
Renault entrevoit enfin de nouveaux horizons avec Nissan

L’impatience montait chez les investisseurs. Les atermoiements nippons sur l’avenir de l’alliance Renault-Nissan pouvaient-ils faire déraper le regain boursier du groupe au Losange ? L’action Renault signe, au coude à coude avec Saint-Gobain, la meilleure performance boursière du CAC 40 en 2023 – soit un bond de plus de 20%, deux fois supérieur à l’avancée du compartiment automobile européen sur la période (+9%). Le marché anticipe la capacité du groupe français à faire aboutir son projet de renouveau de l’alliance avec Nissan, synonyme de nouvelles coopérations et, par ricochet, de regain bénéficiaire et de création de valeur.
Du nouveau à Yokohama
Depuis mardi, un nouveau verrou a sauté. Les administrateurs indépendants de Nissan, c’est-à-dire le conseil sans les représentants de Renault, ont donné leur feu vert à la nouvelle architecture proposée, y compris sur les coopérations et investissements dans de nouvelles filiales portées par Renault. Un conseil opérationnel de l’alliance ainsi qu’un conseil d’administration formel du groupe japonais devraient venir entériner l’accord d’ici à la fin du mois, avant que celui-ci ne soit officiellement dévoilé en février. Du côté de Renault, aucun conseil d’administration n’est en principe attendu avant le 15 février prochain pour valider les comptes 2022. Mais une réunion exceptionnelle peut rapidement être convoquée.
Les interventions publiques françaises – Elysée, Bercy – ont joué en faveur d’un déblocage des discussions. Du côté nippon, parcouru par plus de lignes de fracture qu’il n’y paraît, la tentation a longtemps été grande de faire du rééquilibrage des liens capitalistiques un préalable à toute autre avancée. Du côté français, la nouvelle géographie du capital ne constituait en revanche qu’un des éléments d’un accord plus global, portant notamment sur l’état des coopérations, l’investissement dans Ampère - le pôle électrique et logiciel de Renault – ou encore les règles en matière de propriété intellectuelle et de brevets.
L’accord entériné par les administrateurs de Nissan prévoit donc une réduction de la part de Renault dans le groupe japonais de 43% à 15% tandis que le groupe de Yokohama retrouvera les droits de vote associés à sa propre participation de 15% dans le groupe français. Au-delà de l’accord de principe, de nombreux détails restent encore à finaliser, notamment sur la gouvernance de la future fiducie – le «trust» qui doit abriter les 28% de Nissan dont Renault devra se séparer -, les conditions et le calendrier des cessions des titres du japonais. «C’est la différence entre la signature et le ‘closing’ d’une opération», décrypte un bon connaisseur du dossier selon lequel «le diable reste dans les détails».
Déblocages en série
Cette clarification en cours de l’alliance s’accompagne d’autres déblocages, notamment la perspective d’une entrée de Nissan dans le capital d’Ampère à hauteur de 15%. En revanche, selon nos informations, le scénario d’une cotation de ce pôle d’ici à fin 2023 a perdu en probabilité. Des scénarios alternatifs, combinant investisseurs industriels et technologiques et fonds de Private Equity, sont en cours d’exploration. Parallèlement, l’entrée du saoudien Aramco à hauteur de 20% du capital de l’entité de Renault dédiée aux moteurs thermiques – le projet Horse - est proche d’une finalisation. Le chinois Geely et le constructeur français se partageraient chacun 40% des parts.
Mollesse commerciale
Cette accélération de l’histoire intervient à un moment charnière pour Renault sur le plan commercial. S’il dévoilera mercredi les chiffres de ses ventes pour l’ensemble de ses marques en 2022, le groupe au Losange a déjà publié mardi ceux de sa marque-phare, avec une performance en recul pour la quatrième année consécutive. L’an dernier, 1,47 million d’unités ont été vendues, sous marque Renault, soit un repli de 9,4 %. Une telle érosion commerciale est assumée afin de privilégier la rentabilité aux volumes. Mais cette stratégie qui passe par une électrification à marche forcée de la gamme - déjà 39 % des ventes en 2022 étaient constituées de véhicules électriques ou hybrides - n’est pas sans risque. Renault concentre ses futurs nouveaux modèles sur ce terrain où les tensions concurrentielles iront crescendo dans les prochains mois. La guerre des prix initiée par Tesla ne fait que commencer.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse