2021, BPCE a réalisé un score de 94 sur 100, BNP Paribas de 87 sur 100, la Société Générale de 86 sur 100 et Crédit Agricole CIB de 85 sur 100.
Or, selon l’agence Bloomberg, ces banques ne comparent que les rémunérations fixes de leurs salariés. La décision du tribunal judiciaire pourrait donc mettre le secteur entier sous pression pour qu’il revoie ses processus RH et renégocie ses accords d’entreprise. Contactés par L’Agefi, la Société Générale, le Crédit Agricole et BPCE se sont refusés à commenter. BNP Paribas indique, de son côté, « analyser attentivement la décision de justice ». En tout état de cause, la banque de la rue d’Antin sera contrainte de revoir sa méthode de calcul puisque le tribunal a annulé cette disposition contenue dans son accord collectif.
BNP Paribas indique à L’Agefi qu’elle « porte une attention particulière depuis 2004 aux enjeux d’égalité salariale entre les femmes et les hommes ». Dans le cadredes négociations annuelles obligatoires sur les salaires (NAO),une nouvelle enveloppe de 10 millions d’euros a été allouée « aux actions de l’entreprise en faveur de la mixité des parcours professionnels, de la promotion des femmes et de la correction éventuelle des écarts injustifiés de rémunération ». Elle sera répartie sur 2023 et 2024.
Des écarts qui persistent
La CFDT remarque que les actions entreprises jusqu’ici par la banque n’ont pas porté leurs fruits puisque les femmes perçoivent en moyenne une rémunération fixe mensuelle inférieure de 19,4% par rapport aux hommes. L’écart de rémunération constaté a oscillé entre 18,9% et 20,2% entre 2013 et 2020.
Ce n’est pas la première fois que BNP Paribas se fait rattraper par la justice. En février dernier, la banque s’est vu infliger une amende historique de 2 millions de livres par la justice britannique pour discrimination salariale envers une ancienne employée de sa salle de marché à Londres, Stacey Macken. Les dommages et intérêts prenaient en compte non seulement le salaire fixe mais aussi les bonus et autres formes de rémunération. La courtière avait notamment reçu un bonus inférieur de moitié à un collègue masculin. De part et d’autre de la Manche, la pression en matière d’égalité salariale s’accroît sur les banques françaises.
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Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse