
Bruxelles veut diminuer la dépendance de l'économie aux crédits bancaires

Comment accroître l’offre de financement à long terme qui fait défaut en Europe pour soutenir les investissements sur plusieurs années ? Comment améliorer et diversifier le système d’intermédiation financière pour favoriser ce type d’investissement indispensable pour relancer la croissance et l’emploi ? Dans un livre vert publié ce lundi 25 mars, la Commission européenne ouvre une consultation publique de trois mois sur ce thème central pour l’avenir de l’économie des 27. Afin de satisfaire les importants besoins d’investissement qui se profilent dans les prochaines années, la Commission veut favoriser l’accès des acteurs de l'économie aux financements à long terme « prévisibles », c’est-à-dire notamment aux « financements obligataires » et aux « investisseurs institutionnels ». Et veut parallèlement diminuer la dépendance des entreprises aux crédits bancaires dont le poids reste prépondérant dans le financement de l’économie sur le Vieux Continent.
«Il faut faire en sorte que notre économie et notre secteur financier – notamment les banques et les investisseurs institutionnels tels que les assureurs et les fonds de pension – soient en mesure de financer les investissements à long terme », a préconisé Michel Barnier, commissaire chargé du marché intérieur et des services. Pour sa part Olli Rehn, vice-président de la Commission chargé des affaires économiques et monétaires et de l’euro, estime que «le rééquilibrage nécessaire de l’économie européenne est en cours, et il faut donner aux marchés financiers la possibilité d’apporter un appui à ces changements structurels de plus en plus rapides ».
Accorder un plus grand rôle au financement direct par les marchés de capitaux
Le constat de départ de la Commission est clair : depuis la crise financière, le secteur financier en Europe « n’a plus la même capacité à acheminer l'épargne vers le financement à long terme » de grands projets (infrastructures énergétiques, de transport ou de communication, industrielles ou de services). Autre constat, les acteurs de l’économie sont traditionnellement assez dépendants en Europe des banques. D’où cette réflexion sur la nécessité d’accélérer la marche vers un « système plus diversifié accordant un plus grand rôle au financement direct par les marchés de capitaux (c’est-à-dire au financement obligataire) ainsi qu’aux investisseurs institutionnels (par exemple aux fonds de pension) ou à d’autres alternatives », détaille la Commission. Compte tenu de leur rôle pour la croissance et des difficultés qu’elles rencontrent à trouver des capitaux, les PME doivent « avoir accès à des crédits bancaires, mais aussi à d’autres sources de financement», souligne le communiqué.
La capacité de l’économie à financer l’investissement à long terme dépend de celle du système financier à mettre des fonds à la disposition de manière effective et efficiente, par l’intermédiaire de « marchés ouverts et concurrentiels », martèle Bruxelles. Dans sa vision, «cette mise à disposition peut être soit indirecte, notamment via des banques, des assureurs ou des fonds de pension, soit directe, via les marchés financiers ».
Les réponses à la consultation bruxelloise permettront à la Commission de « dégager des solutions afin de surmonter les obstacles au financement à long terme ». Plusieurs mesures pourront alors être prises, législatives ou non. La Commission veut diriger ses actions menées selon trois axes : la capacité des établissements financiers à mettre à disposition des financements à long terme ; l’efficacité et l’efficience des marchés financiers dans la mise à disposition d’instruments de financement à long terme ; et les facteurs transversaux favorisant l’épargne et le financement à long terme ; et la facilité d’accès des PME aux financements bancaires et non bancaires.
La phase de marasme économique que traverse l’Europe crée un climat d’inquiétude parmi les épargnants et les investisseurs, et des initiatives appropriées pourraient permettre de lever les obstacles aux financements à long terme, espère la Commission. Selon elle, l’un des préalable est « une régulation et une surveillance appropriées pour rétablir la stabilité financière et restaurer la confiance dans les marchés ». Elle rappelle qu’ « un vaste programme de réformes à cet effet, en complément des réformes plus générales d’ordre budgétaire et économique » a été mis en œuvre. Elle estime toutefois que « si la stabilité financière est nécessaire, elle n’est pas suffisante ». D’où l’instauration d’un nouveau cadre réglementaire et prudentiel « calibré de manière à permettre au secteur financier d’apporter un appui à l'économie réelle, sans pour autant compromettre la stabilité financière ».
