
Le groupe Lactalis cultive secret familial et opérations de croissance

A Laval, en Mayenne, fief historique du groupe Lactalis, la maison de la famille Besnier trône toujours au cœur de la zone industrielle occupée par le numéro un européen du fromage. Un détail qui résume à lui seul l’organisation centralisée d’un groupe aussi secret que sont célèbres ses marques, le camembert Président, les crèmes Bridel, la mozzarella Galbani ou le lait Lactel. Depuis sa création dans les années 30 par André Besnier, le grand-père de l’actuel président, Emmanuel Besnier, le capital de l’entreprise familiale n’a jamais été ouvert (voir organigramme).
Et ce n’est pas le récent «raid» lancé sur Parmalat qui fera déroger à la règle. Les quelque 1,2 milliard d’euros mobilisés pour prendre 29% du capital du groupe laitier italien ont été financés sur la trésorerie et la capacité d’endettement de Lactalis. Le montage exact reste secret mais pas question de faire entrer des minoritaires dans les structures de tête. A l’instar des Mulliez, propriétaires d’Auchan ou de Décathlon, la famille Besnier, 15e fortune française selon le classement Challenges, ne publie pas les comptes de la maison familiale. Le groupe a réalisé l’an dernier un chiffre d’affaires de 9,4 milliards d’euros.
Si la vitesse et la précision avec lesquelles Lactalis a pu s’emparer de 29% du capital de Parmalat ont pu surprendre, alors que le groupe venait d’être éconduit du dossier Yoplait, l’opération menée avec l’appui de la Société Générale et du cabinet d’avocats Clifford Chance correspond pleinement à la stratégie d’internationalisation du groupe mayennais, déjà présent dans plus de 140 pays. D’ailleurs, en 2005, Lactalis était déjà évoqué comme un repreneur possible de Parmalat, encore fragilisé par un scandale financier retentissant. Sous la direction d’Emmanuel Besnier, qui a succédé à son père Michel après son décès en 2000, Lactalis a réalisé 21 acquisitions, affirmant l’accent international insufflé dans les années 80. Le rachat éclair des 29% de Parmalat, dont la capitalisation boursière s’élève à 4 milliards d’euros, pour un chiffre d’affaires de 4,4 milliards, est la plus grosse opération réalisée depuis le rachat de Galbani en 2006 auprès de BC Partners. Elle permettrait au groupe de prendre par exemple pied au Canada, le premier marché de Parmalat, devant l’Italie.
A 41 ans, Emmanuel Besnier connaît l’entreprise familiale sur le bout des doigts. Avant d’en prendre les commandes, le fils cadet de Michel Besnier a été directeur général du groupe laitier en charge du développement. L’homme est discret - il n’a jamais accordé d’interview. Il est présenté comme «charmant» par un connaisseur du groupe Lactalis mais «extrêmement ferme et déterminé». Malgré les protestations qu’il suscite en Italie, l’investissement dans Parmalat s’annonce donc durable.
Non coté et avec une structure actionnariale concentrée autour des trois petits-enfants du fondateur via l’indivision Besnier, Lactalis a le temps devant lui. Au milieu des années 2000, l’affaire Unibel, le holding de contrôle des Fromageries Bel, avait déjà défrayé la chronique boursière. La mise en place concomitante par Unibel d’une offre publique d’échange simplifiée et d’une offre publique de rachat d’actions permit de sortir la famille Besnier d’Unibel dont elle détenait 28,5%. L’opération avait provoqué un vif débat juridique, boursier et familial. Depuis cet épisode, les relations entre les Besnier et les héritiers Bel se sont apaisées. Mais la Société de financement de l’industrie laitière (Sofil), l’un des holdings des Besnier, détient toujours 24% des Fromageries Bel. «Il s’agit d’un investissement personnel de la famille Besnier», précise une source proche.
Chez Parmalat, en revanche, l’objectif est «industriel», martèle Lactalis. Le fromager italien est certes assis sur une trésorerie de 1,4 milliard d’euros accumulée grâce aux réparations payées par les banques après la faillite frauduleuse de 2003. Mais la législation italienne lui interdit de distribuer plus de 50% de la somme. Antonio Sala, le président de Lactalis Italia, a d’ailleurs assuré que l’objectif de Lactalis est d’investir la trésorerie de Parmalat dans son développement, notamment via des acquisitions. «Nous pensons que d’autres actionnaires peuvent partager notre projet et contribuer à son succès», a-t-il déclaré hier. Une façon de calmer les inquiétudes en Italie même si le groupe mayennais n’a pas l’intention de renoncer à sa position de force chez Parmalat. Et sûrement pas de renoncer à son management futur. L’alliance créée en 2006 avec le géant Nestlé dans les yaourts, sous la marque La Laitière notamment, pourrait servir d’exemple. Le groupe Lactalis détient 60% du capital de la filiale commune et en assure le management.
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