
Les fonds de private equity se ruent en Bourse

Les fonds de private equity auraient-ils soudainement décidé de déclarer leur flamme à la Bourse ? Si ces acteurs du non-coté ont toujours eu une affinité marquée pour le «public equity» quand il s’agit de se séparer d’une de leurs participations, rien ne laissait présager qu’un nombre croissant d’entre eux décideraient de lancer leur propre introduction en Bourse (IPO).
Il y a encore une semaine, Reuters révélait les velléités de cotation de L Catterton – la structure d’investissement cofondée il y a bientôt six ans par LVMH, Bernard Arnault et l’américain Catterton. Un projet qui pourrait se traduire par une introduction en Bourse d’ici la fin de l’année… ou par la fusion avec un Spac. Cette dernière option a été privilégiée en mai dernier par Owl Rock Capital Group et Dyal Capital Partners, qui ont franchi le pas dans le cadre d’une fusion à trois avec Altimar Acquisition Corp.
Envolée de 25% du titre Bridgepoint
La voie traditionnelle de l’IPO a quant à elle été privilégiée par Bridgepoint. Lors de l’annonce du projet d’introduction à la Bourse de Londres, fin juin, le gérant d’origine britannique avait précisé vouloir soutenir sa croissance, tout en permettant à certains actionnaires de céder leurs parts. Le succès a été au rendez-vous. Pour sa première journée de cotation, mercredi, l’action Bridgepoint s’est envolée de près de 25%, après que la firme et ses actionnaires ont levé au total 789 millions de livres (915 millions d’euros).
Un succès retentissant qui offre au groupe de nouveaux moyens financiers pour se développer et aux actionnaires un brin de sérénité. Les 166 personnes physiques présentes au capital ont revendu pour 380 millions de livres de titres. Parmi elles, Frédéric Pescatori, l’associé responsable de la France et du Sud de l’Europe. Cette figure du private equity tricolore a profité de l’offre pour céder l’équivalent de 16,5 millions de livres d’actions ; le solde de sa participation (2,29% du capital) étant valorisé environ 80 millions. Au total, la valorisation de Bridgepoint a, elle, décollé à près de 2,8 milliards de livres (3,3 milliards d’euros).
Rupture de modèle
De quoi aussi donner des idées au français Antin Infrastructure Partners et à l’américain TPG, qui évaluent actuellement la possibilité d’une cotation. Dans l’Hexagone, Eurazeo et Wendel sont les plus anciennes structures d’investissement cotées. Mais leur modèle originel est en rupture avec les business models vendus aujourd’hui aux investisseurs. «Le marché recherche aujourd’hui des modèles très purs, essentiellement basés sur les commissions de gestion des fonds avec très peu de carried interest, constate un banquier ayant œuvré à plusieurs de ces IPO. En se basant sur l’accroissement naturel de leurs actifs sous gestion, ces gérants apportent une très grande prédictibilité de leur résultat net. A ce titre, une vraie transformation a eu lieu au moment de l’introduction en Bourse d’EQT Partners.»
Il y a deux ans, l’IPO du fonds d’origine suédoise avait connu un franc succès. L’ensemble des actions présentées au marché avaient été achetées dans la fourchette de prix proposée, deux heures seulement après le lancement de l’opération. L’offre avait été plus de 10 fois sursouscrite. Le cours, lui, avait bondi de plus de 30% lors du premier jour de cotation, amenant la capitalisation boursière de 63,8 à 85,7 milliards de couronnes suédoises… et aujourd’hui à 352 milliards. Le marché n’avait pourtant pas été habitué à de pareilles performances. «Les investisseurs valorisent bien mieux ce type de sociétés de gestion que celles ne proposant qu’une participation au sein d’un portefeuille d’actifs, à l’instar des holdings cotées, souvent pointées du doigt pour leurs frais de fonctionnement. Eurazeo était dans cette catégorie, avant sa transformation par Virginie Morgon», estime un avocat.
Les modèles reposant sur les frais de gestion rassurent. La quasi-totalité des fonds de LBO ont vu leurs actifs sous gestion gonfler continuellement depuis leur création. Une tendance inébranlable. Selon une étude de Preqin sortie en novembre 2020, 79% des investisseurs institutionnels interrogés prévoient d’augmenter leurs allocations en private equity au cours des prochaines années. D’ici à 2025, les montants levés par l’industrie du buy-out pourraient encore doubler.
