
La bascule se poursuit sur les marchés

Il y avait la Grèce, le ralentissement économique en Asie, la baisse des cours des matières premières et la possible remontée des taux de la Réserve fédérale dès le mois de septembre. L’esprit des investisseurs est désormais un peu plus préoccupé par les conséquences de la dévaluation du yuan la semaine dernière. Cette décision totalement inattendue en plein cœur de l’été a contribué à alimenter le mouvement de défiance vis-à-vis des pays émergents, les investisseurs se reportant vers les actifs jugés moins risqués. Les fonds émergents actions ont essuyé une cinquième semaine de retraits de capitaux.
Selon les statistiques d’EPFR, les retraits hebdomadaires, pour la semaine arrêtée au 12 août, ont atteint 2,5 milliards de dollars pour les fonds actions émergents. Pour les obligations émergentes, l’érosion se chiffre à 800 millions de dollars, la plus forte de ces neuf dernières semaines. «Les investisseurs ont inscrit la dévaluation du yuan sur la liste des variables pouvant agir sur les marchés émergents dans le courant du second semestre», indique EPFR.
Ce sont les fonds chinois ayant le mandat d’investir dans les pays asiatiques voisins, comme la Thaïlande ou la Corée du Sud, qui ont le plus souffert, les investisseurs craignant le désavantage compétitif que provoquera la dévaluation du yuan sur les industriels de ces pays. Au total, en cinq semaines, les fonds actions émergents ont perdu 20 milliards de dollars de capitaux.
Une nouvelle fois, ce sont les fonds investis dans les actions européennes qui en ont le plus profité, bien aidés par l’avancée positive du dossier grec. Ils ont amassé 3,7 milliards de dollars supplémentaires au cours de la semaine achevée le 12 août, portant ainsi à plus de 90 milliards leur collecte depuis le début de l’année. Les fonds en actions américaines n’ont gagné que 200 millions de dollars, mais il s’agit de leur première collecte en un mois.
Même si le rythme de retrait s’est ralenti par rapport à celui observé mi-juillet, à l’ouverture du mouvement, la bascule des marchés émergents vers des actifs moins risqués devrait se poursuivre. «Le débat va continuer de faire rage pour savoir si la dévaluation surprise du yuan est le fruit de la volonté des décideurs politiques de voir la monnaie rejoindre le panier du FMI ou de celle de lutter contre le ralentissement de l’économie», notent les stratèges de Citigroup. Mais quoi qu’il en soit, «les investisseurs sont clairement préoccupés par la montée des risques», assurent-ils. D’autant que selon Martin Skanberg, gérant actions européennes chez Schroders, «le ralentissement de la croissance chinoise est conforté par le retour des entreprises qui soulignent une forte contraction de leur activité commerciale en Chine, avec des exportations et des importations significativement moindres». Conséquence, «la prime de risque globale devra être relevée pour refléter une moindre croissance mondiale, ce qui devrait se traduire par une montée du stress sur les marchés émergents», conclut le gérant.
Surtout, le plus grand danger est à venir. «Pour les marchés, la situation de la Grèce et les actions chinoises ne sont pourtant que des diversions à court terme au défi posé par la politique monétaire américaine», prévient Bruno Crastes, directeur général de H2O Asset Management. La rentrée s’annonce compliquée pour les marchés. La Fed rendra sa décision le 17 septembre.
