
Rémunérations et «say-on-climate» animeront encore les AG 2023

Quels enjeux pour les assemblées générales 2023 ? Lors de son traditionnel rendez-vous de début d’année, la fintech Scalens a réuni plusieurs parties prenantes pour évoquer leurs attentes.
La rémunération des dirigeants devrait rester un sujet sensible, particulièrement dans un contexte inflationniste et de ralentissement de la croissance. Selon le sondage réalisé en novembre dernier par Scalens et Avanty avocats, 44% des sociétés du SBF 120 prévoient d’augmenter la rémunération fixe du dirigeant, 60% comptent encore modifier la part des critères ESG, autres que le climat et le capital humain, comme l’éthique, la réputation de l’entreprise ou les actions locales. En outre, un tiers des sociétés prévoient d’attribuer des actions à l’ensemble des collaborateurs. Un moyen de mobiliser les équipes. Glass Lewis prévient déjà qu’il regardera de près les augmentations des dirigeants. L’agence de conseil en vote ne veut pas de rémunération exceptionnelle pour les dirigeants sortants, sauf exception. Un dirigeant qui part, ne se voit pas non plus attribuer une rémunération de long terme, ajoute Proxinvest.
Attention au risque de double rémunération
Toutefois, « une rémunération exceptionnelle bien calibrée est le signe que le comité de rémunération a bien fait son travail », souligne Jean de Calbiac, avocat, associé fondateur du cabinet Avanty. « Aucun outil n’est à bannir, poursuit Cédric Lavérie, responsable de la recherche sur la gouvernance française chez ISS. Il faut savoir bien utiliser la rémunération exceptionnelle et aussi la prévoir dans la politique de rémunération, sans pour autant demander un chèque un blanc. Cela nécessite donc de prévoir un plafond raisonnable pour rassurer les investisseurs. En revanche, il faut éviter une double rémunération. Si une rémunération de long terme (LTI) élevée est votée pour motiver l’intégration d’une grosse acquisition, on ne propose pas l’année d’après une remise à niveau du package liée à la nouvelle taille de l’entreprise ». Une rémunération exceptionnelle « ne doit pas revenir tous les ans et doit rester exceptionnelle », rappelle Jehanne Leroy, directrice de la recherche France chez Proxinvest, privilégiant des instruments de rémunération de long terme assortis d’objectifs de performance, par exemple pour l’intégration d’une grosse acquisition.
Attention au risque d’insincérité sur les critères RSE
En matière de rémunération, le premier risque est médiatique, relève Jean de Calbiac. Toutefois, il souligne aussi le risque d’insincérité dans le document d’enregistrement universel (URD), si par exemple les critères RSE sont indiqués atteints, alors qu’ils ne le sont pas. Aussi, « j’invite les entreprises à la plus grande prudence sur les critères climatiques utilisés pour le bonus annuel, alors que les objectifs climat sont établis sur le moyen terme, confie Jean de Calbiac. Ces objectifs ont plus de sens pour les plans de rémunération variable de long terme ». Cédric Lavérie avoue son appréhension sur les critères climatiques, craignant qu’ils garantissent seulement la rémunération du dirigeant. Ne serait-il pas préférable d’attendre que les sociétés calibrent un critère qui fonctionne bien ? D’ailleurs, « pourquoi pas envisager des critères négatifs, suggère Cédric Lavérie. Si le socle minimum de RSE n’est pas atteint, le conseil pourrait retirer tout ou partie du bonus ». En assemblée générale, le conseil devra faire preuve de transparence et détailler la rémunération, « qui devra être raisonnable, justifiable, acceptable », souligne Michel de Fabiani, président du club Nominations Rémunérations de l’Institut français des administrateurs (IFA).
Le «say-on-climate» fait débat
Ce travail d’analyse et d’arbitrage nécessite d’avoir des comités de rémunération forts et efficaces, « composés d’une majorité d’indépendants, faisant appel à des consultants extérieurs différents de ceux de la direction, s’informant sur les politiques des investisseurs et des proxys, travaillant en lien avec les comités d’audit et ESG, … », ajoute Michel de Fabiani.
Les agences de conseil en vote ont également rappelé les ajustements de leur politique pour 2023. Glass Lewis pourra recommander de voter contre le président du comité des nominations ou contre le président du conseil, en cas de réunification des fonctions de président et de directeur général sans justification convaincante. Le proxy demande aussi de donner davantage d’informations sur la supervision de la cybersécurité. Proxinvest et l’AFG remontent aussi leurs exigences d’un cran. En particulier, l’AFG lance un mouvement majeur en recommandant de doter le conseil d’administration d’un budget autonome.
Pour leur part, Michel de Fabiani et Jean de Calbiac fustigent la multiplication des « say-on », sur la rémunération, le climat… Le premier invite les investisseurs mécontents à changer le conseil. Le second recommande de déjà appliquer les règles de droit français et européen. Pourtant, le rapport que vient de publier le HCJP sur le « say-on-climate » ne soulève ni obstacle juridique, ni risque, rappelle Cédric Lavérie. Et ce vote n’a pas pour objet de définir la stratégie climatique de l’entreprise mais de consulter les actionnaires dessus, conclut Jehanne Leroy.
Plus d'articles Assemblée générale
-
Climat: Le fonds de pension danois Akademiker Pension cible Nordea
Le fonds de pension danois Akademiker Pension juge que Nordea ne fait pas assez d'effort sur ses objectifs climat. -
Les sociétés de gestion font des progrès mitigés sur la transparence de leurs votes
Selon une étude de ShareAction, les gestionnaires d’actifs publient davantage leurs votes aux assemblées générales des entreprises mais expliquent peu leurs choix de voter contre certaines résolutions. -
AllianzGI soutient la résolution sur les droits des salariés chez Starbucks
La société de gestion veut s’assurer qu’il n'y a pas d'écart entre l’engagement affiché de l'entreprise et la pratique réelle, avec une évaluation indépendante.
Contenu de nos partenaires
- La Société Générale présente sa nouvelle direction autour de Slawomir Krupa
- Credit Suisse entraîne le secteur bancaire européen dans sa chute
- Les actions chutent avec les banques américaines
- L’électrochoc SVB met la finance sous tension
- Credit Suisse, trois ans de descente aux enfers
- Les gérants prennent la mesure de la persistance de l’inflation
- Silicon Valley Bank : la chute éclair de la banque des start-up
- Slawomir Krupa sort la Société Générale du brouillard
- Chute de SVB : les Etats-Unis garantissent les dépôts et HSBC rachète les actifs anglais
-
Editorial
Motion de censure: Macron et le poison des trois paradoxes
Premier paradoxe, démontrer qu'une majorité alternative n'existe pas ne renforcera pas pour autant l'actuelle majorité relative, abîmée par trois mois d'hystérie sur les retraites -
Négociations commerciales
Prix. La proposition de loi Descrozaille adoptée en commission mixte paritaire
Parmi ses dispositions, un point fait particulièrement débat : l'extension aux rayons non-alimentaires des encadrements des promotions à 34 % -
France éternelle
Safran, à nouveau champion du dépôt de brevets en 2022
Le trio de tête des entreprises les plus innovantes n'a pas bougé en dix ans. Le signe d'une économie ankylosée