L’intérêt de la cotation
Si en 2006 Partners Group avait indéniablement réussi son introduction, les IPO de sociétés de gestion n’ont pas toujours eu la cote. En 2012, Oaktree et Carlyle s’étaient cotés dans l’indifférence des investisseurs. Celle de Tikehau Capital, réalisée en 2017, n’a pas non plus connu de ruée. Le prix de l’action est aujourd’hui légèrement supérieur à celui de l’introduction, tandis que la holding d’investissement Salvepar avait été retirée de la cote pour faciliter la compréhension du modèle économique du groupe. Mais avec les capitaux levés, Tikehau et ses alter ego ont réussi à s’ériger en consolidateurs de leurs marchés.
«L’avantage numéro un de l’introduction en Bourse est de pouvoir faire des acquisitions et d’investir en direct dans de nouvelles stratégies, pour développer de véritables plateformes destinées à leurs investisseurs», détaille un gérant. En 2018, Tikehau a lancé les hostilités en mettant la main sur la structure d’investissement spécialisée dans l’aéronautique et la défense ACE Management. Ou bien encore en montant sa participation dans la société londonienne d’investissement Augmentum Fintech, ce mois-ci. Il a aussi multiplié les initiatives en lançant notamment T2 Energy Transition, un véhicule d’un milliard d’euros dédié à la décarbonation, et un fonds de private equity identique en Amérique du Nord. En début d’année, la société de gestion fondée par Antoine Flamarion et Mathieu Chabran a également appuyé la création du Spac Pegasus, aux côtés de la Financière Agache (l’une des holdings de Bernard Arnault) et de Jean-Pierre Mustier.
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Australie : attaque mortelle de requin sur un surfeur à Sydney, plages fermées
Sydney - Un «grand requin» a tué un surfeur samedi sur une plage populaire de Sydney, a annoncé la police, une attaque mortelle rare qui a entraîné la fermeture de plusieurs plages en Australie. La victime, un habitant de 57 ans, surfait avec cinq ou six amis dans les eaux du Pacifique, au large des plages voisines de Long Reef et Dee Why, au nord de Sydney, ont précisé les autorités. Ce surfeur expérimenté, marié et père d’une jeune fille, a perdu «plusieurs membres», a déclaré le responsable de la police de l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud, John Duncan, lors d’une conférence de presse. «D’après ce que je comprends, lui et sa planche ont disparu sous l’eau», a-t-il ajouté. «Le corps a été retrouvé flottant dans les vagues» et «la planche du surfeur a été brisée en deux». Deux surfeurs l’ont aperçu dans l’eau et l’ont ramené à terre. «Malheureusement, à ce moment-là, il avait déjà perdu énormément de sang, et les tentatives de réanimation ont échoué», a poursuivi M. Duncan. Des témoins ont vu le squale, a indiqué la police, qui avait évoqué auparavant un «grand requin». Des experts gouvernementaux examineront les restes de la planche et le corps de la victime afin de déterminer l’espèce du requin, a indiqué la police. La plupart des morsures graves en Australie proviennent de grands requins blancs, de requins-bouledogues et de requins-tigres. Des images diffusées par les médias locaux montraient des policiers rassemblés sur le rivage et des ambulances garées à proximité. Les plages situées entre les quartiers nord de Manly et Narrabeen ont été fermées pour au moins 24 heures, a indiqué Surf Life Saving NSW, branche locale d’un réseau de clubs de sauveteurs bénévoles et professionnels. «Terrible tragédie» «Pour le moment, merci de rester hors de l’eau sur les plages environnantes et de suivre les consignes des maîtres-nageurs et sauveteurs», a déclaré le directeur général de l’organisation, Steven Pearce. «Nous adressons nos plus sincères condoléances à la famille de l’homme touchée par cette terrible tragédie». Les clubs de sauvetage voisins ont annulé toutes les activités et entraînements nautiques pour le week-end. Des drones et des sauveteurs sur des jets skis surveillaient les plages à la recherche de la présence de requins. Il s’agit de la première attaque mortelle de requin à Sydney depuis 2022, lorsque Simon Nellist, un moniteur de plongée britannique de 35 ans, avait été tué au large de Little Bay. La précédente attaque fatale dans la ville remontait à 1963. Un surfeur anonyme a déclaré au Sydney Daily Telegraph avoir été témoin des suites de l’attaque : «Quatre ou cinq surfeurs