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«Selfie de toilettes»: la nouvelle tendance mode qui séduit les Nigérianes
Lagos - «Selfies interdits dans les toilettes… C’est une blague!», proclame une pancarte dans un cadre d’or, accrochée au mur marbré des toilettes d’une boîte de nuit de Lagos, la capitale culturelle et économique du Nigeria. De Lagos la déjantée à la sage Abuja, en passant par Kano la conservatrice, les Nigérianes ne badinent pas avec la mode du moment: se prendre en photo dans les toilettes des restaurants et des clubs branchés pour les diffuser sur les réseaux sociaux. Si la mode du «bathroom selfie» («selfie de toilettes») connaît un succès international, sa déclinaison locale reprend toutes les extravagances de la nuit nigériane. Les établissements ont bien saisi l’enjeu : les nombreuses influenceuses du pays le plus peuplé du continent ont le pouvoir, d’un simple «tag», de leur faire une publicité gratuite pour peu que le décor les mette en valeur. Comiebarbie, influenceuse aux plus de 100.000 followers au compteur sur Instagram, venue célébrer son 23e anniversaire à The Library - un club de Lagos, l’atteste: quand elle arrive dans un lieu, elle se rend toujours «rapidement aux toilettes avec ses amies pour prendre des photos» car «la plupart du temps, les photos rendent vraiment bien». «Les clients s’attendent déjà à ce que le restaurant ou le club soit agréable», explique Marianah, cliente de The Library. «Mais lorsqu’ils entrent dans les toilettes et ont l’impression d'être dans une galerie d’art ou un salon luxueux, ils sont pris au dépourvu.» «Ce moment de surprise rend l’expérience encore plus mémorable», et donc «instagrammable», poursuit-elle. La tendance, qui existe dans de nombreux pays, est devenue virale auprès des Nigérianes de la classe moyenne et supérieure, dans un pays où près de 60% des habitants vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Champagne et chandeliers Le club Zaza, valeur sûre des nuits lagosiennes depuis plusieurs années, s’est récemment refait une beauté et a misé gros sur le nouveau look de ses toilettes pour femmes. Plusieurs clientes, moulées dans des robes aux couleurs vives, réajustent leurs décolletés, se déhanchent savamment et lancent une oeillade lascive toute en faux cils à leur smartphone, tête légèrement penchée en arrière. Les murs au papier peint fleuri et aux multiples miroirs permettent d’essayer différents angles de prise de vue. Afin de s’assurer du confort et du temps de pose adéquats, les patrons du lieu ont imaginé une astuce qui fait mouche. En pressant un bouton rouge dans le mur, une coupe de champagne apparaît par une petite lucarne, gratuitement, pour embellir l’attitude et faciliter les sourires. «La décoration est très importante pour les Nigérianes, on doit être créatif pour les attirer», explique Johnny Franjeh, directeur adjoint de Zaza. Dans les toilettes, «on peut voir dix femmes qui attendent de presser le bouton, juste pour mettre une photo sur leur Instagram ou leur Snapchat», se réjouit-il. «Nous avons inventé cette tendance!», revendiquent de leur côté Ghada Ghaith et Rasha Jarmakani, directrices du Rococo, autre établissement branché de Lagos. Faux marbre du sol au plafond, chandelier en cristal, longs miroirs ceints de dorures sculptées, «You’re gorgeous» («tu es magnifique») comme inscrit au rouge à lèvre au-dessus du lavabo doré: les lieux d’aisance doivent mettre à l’aise. «Deux semaines avant l’ouverture, nous avons posté une photo de nous dans les toilettes, sans montrer les éviers ni les cuvettes, juste le sol et le chandelier», racontent-elles. «Deux heures après avoir mis la photo en ligne, nous avons eu 200 demandes de réservations car les gens pensaient que c'était la décoration de la salle, pas des toilettes», s’esclaffent-elles. Stephanie caresse ses longues tresses blondes et bombe la poitrine face au miroir, regard tourné vers les lavabos. Au Bar Called Paper d’Abuja, la capitale politique du Nigeria, une petite pièce «spéciale selfie» a été aménagée dans les toilettes: murs en plexiglass motifs psychédéliques du sol au plafond avec rétroéclairage et miroir géant pour l’effet de perspective, la silhouette de Stéphanie dans sa mini robe dos-nu à paillettes se réfléchit à l’infini. «La chose la plus importante que je recherche, c’est le bon angle pour mes photos, la lumière brille, tout est orange, comme si mes photos ressortaient plus lumineuses», explique la jeune femme de 26 ans. A Kano, deuxième ville la plus peuplée du pays et capitale du nord principalement musulman et traditionnel, la mode du selfie-toilettes fait aussi ses émules, mais sans la même ostentation. Dans les toilettes de l’Antika Restolounge, prisé par les jeunes de la ville, les manches des clientes se font plus longues, les robes plus amples et moins suggestives et les maquillages discrets. Mais même en pull et en casquette, les jeunes femmes passent de longues minutes dans les toilettes et jouent avec leur reflet dans les miroirs agencés sur un papier peint tropical. Leslie FAUVEL © Agence France-Presse -
Affaire Legrand-Cohen: la patronne de France Télévisions accuse CNews d'être «une chaîne d'extrême droite»
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