Non-coté : l’appel des infrastructures

Les fonds de private equity CVC Capital Partners et Bridgepoint font leur entrée sur le marché des «infra», plébiscité pour sa forte visibilité et son couple rendement risque attractif. Un mouvement qui s’inscrit dans une tendance plus globale à la plateformisation dans le non-coté.
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Selon un sondage réalisé par Preqin, 41% des institutionnels prévoient d’accroître leur allocation en infrastructure au cours des douze prochains mois.  -  Crédit Luc De Cleir/Pixabay

Suivant la voie ouverte par des acteurs emblématiques du private equity tels que Blackstone, KKR ou EQT, les fonds CVC Capital Partners et Bridgepoint élargissent leurs expertises en se lançant dans l’infrastructure. Ces développements passent par des acquisitions, avec la prise de contrôle du gérant néerlandais DIF par le premier et la reprise du groupe américain Energy Capital Partners (ECP) par le second.

Ce mouvement a vocation à se poursuivre dans le non-coté. «De nombreux autres fonds de private equity réfléchissent actuellement à faire leur entrée dans l’infrastructure. De nouvelles opérations pourraient intervenir prochainement», prévoit Jean-Christel Trabarel, fondateur de Jasmin Capital.

Si l’attrait s’amplifie, il n’est pas nouveau. «L’appétit des institutionnels pour la classe d’actifs, qui offre une diversification par rapport au private equity et présente un couple rendement/risque attractif, ne cesse en effet de croître depuis dix ans», poursuit Jean-Christel Trabarel.

Cherchant à répondre à cette demande, les gérants (GP, general partners) se sont mis, ces dernières années, en ordre de marche. L’an passé, Schroders a notamment pris le contrôle du britannique Greencoat et Ares Management a racheté l’australien AMP Capital. Siparex s’est rapproché de TiLT Capital Partners en 2021 et Tikehau a acquis Star America Infrastructure Partners en 2020. D’autres types d’acteurs s’intéressent également aux infrastructures : Samsung Life Insurance est entré cette année à hauteur de 20% au capital de Meridiam et Armen a pris une participation dans RGreen Invest.

Divers atouts

Les atouts de la classe d’actifs sont nombreux. «L’infrastructure constitue un complément d’allocation idéal pour les investisseurs institutionnels, qui sont déjà très exposés à l’immobilier et souhaitent diversifier leur poche d’actifs réels», perçoit Cyril Demaria, senior advisor en actifs privés et professeur affilié à l’Edhec.

Cette stratégie leur offre par ailleurs des rendements attractifs, avec des TRI net de 11%-13% en moyenne contre 15%-17% pour le LBO et 7%-8% pour la dette privée senior. Des retours moyens de surcroît récurrents et prévisibles. «Elle se révèle particulièrement intéressante dans le contexte actuel, dans la mesure où les revenus des actifs en portefeuille sont le plus souvent indexés sur l’inflation, et ceci généralement sans limites, contrairement à l’immobilier où les loyers sont en pratique plus contraints», poursuit le professionnel, sans nier toutefois que l’infrastructure reste un milieu très exigeant et contrôlé, avec une forte dimension politique.

Selon un sondage réalisé par Preqin, 41% des institutionnels prévoient ainsi d’accroître leur allocation en infrastructure au cours des douze prochains mois. Ceci se compare à seulement 23% dans le venture, qui fait face à de forts ajustements de valorisation, et à 34% sur les autres segments du private equity.

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Se lancer dans l’infrastructure a toutefois un coût. «Un gérant d’infrastructure se valorise entre 15 et 20 fois son Ebitda, contre un multiple de 10 à 14 pour un gérant de private equity. Cette prime s’explique par des durées de détention des actifs plus étendues dans les infrastructures, permettant aux GP de sécuriser leurs revenus sur plus longue période», analyse Jean-Christel Trabarel, chez Jasmin Capital. La classe d’actifs étant aujourd’hui très prisée par les gérants, cela a en outre tendance à faire gonfler les prix. «La valorisation des sociétés d’infrastructure se révèle globalement confortable», confirme Cyril Demaria.

Des coûts plus compétitifs

Parmi les critères d’évaluation, figure la croissance des encours. Or, contrairement au «buy-out», qui a atteint un certain stade de maturité, «l’infrastructure a encore un beau potentiel de progression», estime Cyril Demaria. Le deuxième facteur repose sur les cash-flows futurs. Si le niveau des commissions de gestion se révèle moins élevé dans la classe d’actifs (0,75% à 1,25% vs 1,75% à 2% en LBO), «la base de calcul est large (les fonds et les opérations étant de taille importante) et les flux sont perçus sur des durées plus longues», poursuit le professionnel. D’autres facteurs, tels que la proximité avec les institutionnels ou le positionnement spécifique (le «greenfield» étant plus difficile et risqué que le «brownfield»), peuvent par ailleurs intervenir et jouer comme une prime.

Ces développements dans l’infrastructure s’inscrivent dans un mouvement plus global de «plateformisation» dans l’univers du non-coté. Face à des contraintes croissantes sur les plans réglementaires et en matière de reporting, les gérants cherchent en effet à développer une logique industrielle permettant notamment de mutualiser les coûts entre stratégies. L’objectif est par ailleurs de mieux répondre à la demande de leurs investisseurs en leur proposant une plus large palette d’offres.

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