Les résolutions climat 2022 seront scrutées par les agences de conseil en vote

ISS introduit un cadre d’analyse sur le «say on climate». Glass Lewis demande des précisions sur le rôle du conseil en matière environnemental.
Bruno de Roulhac
ISR - climat - eco
Beaucoup de sociétés s’interrogent sur la présentation d’une résolution climat en 2022.  -  Fotolia

Une saison chasse l’autre. En prévision des assemblées générales 2022, les agences de conseil en vote dévoilent les ajustements de leur politique de vote. Les américaines ISS et Glass Lewis viennent de les publier, tandis que Proxinvest et l’Association française de la gestion (AFG) le feront en janvier.

D’ores et déjà, «nous recevons beaucoup de demandes de dialogue de la part des sociétés, qui veulent s’améliorer, en particulier après une saison 2021 avec une baisse des taux d’approbation», confie Cédric Lavérie, responsable de la recherche sur la gouvernance française chez ISS.

Grande nouveauté : ISS introduit un cadre d’analyse sur le say-on-climate. Une réponse à un mouvement qui s’est affirmé cette année avec plus de 25 résolutions soumises au vote des actionnaires dans le monde, mais très hétérogènes entre celles présentées par les sociétés demandant l’approbation d’un plan de transition climatique ou d’un reporting climat, celles qui seraient représentées au vote des actionnaires chaque année et celles proposées par les actionnaires. «Beaucoup de sociétés s’interrogent sur la présentation d’une résolution climat en 2022, constate Cédric Lavérie. Certains sont plus attentistes dans l’attente d’un cadre juridique plus clair, d’autres veulent tester leurs actionnaires». Pour l’heure, seul Amundi a déclaré qu’il présenterait une résolution climat en 2022. Dans son récent rapport sur la gouvernance, l’Autorité des marchés financiers (AMF) demande aux sociétés qui soumettent des résolutions climat au vote de leurs actionnaires «de les informer précisément sur les conséquences en cas de vote positif ou négatif et de leur fournir toutes les informations leur permettant d’apprécier - en considération des objectifs poursuivis - le contenu, l’impact et les enjeux de ces résolutions». Les actionnaires demandant l’inscription de telles résolutions à l’ordre du jour d’une AG doivent fournir les mêmes informations.

Pour les sociétés voulant proposer une résolution climat, ISS invite à voter au cas par cas en tenant compte de l’exhaustivité et de la rigueur du plan climat. Pour aider à la réflexion, le proxy propose une série, non-limitative, de critères (conformité avec les recommandations de la Task Force on Climate-related Financial Disclosures, divulgation de chiffres précis sur les émissions de gaz à effet de serre...). «Nous prévenons les sociétés des points sensibles que nous étudierons, poursuit Cédric Lavérie. En revanche, il est bien trop tôt pour proposer un cadre harmonisé valable pour toutes les sociétés».

Pour les actionnaires déposant des résolutions climat, ISS recommande de vérifier d’abord la communication et la performance de l’entreprise en matière d’émission de gaz à effet de serre et d’étudier si la résolution proposée n’est pas trop exigeante, en termes de périmètre ou de délai, ou trop prescriptive. «Nous regardons la pertinence de la demande, ajoute Cédric Lavérie. En tout état de cause, la résolution déposée ne pourra être que consultative et non contraignante, en raison du cadre juridique français actuel».

Pour sa part, Glass Lewis recommande, à partir de 2022, de voter contre la réélection du président du comité de gouvernance – ou son équivalent – dans le CAC 40, si la société ne précise pas explicitement le rôle du conseil en matière de surveillance des questions environnementales et sociales.

Rémunérations plus transparentes

Sur les autres sujets de gouvernance, ISS ne prévoit pas de changements majeurs pour la France, mais des précisions. En particulier en matière de rémunérations des dirigeants. «Les dérogations aux politiques votées doivent être clairement explicitées et détaillées, tant sur la catégorie de rémunération concernée (fixe, bonus, long terme, etc.) que sur les plafonds et coefficients correcteurs appliqués, insiste Cédric Lavérie. Nous avons ce dialogue depuis deux ans avec les sociétés et formalisons maintenant ces demandes». ISS demande aussi un lien clair entre la performance de l’entreprise et les critères du variable, et accentue ses exigences pour les critères ESG, qui doivent récompenser une performance en ligne avec la stratégie et les objectifs de l’entreprise. «Comme pour les critères financiers, nous avons des attentes de transparence et variabilité, prévient Cédric Lavérie. Avec la crise Covid, nous avons vu beaucoup de critères ESG atteints étonnement facilement».

En cas de manque de transparence sur les éléments clés de la structure de rémunération, ou en cas d’opposition depuis plusieurs années d’un actionnaire significatif, Glass Lewis pourrait recommander de voter contre le rapport de rémunération.

Quant au ratio d’équité, entre la rémunération du dirigeant et la moyenne de celles des collaborateurs, «notre politique demande explicitement la prise en compte d’un périmètre pertinent, précise Cédric Lavérie. Encore quelques sociétés françaises se contentent d’un ratio sur la holding de tête».

Contre-pouvoir au PDG

Dans les pays à structure duale, avec directoire et conseil de surveillance, comme l’Allemagne, l’Autriche et les Pays-Bas, ISS vote généralement contre la nomination d’un ancien président du directoire comme président du conseil de surveillance, préférant un indépendant. En revanche, il ne se prononce pas pour la France mais il est déjà opposé aux PDG. De son côté, Glass Lewis pourrait recommander de voter contre le président du comité des nominations, en l’absence d’administrateur référent ou d’autre contre-pouvoir dans les sociétés à PDG.

Glass Lewis ajoute d’autres recommandations pour la France. Si une société du SBF 120 se référant au code Afep-Medef n’a pas fixé et communiqué d’objectifs de mixité de ses instances dirigeantes, le proxy peut voter contre la réélection du président du comité de gouvernance. Même sanction en cas de non-divulgation du taux d’assiduité des administrateurs aux séances du conseil et des comités, et pour les sociétés qui ne se référeraient à aucun code de gouvernance, à moins d’une justification convaincante, à partir de 2023.

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