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Bure : manifestation sous tension contre l’enfouissement des déchets nucléaires
Mandres-en-Barrois - Des centaines de personnes (2.000 selon les organisateurs) défilent samedi à Bure (Meuse), sous haute surveillance policière, contre le projet Cigéo d’enfouissement des déchets nucléaires hautement radioactifs. «Résistance et sabotage. Andra, dégage», ont scandé les manifestants, en référence à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, qui porte ce projet baptisé Cigéo. Sous le vrombissement des hélicoptères de gendarmerie qui surveillent la zone, les participants, dont les députées Sandrine Rousseau (groupe écologiste) et Mathilde Panot (LFI), ont défilé au son des tambours. Le parcours de sept kilomètres de cette «manif du futur» a été validé par la préfecture, mais celle-ci a décrété des «zones d’exclusion» interdites aux manifestants, notamment les abords du laboratoire de l’Andra. Quelque 200 black bloc ont progressé sur une route différente de celle du cortège autorisé, a constaté l’AFP. Certains ont lancé des projectiles en direction des gendarmes, qui ont répliqué avec des gaz lacrymogènes. Avant la manifestation, le préfet Xavier Delarue avait évoqué dans la presse locale sa crainte de débordements de la part de «manifestants radicalisés». "À l'évidence, les organisateurs locaux n’ont pas la main», a dit le représentant de l’Etat au quotidien L’Est Républicain. Des «armes et matériels dangereux» ont été découverts dans les contrôles pratiqués sur les manifestants, a indiqué la gendarmerie nationale sur X, en publiant des photos de spray au poivre et de sabre japonais. «Aucune cause ne peut excuser l’utilisation d’armes dans une manifestation», a commenté à ce propos, également sur X, le ministre démissionnaire de l’Intérieur Bruno Retailleau. «Projet destructeur» Dans le cortège principal, les banderoles et bannières portent l’effigie du réseau Sortir du nucléaire, de La France insoumise, d’Europe écologie les Verts, du Nouveau parti anticapitaliste, ou encore de la Confédération paysanne ou du syndicat Solidaires. L’Etat veut «nous imposer un projet destructeur et dangereux», qui engendre aussi l’"accaparement de terres et de forêts par l’Andra» sur lesquelles «on pourrait installer des paysans», a déploré un représentant de la Confédération paysanne lors d’une conférence de presse, avant le départ du cortège. Cette lutte «est vitale et nécessaire pour préserver notre environnement et la population», a souligné de son côté Pauline Goyer, de Greenpeace. Certains manifestants sont venus de d’Allemagne et d’Italie, et des autocars ont été spécialement affrétés depuis l’Alsace, Paris, Lyon, Nantes ou la Suisse. Les organisateurs ont prévu d’envoyer, pendant la manifestation, des messages «aux générations futures dans des capsules temporelles». Le projet Cigéo, lancé en 1991 et contesté depuis des décennies, prévoit l’enfouissement à Bure à partir de 2050 des déchets nucléaires les plus dangereux pour des centaines de milliers d’années. Après l’achèvement en juillet des expertises techniques nécessaires, d’autres étapes sont attendues avant le décret autorisant formellement la création de Cigéo et donc les travaux, annoncés pour fin 2027-début 2028. En Meuse, une procédure d’expropriation est toujours en cours. L’Andra doit encore acquérir 13 hectares sur les 665 nécessaires, ainsi que 65 ha de tréfonds pour les installations souterraines. Les militants installés dans l’ancienne gare de Luméville, haut lieu de la lutte contre le projet, sont expulsables à partir du 11 octobre, selon eux. © Agence France-Presse -
Gaza-ville : exode et détresse à l'hôpital al-Chifa sous les frappes israéliennes