l’ont sorti de l’eau et il semblait qu’une partie importante de la partie inférieure de son corps avait été attaquée», a-t-il dit. Les gens ont été sommés de sortir de l’eau, a-t-il raconté. «Il y avait un sauveteur qui agitait un drapeau rouge. Je ne savais pas ce que cela signifiait... mais j’ai pensé que je devais probablement rentrer à terre». La dernière attaque mortelle en Australie remonte à mars, lorsqu’un surfeur avait été tué au large de la plage isolée de Wharton Beach, en Australie-Occidentale. Depuis 1791, plus de 1.280 incidents impliquant des requins ont été recensés en Australie, dont plus de 250 mortels, selon une base de données sur les rencontres entre ces squales et les humains. David WILLIAMS © Agence France-Presse -
Anthropic règle un litige majeur sur le droit d’auteur en IA avec un accord à 1,5 milliard de dollars
New York - La start-up américaine d’intelligence artificielle (IA) Anthropic a accepté de verser au moins 1,5 milliard de dollars à un fonds d’indemnisation d’auteurs, ayants droit et éditeurs qui poursuivaient l’entreprise pour avoir téléchargé illégalement des millions de livres, selon un document de justice publié vendredi. Cet accord à l’amiable, d’un montant colossal, constitue une étape marquante dans le débat sur l’utilisation de données pour développer et entraîner les grands modèles d’IA générative. «Cet accord historique est le plus élevé pour une affaire de droits d’auteur», a commenté auprès de l’AFP l’avocat des détenteurs de droits, Justin Nelson, du cabinet Susman Godfrey. «C’est le premier de son genre dans l'ère de l’IA». Fin juin, le juge californien saisi du dossier avait néanmoins estimé que le fait d’alimenter un logiciel d’IA générative avec des oeuvres en théorie protégées par le droit d’auteur ne constituait pas une infraction. Il avait seulement retenu contre Anthropic le téléchargement et le stockage de livres issus de librairies pirates en ligne, reconnaissant la société californienne coupable de ne pas avoir acheté ces ouvrages. «Nous sommes en désaccord avec l’opinion du tribunal selon laquelle on peut séparer le téléchargement d’une oeuvre de son utilisation», a indiqué une porte-parole d’Anthropic. Mais «nous pensons que cet accord va nous permettre de nous concentrer sur notre mission essentielle, plutôt que sur un long contentieux», a-t-elle ajouté. Le montant sur lequel se sont accordées les parties sera au minimum de 1,5 milliard de dollars et pourrait augmenter si la liste définitive des livres concernés, qui n’est pas encore arrêtée, dépassait 500.000, auquel cas Anthropic verserait 3.000 dollars de plus par ouvrage. L’accord doit encore être homologué par le juge William Alsup. Une audience est prévue lundi au tribunal fédéral de San Francisco. «Un début» Cette transaction permet à Anthropic d'éviter un procès, qui devait démarrer début décembre pour déterminer le montant des dommages et intérêts. La start-up risquait d'être condamnée à débourser une somme bien supérieure à celle décidée avec les détenteurs de droit, au point de mettre en péril son existence même. L’accord «va assurer à chaque (plaignant) une indemnisation significative», a fait valoir Justin Nelson, «et il établit un précédent en matière de paiement des détenteurs de droits.» De nombreux autres dossiers sont encore en cours devant des tribunaux américains, initiés par des écrivains, musiciens ou éditeurs de presse pour utilisation non autorisée de leur production. Vendredi, deux écrivains ont lancé un recours, qu’ils souhaitent collectif, contre Apple, accusant le géant de la Silicon Valley d’avoir utilisé des oeuvres contenues dans des bibliothèques pirates pour entraîner les modèles d’IA intégrés dans ses appareils. La plupart des grands acteurs de l’IA générative s’appuient sur la notion juridique d’utilisation équitable («fair use» en anglais), susceptible de limiter l’application du droit de propriété intellectuelle. Dans sa décision de juin, le juge Alsup avait estimé qu’en entraînant ses modèles d’IA, baptisés Claude, avec des milliers de livres, Anthropic s’inscrivait dans le cadre de l’utilisation équitable. «Le principe juridique selon lequel le développement de l’IA sur des oeuvres protégées relève d’une utilisation équitable demeure intact», a souligné la porte-parole d’Anthropic. Cet accord «ne fait que régler un différend sur la façon dont certains documents