
Le patron de BlackRock s’inquiète des répercussions de la faillite de SVB

Dans sa lettre annuelle aux investisseurs publiée mercredi 15 mars, Larry Fink, le directeur général de BlackRock, livre une analyse à chaud de l’actualité qui agite et inquiète les marchés : la faillite de Silicon Valley Bank aux Etats-Unis.
«Il est trop tôt pour connaître l'étendue des dégâts», juge-t-il. «Jusqu'à présent, la réponse réglementaire a été rapide et des actions décisives ont permis d'éviter les risques de contagion. Mais les marchés restent sur le qui-vive», constate-t-il. Pour lui, la situation actuelle est le prix à payer de la période d’argent facile que nous avons connue pendant des années et la conséquence du resserrement monétaire de la Réserve fédérale en 2022.
«Nous ne savons pas encore si les conséquences de l’argent facile et des changements réglementaires se répercuteront sur l’ensemble du secteur bancaire régional américain, avec de nouvelles saisies et fermetures à la clé», écrit-il encore.
Si l’avenir est incertain, «il semble inévitable que certaines banques devront maintenant réduire leurs prêts pour consolider leurs bilans, et il est probable que les normes de fonds propres des banques seront plus strictes », estime Larry Fink.
Une inflation partie pour durer
À plus long terme, «la crise bancaire d’aujourd’hui» profitera aux marchés de capitaux. «À mesure que les banques seront potentiellement plus limitées dans leurs prêts, ou que leurs clients prendront conscience de l’asymétrie entre les actifs et les passifs, je pense qu’ils se tourneront en plus grand nombre vers les marchés des capitaux pour obtenir des financements», prédit le dirigeant de BlackRock, société qui gérait 8.594 milliards de dollars à fin décembre 2022. Une aubaine pour les sociétés de gestion…
Enfin, Larry Fink met en garde contre une autre conséquence fâcheuse de la période d’argent facile qui est désormais terminée. «Nous pourrions également assister à une inadéquation des liquidités. Des années de taux bas ont eu pour effet de pousser certains propriétaires d’actifs à augmenter leurs engagements dans des investissements illiquides - en échange d’une liquidité moindre pour des rendements plus élevés. Ces propriétaires d’actifs, en particulier ceux qui ont des portefeuilles à effet de levier, risquent à présent d'être confrontés à un décalage de liquidité», prévient-il.
Par ailleurs, le patron de BlackRock estime que l’inflation est partie pour durer et qu’elle devrait rester autour de 3,5%-4% dans les prochaines années. «Les dirigeants des secteurs public et privé troquent l’efficacité et la réduction des coûts pour la résilience et la sécurité nationale... Ce compromis entre prix et sécurité est l’une des raisons pour lesquelles je pense que l’inflation persistera et qu’il sera plus difficile pour les banquiers centraux de l’endiguer à long terme », explique-t-il.
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Une lettre unifiée
En début d’année, Larry Fink a pris l’habitude d'écrire une lettre à ses actionnaires et une autre à ses clients. Pour la première fois, le dirigeant a choisi de n’en rédiger qu’une seule, estimant que les intérêts de ces deux catégories convergent.
Dans ce long document, le patron de BlackRock passe en revue plusieurs sujets, allant de l’économie, à la crise des retraites, en passant par les actifs digitaux et ses goûts musicaux (on y apprend que son groupe préféré est Talk Talk).
Le sujet de la transition énergétique fait l’objet d’un chapitre entier. Larry Fink adopte un ton mesuré, reconnaissant que le sujet n’est pas forcément rassembleur. Cela fait écho au fait que BlackRock a été jugé trop «vert» par certains Etats américains en raison de ses positions sur les énergies fossiles, alors que d’autres jugent au contraire que le groupe américain n’en fait pas assez sur le sujet.
«La transition vers une économie à faibles émissions de carbone est au cœur des préoccupations de nombre de nos clients. Nos clients ont des objectifs et des perspectives d’investissement variés. Certains souhaitent investir de manière à s’aligner sur une voie de transition particulière ou à accélérer cette transition. D’autres choisissent de ne pas le faire», observe-t-il.
«De nombreuses personnes ont leur avis sur la manière dont nous devrions gérer l’argent de nos clients. Mais l’argent n’appartient pas à ces personnes. Il ne nous appartient pas non plus. Il appartient à nos clients, et notre responsabilité et notre devoir sont envers eux», semble-t-il répondre à ceux qui critiquent sa façon de faire.
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