Gaza - Le directeur de l’hôpital al-Chifa de Gaza-ville, Mohammed Abou Salmiya, était de garde samedi aux urgences quand sont arrivés les corps de son frère et de sa belle-soeur, tués par une frappe israélienne. «Je suis choqué et dévasté de voir les corps de mon frère et de sa femme», témoigne le médecin. «Tout est possible à présent, car vous recevez vos proches tués ou blessés. Les crimes de l’occupation (Israël, ndlr) se poursuivent et le nombre de martyrs ne cesse d’augmenter». L’hôpital al-Chifa, le plus grand de la bande de Gaza et l’un des rares encore opérationnels dans le territoire palestinien, accueille quotidiennement morts et blessés depuis le début de la guerre déclenchée par l’attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023. Mais l’afflux de victimes a encore grandi depuis le début, le 16 septembre, d’une offensive israélienne sur Gaza-ville dans le but d’anéantir le mouvement islamiste palestinien. Tôt samedi, une ambulance déboule dans l’enceinte de l’hôpital, sirènes hurlantes. A peine quatre corps, enveloppés dans des linceuls blancs, sont-ils déposés sous un arbre à même la terre, qu’une autre ambulance arrive avec des blessés, dont un jeune garçon. «La mort est plus clémente», soupire Mohammed Nassar, 38 ans, un habitant du quartier Tel al-Hawa, en regardant un flot continu d’habitants quitter la zone pour échapper aux bombardements. Selon l’armée israélienne, 480.000 personnes ont fui le secteur depuis fin août, 450.000 selon la Défense civile de Gaza, une organisation de premiers secours opérant sous l’autorité du Hamas. Emportant leurs maigres affaires sur des camions, dans des voitures, sur des charrettes tirées par des ânes ou sur les épaules, des milliers de Palestiniens prennent chaque jour la route vers le sud. «Pas d’argent» Epuisé, Mohammed Nassar dit n’avoir ni la force ni les moyens suffisants pour fuir. «Pour ma femme, mes trois filles et moi, nous attendrons jusqu’au dernier moment. Je n’ai pas l’argent pour partir», confie-t-il. La Défense civile a fait état samedi d’au moins 11 morts dans des frappes sur Gaza-ville. L’armée israélienne n’a pas immédiatement répondu aux demandes de commentaire de l’AFP. Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d’accès sur le terrain, l’AFP n’est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties. L’armée israélienne «veut déplacer de force tout le monde afin de détruire Gaza-ville et d’en faire une autre Beit Hanoun ou Rafah, invivable pour les cent prochaines années», lance Nassar, évoquant d’autres secteurs du territoire transformés en ruines depuis le début du conflit il y a près de deux ans. Malgré les appels au départ et les bombardements, de nombreuses familles refusent ou ne peuvent pas partir. Le trajet coûte cher pour certains, d’autres ne savent pas où aller. Plusieurs habitants ayant fui Gaza-ville racontent avoir mis plus de douze heures pour atteindre les zones du sud indiquées par l’armée israélienne. Et le prix des transports a flambé: des propriétaires de camions demandent désormais entre 1.500 et 2.000 dollars pour effectuer le trajet, selon des témoignages recueillis par l’AFP. «Nous voulons évacuer mais nous n’avons pas d’argent», dit à l’AFP Raeda al-Amareen, réveillée avant l’aube par le bruit des explosions. «Nous n’avons même pas 10 shekels pour acheter du pain. Que pouvons-nous faire? On restera — soit on meurt, soit quelqu’un trouve une solution pour nous.» L’armée a exhorté la population à se rendre dans ce qu’elle qualifie de «zone humanitaire» à Al-Mawasi, sur le littoral sud, où, assure-t-elle, l’aide, les soins et les infrastructures humanitaires seraient fournis. Mais la zone, initialement présentée comme sûre, a elle aussi été visée à plusieurs reprises par des frappes, selon des témoins et des sources locales, ce qui alimente la méfiance des Gazaouis. par l'équipe de l’AFP dans la bande de Gaza © Agence France-Presse -
Tensions Macron-Attal : la brouille qui secoue Renaissance face à la crise politique
Paris - Rien ne va plus entre Emmanuel Macron, président en difficulté ne pouvant se représenter, et Gabriel Attal, prétendant à la succession exfiltré de Matignon par la dissolution. Une mésentente au sommet, sur fond de crise politique et d’incertitude sur l’issue du quinquennat. Juillet 2025. Devant les Jeunes avec Macron, Gabriel Attal fait un pas vers la présidentielle. Quelques minutes plus tard, le président débarque, rabroue ceux qui «ne pens(ent) qu'à 2027" et électrise les jeunes militants en lançant avoir besoin d’eux «pour les cinq», «dix ans qui viennent». Mines crispées des attalistes et du premier d’entre eux. Un député s'étonne de «la manière dont le président a humilié Attal». Et ajoute: «il passe son temps à buter tous ceux qui veulent lui succéder». Un classique français ? La Ve République regorge de luttes entre présidents et successeurs