ont été obtenus», a-t-elle poursuivi. En juin, dans une autre affaire de ce type, concernant Meta, devant la même juridiction, un autre magistrat fédéral avait donné raison au géant des réseaux sociaux, mais tout en expliquant que les plaignants auraient pu soulever des arguments recevables. Les créateurs de contenu, qu’il s’agisse de musique, de livres ou d’articles, s’inquiètent de voir la valeur marchande de leur travail s’effondrer avec l'émergence des interfaces d’IA générative. «Nous espérons qu’il s’agisse du premier exemple d’une longue série de sociétés d’IA à qui on demande des comptes pour le vol de contenu créatif», a réagi l’organisation Human Artistry Campaign, qui milite pour un développement responsable de l’IA. «Ce n’est qu’un début», a écrit l’association sur X, «mais il est marquant et historique.» Thomas URBAIN © Agence France-Presse -
Donald Trump rebaptise le Pentagone en « ministère de la Guerre » pour afficher la puissance américaine
Washington - Donald Trump a signé vendredi un décret visant à rebaptiser le ministère américain de la Défense en «ministère de la Guerre», ajoutant qu’il voulait par là envoyer un «message de victoire» et «de force» au reste du monde. Le président américain a laissé entendre qu’il pouvait se passer d’un vote du Congrès pour procéder à ce changement d’appellation. «Les mots comptent», a dit le chef du Pentagone Pete Hegseth, présent aux côtés de Donald Trump dans le Bureau ovale, assurant que cette nouvelle appellation devait permettre de «restaurer une éthique guerrière». Formellement, il s’agit pour l’instant d’une appellation «supplémentaire», selon un document distribué dès jeudi par la Maison Blanche. Un haut responsable du ministère a indiqué que le coût de cette opération, potentiellement très dispendieuse, deviendrait «plus clair» au fur et à mesure de sa mise en place. Peu après la signature du décret présidentiel, les mots «ministère de la Défense» ont été immédiatement retirés d’un mur dans le Pentagone, devant des caméras de télévision. Le site du ministère a été renommé et Pete Hegseth se présente désormais comme «ministre de la Guerre» sur X. «Nous allons soumettre (ce changement de nom) au Congrès», a prévenu Donald Trump. «Je ne sais pas (si les parlementaires voteront en ma faveur, ndlr), nous verrons bien, mais je ne suis pas sûre qu’ils aient besoin de le faire». «Trop défensif» Ce n’est pas la première fois que le républicain de 79 ans impose ses idées sans passer par la case législative. Son second mandat est marqué par une volonté assumée d'étendre le pouvoir présidentiel, à coups de décrets et de décisions empiétant sur les prérogatives du Congrès. Il a signé vendredi son 200e décret depuis son retour à la Maison Blanche en janvier. Le président des Etats-Unis avait déjà fait part de ce projet qui restaurerait une appellation ayant existé de 1789 à 1947. «Défense, c’est trop défensif, et nous voulons aussi être offensifs», avait-il déclaré. Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump a mobilisé l’armée pour imposer une image de puissance spectaculaire et combler son appétit de fastes militaires. Il a organisé un rare défilé le jour de son anniversaire, déployé la Garde nationale dans des villes dirigées par ses opposants, et ordonné une frappe exceptionnelle sur un bateau dans les Caraïbes dans le cadre de la lutte affichée contre le narcotrafic. Les démocrates dénoncent régulièrement ce recours aux militaires, révélateur selon eux d’une dérive autoritaire. Contre le «politiquement correct» Le président américain avait eu pendant son premier mandat une relation plutôt contrariée avec l’armée. Son ancien chef d'état-major, le général Marc Milley, l’a qualifié d’"aspirant dictateur». Des articles de presse avaient également attribué à Donald Trump des propos méprisants pour des militaires américains morts au combat. Cette fois, le dirigeant républicain a remanié l'état-major américain pour s’entourer de hauts gradés choisis par ses soins, et a nommé en la personne de Pete Hegseth un ministre à la loyauté farouche. Le chef du Pentagone, adepte d’un discours viriliste et d’opérations de communication musculeuses, a dit vendredi que l’objectif de l’armée américaine était d’atteindre «une létalité maximale, pas une létalité tiède». Il a dit vouloir aller à l’encontre du «politiquement correct». Aurélia END © Agence France-Presse