
L’inflation défie les objectifs des distributeurs spécialisés du SBF 120

Tension extrême sur les prix. Le choc d’approvisionnement provoqué par la crise sanitaire puis le choc énergétique engendré par la guerre en Ukraine ont sérieusement accéléré la dynamique d’inflation, notamment en Europe. En Bourse, «les secteurs tels que l’agroalimentaire et les boissons, considérés comme défensifs, se portent mieux que les secteurs plus cycliques, comme la technologie ou les biens de consommation discrétionnaire», observe Johan Van Geeteruyen, gérant chez Degroof Petercam Asset Management.
Spécialistes de la vente de biens discrétionnaires – soit non essentiels –, Maisons du Monde et Fnac Darty pâtissent ainsi de cette mauvaise conjoncture. A la fin mai, le distributeur de meubles a émis un avertissement massif sur ses résultats 2022, en indiquant avoir sous-estimé ses projections de coûts, dans un contexte «de forte inflation et de forte volatilité». Le mois précédent, Fnac Darty avait laissé ses prévisions de trésorerie opérationnelle inchangées pour les exercices 2021 à 2023, tout en prévenant que son plan annuel de performance ne lui permettrait de compenser que «partiellement» l’impact de l’inflation.
Sans surprise, les deux entreprises sont malmenées en Bourse. Depuis le début de l’année, l’action Maisons du Monde a chuté de 57% tandis que le titre Fnac Darty a reflué de 32%. Aussi, la part des analystes qui recommandent d’acheter l’action Fnac Darty a reculé de 17 points de pourcentage entre janvier et juin derniers, à 71%. Concernant Maisons du Monde, cette part a fondu de 25 points de pourcentage au cours de la même période, pour tomber à 38%. Cette pression pourrait encore s’intensifier.
«Les analystes tablent sur une baisse de 5% du chiffre d’affaires de Maisons du Monde en 2022, ce qui reflète plutôt bien l’état de la demande, mais il ne prévoit pour l’instant qu’un repli de 1,3% de l’activité de Fnac Darty pour l’année en cours, ce qui paraît en revanche un peu optimiste», observe Florent Thy-Tine, chez TP ICAP Midcap Partners. Les intermédiaires financiers n’ont donc probablement pas fini d’abaisser leurs estimations et recommandations sur les actions du secteur de la distribution spécialisée, «qui rebute tous les investisseurs depuis quelques semaines», remarque un gérant.
De nouvelles alertes dans les cartons ?
Dans une note récente, Bryan Garnier & Co. expliquait que certains distributeurs spécialisés européens, dont Fnac Darty, risquaient de ne pas atteindre leurs objectifs fixés pour cette année. Ces derniers reposent sur des hypothèses d’inflation devenues obsolètes, note le bureau d’études. S’appuyant sur un argumentaire similaire, Moody’s a abaissé à «négative» sa perspective pour le secteur de la distribution en Europe, alertant sur une baisse à venir des ventes des distributeurs de meubles.
Or, l’inflation promet de gagner en vigueur. Rien qu’en France, où Maisons du Monde et Fnac Darty réalisent plus de la moitié de leurs revenus, l’augmentation des prix devrait approcher 7% en septembre, puis rester comprise entre 6,5% et 7% d’ici à la fin d’année, selon les prévisions de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). En moyenne annuelle, elle atteindrait 5,5% dans le pays en 2022, du jamais-vu depuis 1985. La Banque centrale européenne anticipe une inflation de 6,8% cette année dans la zone euro.
La période de juillet à octobre sera propice à de nouvelles alertes sur résultats de distributeurs spécialisés européens, redoute Bryan Garnier. Ces acteurs disposeront alors d’une meilleure visibilité sur leur activité en fin d’année. Grâce à leur forte implantation française, Maisons du Monde et Fnac Darty pourraient mieux amortir l’impact de l’inflation que les groupes allemands Ceconomy ou Zalando, davantage exposés aux autres pays de la zone euro. Les deux groupes hexagonaux n’auront toutefois pas la garantie d’atteindre leurs objectifs, précise l’intermédiaire financier.