potentiels. Surtout issus du même camp. De Gaulle-Pompidou, Giscard-Chirac, Chirac-Sarkozy... Nicolas Sarkozy, source d’inspiration pour Gabriel Attal, certes issu du PS mais dont une partie de l’entourage a fait ses classes à l’UMP, comme son bras droit Maxime Cordier. «Quand Attal a pris le parti après Matignon, il m’a dit: +je vais faire Sarko 2004, avec une grosse convention d’investiture+", relate un député PS. Il s'était déjà emparé du groupe macroniste à l’Assemblée contre la volonté de l’Elysée. Quelques semaines après la dissolution, point d’orgue d’une mésentente qui a débuté quasiment dès son arrivée à Matignon. La nomination du plus jeune Premier ministre de l’histoire était pourtant un coup personnel du président, contre l’avis de nombreux proches. Mais «deux semaines après, son entourage ne fait que nous savonner la planche», affirme un proche de M. Macron. En pleine crise, l’accueil de M. Macron au Salon de l’Agriculture est dantesque. Celui du Premier ministre plus apaisé. «Il lui sabote le Salon car il n’a pas géré la crise», «ça a été le moment où le président a été physiquement le plus en danger du quinquennat», fulmine cette source pour qui, dès lors, «la confiance est rompue». Front républicain L'épisode de la dissolution a été maintes fois raconté: un Gabriel Attal hors de la confidence, informé au dernier moment. Cloîtré vingt-quatre heures durant dans la résidence primo-ministérielle de Souzy-la-Briche (Essonne). Avant de prendre en main la campagne législative. Les premières sorties du président, qui entendait s’en occuper personnellement, sont jugées catastrophiques jusque dans son camp. En coulisses se noue un désaccord profond: le «front républicain» face à l’extrême-droite aux portes de Matignon. «La vérité, c’est que la dissolution était faite pour que (Jordan) Bardella gagne», «pour qu’ils se grillent et qu’on les vire deux ans après». Mais après le premier tour, «Attal et (Stéphane) Séjourné débarquent et disent: +on va sauver la France, tout le monde se retire+" dans les circonscriptions où le RN menace, affirme un cadre macroniste. «Attal me raconte que quand il appelait des mecs pour se désister, l’Élysée passait des coups de fil pour qu’ils se maintiennent», rapporte une source chez Renaissance. «Il avait une trouille absolue: l’image de lui sur le perron de Matignon serrant la main de Bardella», ajoute une ministre. Côté RN, un cadre l’affirme sans ambages: «c’est Attal qui nous a battus aux élections». Depuis, hors des réunions collectives, aucun échange. Dans cette brouille intestine, chacun se rejette la responsabilité. «Macron, il est président jusqu’au bout, quoi qu’en pense Gabriel», s’agace un soutien élyséen pour qui «Gabriel a fait un choix, de s’en distinguer, de s’en détacher, d’oublier d’où il vient». «Créature» «Attal cherche à harmoniser l’idéologie flottante du groupe, mais vous avez le président qui parasite ça par déloyauté personnelle. Tous ceux qui ont du poids sont traités par le président. En permanence, l’autorité d’Attal est minée», nuance un ancien député. L’après-Matignon fut compliqué pour le jeune patron de Renaissance, symbolisé par cette passation-spectacle avec Michel Barnier. Tous les macronistes ont relevé l’absence de ses proches dans le gouvernement Bayrou. Jusqu'à la nomination de Sébastien Lecornu, fidèle du président, quand à Renaissance, on s’inquiétait d’un nouveau Premier ministre issu du parti présidentiel, signe de «surdité démocratiques». Pour sa rentrée dimanche à Arras, M. Attal va continuer à s’affranchir du chef de l’État. A Renaissance, il multiplie les conventions thématiques. «Il reprend un parti qui n’en est pas un et qui n’a pas d’identité. C’est très compliqué», observe un cadre MoDem. Il déroute aussi certains soutiens par ses sorties, comme sur l’interdiction du voile aux mineures ou la «GPA éthique». «Je ne comprends rien. C’est un mystère pour moi», lâche un cadre centriste. Un Insoumis se dit «stratégiquement stupéfait» quand Attal «pourrait occuper un espace plus au centre-gauche». Ira-t-il jusqu’au bout, notamment face à Édouard Philippe ? «Attal ne sera pas président. Les gens ne voteront pas une troisième fois pour Macron». Car malgré la mésentente, «il en est la créature», juge un cadre d’Horizons. Baptiste PACE © Agence France-Presse