Le plan stratégique dévoilé par Maisons du Monde en novembre 2021 reste «pleinement valable», «même si le calendrier d’atteinte des objectifs à 2025 pourrait être allongé», indiquait le spécialiste de l’ameublement en mai. Une manière de préparer les investisseurs à un nouvel ajustement de ses perspectives ? Maisons du Monde publiera ses résultats semestriels le 28 juillet, soit un jour après Fnac Darty.
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Reconnaissance de l’Etat palestinien: avant une assemblée générale de l'ONU qui s'annonce historique, Mahmoud Abbas rencontre Keir Starmer à Londres
Londres - Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas s’est entretenu lundi soir avec Keir Starmer à Downing Street, à Londres, alors que Londres se rapproche de la reconnaissance de l’Etat de Palestine. Les deux dirigeants ont discuté de «l’urgence de mettre fin aux terribles souffrances et à la famine» à Gaza et de la libération des otages détenus par le Hamas, a indiqué un porte-parole de Downing Street. M. Abbas a salué «l’engagement» du Royaume-Uni à «reconnaître un Etat palestinien pendant l’Assemblée générale de l’ONU», qui se tient du 9 au 23 septembre à New-York, "à moins qu’Israël ne change de cap», a ajouté le porte-parole. Plusieurs pays dont la France ont annoncé leur intention de reconnaître l’Etat de Palestine lors l’Assemblée générale. Keir Starmer a annoncé fin juillet que son pays reconnaîtrait l’Etat de Palestine en septembre, sauf si Israël prenait une série d’engagements, dont celui d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. Cette annonce avait été vigoureusement condamnée par Israël. Lors de leur rencontre, les deux dirigeants ont convenu qu’il n’y aurait «aucun rôle pour le Hamas dans la future gouvernance de la Palestine» et insisté sur la nécessité d’une «solution à long terme» au conflit. Le président israélien en visite à Londres Mahmoud Abbas, 89 ans, est arrivé à Londres dimanche soir pour une visite de trois jours. Le mois dernier, les Etats-Unis ont refusé ou révoqué des visas à quelques 80 Palestiniens, dont le président de l’Autorité palestinienne pour l’Assemblée générale de l’ONU. Lors de leur entretien, M. Starmer a «salué l’engagement» de M. Abbas "à «réformer l’Autorité palestinienne». Le président israélien Isaac Herzog est lui aussi attendu au Royaume-Uni. Selon son bureau, il doit quitter Israël mardi «pour une visite officielle à Londres» et devrait être de retour dans son pays vendredi. Une rencontre avec Keir Starmer n’a pas été confirmée par Downing Street. Le président israélien «se concentrera», «lors de ses rencontres diplomatiques», sur la libération des otages, «parallèlement à d’autres questions politiques», selon son bureau. Il va rencontrer des membres du Parlement, des leaders d’opinion et des personnalités des médias, a indiqué la présidence israélienne. L’objectif de la visite d’Isaac Herzog, qui a un rôle surtout protocolaire, est de montrer sa «solidarité avec la communauté juive, qui subit de violentes attaques et fait face à une vague d’antisémitisme», selon cette source. Il a été invité «par les principales organisations de la communauté» juive, devant lesquelles il va prononcer des discours dans des conférences dédiées «au soutien» à Israël et "à la lutte contre l’antisémitisme». Israël considère que reconnaître un Etat palestinien revient à accorder «une récompense au Hamas», après les massacres du 7 octobre 2023 commis par le mouvement islamiste palestinien. L’attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles. La campagne de représailles israéliennes a fait au moins 64.522 morts dans la bande de Gaza, en majorité des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé de Gaza. © Agence France-Presse