
Chevron relance la concentration dans le schiste

Le bassin permien continue d’attiser les convoitises, comme en témoignent les gigantesques opérations de rapprochement qu’il provoque. Vendredi, Chevron a annoncé avoir trouvé un accord pour acquérir Anadarko Petroleum pour une valeur de fonds propres de 33 milliards de dollars (29 milliards d’euros). L’offre, à 65 dollars par action (16,25 dollars et 0,3869 action Chevron par titre de la cible), sera payée pour 75% en actions. Dette comprise, la cible est valorisée 48 milliards de dollars.
L’acquisition d’Anadarko par Chevron serait, si elle était conclue, la sixième transaction la plus importante de l’histoire dans le secteur des hydrocarbures, selon les statistiques de Refinitiv (en excluant la fusion de Royal Dutch Shell en une seule structure capitalistique en 2004 et celle d’Energy Transfer Partners et de Sunoco Logistics, dans les pipelines). Il s’agit de la plus importante depuis l’acquisition de BG Group par Royal Dutch Shell en 2016. Chevron intégrera le podium mondial des producteurs d’hydrocarbures à la troisième place, dépassant le français Total et le britannique BP et le mettant au coude à coude avec l’anglo-néerlandais Royal Dutch Shell et l’américain Exxon.
Anadarko dispose de positions fortes dans deux ressources sur lesquelles Chevron mise gros : l’huile de schiste (shale gas) et le gaz naturel.
Une des premières réserves au monde
Plus grosse compagnie indépendante américaine, Anadarko est notamment implantée dans le bassin permien, à cheval entre le Texas et le Nouveau-Mexique, qui regorge de réserves d’huile de schiste. En raison de la hausse du prix du baril entre septembre 2017 et octobre 2018 après deux ans de purgatoire, puis à nouveau depuis le début de l’année, la production d’huile de schiste, dont le bassin est l’une des premières réserves au monde, est remontée en flèche, contribuant à faire des Etats-Unis le premier pays producteur de pétrole. L’acquisition fait de Chevron le leader dans cette zone, alors qu’il avait, comme la plupart des «majors», globalement raté le premier train du pétrole de schiste dans les années 1990, laissant l’initiative à des producteurs indépendants, plus petits.
A l’occasion de sa dernière journée investisseurs début mars, la compagnie avait d’ailleurs annoncé son intention de multiplier par plus de deux sa production dans le bassin permien d’ici à 2023 pour la porter à 900.000 barils par jour, alors qu’il avait annoncé un objectif de 650.000 barils l’année dernière. Il prévoit d’atteindre les 600.000 dès 2020. Son rival Exxon s’est fixé lui un objectif d’un million de barils/jour.
Parallèlement, la demande de gaz est montée en flèche : son prix plus abordable et ses caractéristiques moins polluantes en ont fait un choix crédible pour les pays qui dépendent encore fortement des centrales à charbon ou à lignite. Or, Anadarko est notamment présent dans un projet majeur au Mozambique, qui représente un investissement de quatre milliards de dollars, et dans le Colorado, riche en pétrole comme en gaz.
Guerre d’offres en vue ?
Considérant que l’acquisition lui permettra à terme de dégager davantage de flux de trésorerie disponible, pour peu que le baril de Brent se maintienne au-dessus des 60 dollars, Chevron ajoute qu’il prévoit de porter son programme de rachat d’actions de 4 à 5 milliards de dollars par an à partir de la conclusion de la transaction.
La Bourse a réagi de façon contrastée à cette annonce. Le titre a perdu 5% vendredi, à 119,76 dollars, les investisseurs craignant, vu la taille de la cible, une remise en cause des engagements de Chevron de maîtriser ses dépenses et ses investissements. Le groupe a précisé vouloir vendre l’équivalent de 15 à 20 milliards de dollars d’actifs entre 2020 et 2022 pour compenser l’acquisition. En revanche, l’action Anadarko a bondi de 32%, proche de la prime de 39% proposée par Chevron par rapport à son cours de clôture jeudi.
Il est possible que les investisseurs misent sur une bataille d’offres : selon plusieurs médias, Occidental Petroleum, un autre acteur du bassin permien, aurait proposé à Anadarko 70 dollars par action au sein d’une offre mixte, avec une composante en cash plus importante. Il hésiterait quant à la marche à suivre.
L’annonce de l’offre de Chevron a également soutenu le cours des compagnies pétrolières indépendantes présentes sur le basson permien, comme Apache Corp. ou encore Pioneer Natural Resources.
Chevron est épaulé par Credit Suisse, tandis qu’Evercore et Goldman Sachs conseillent Anadarko.
Plus d'articles Entreprises
-
Airbus met fin aux discussions avec Atos sur une entrée au capital d'Evidian
L’action du groupe de services numériques plonge de plus de 15 % à Paris en réaction à cette impasse. -
Apple lance son service de paiement fractionné
La firme de Cupertino déploie aux Etats-Unis son service 'Apple Pay Later' -
Yo Takatsuki : «JPMorgan AM n'a jamais soutenu le dépôt d'une résolution externe»
Dans un entretien accordé à L'Agefi, Yo Takatsuki, Global head of stewarship chez JPMorgan AM, détaille les ressorts de la politique de vote et d'engagement du groupe.
Contenu de nos partenaires
- La Société Générale présente sa nouvelle direction autour de Slawomir Krupa
- Credit Suisse entraîne le secteur bancaire européen dans sa chute
- Fraude fiscale : BNP Paribas, la Société Générale et Natixis perquisitionnées
- Les actions chutent avec les banques américaines
- L’électrochoc SVB met la finance sous tension
- Credit Suisse, trois ans de descente aux enfers
- Les gérants prennent la mesure de la persistance de l’inflation
- Silicon Valley Bank : la chute éclair de la banque des start-up
- UBS prend une place hors norme en absorbant Credit Suisse
-
Consommation
La grande distribution tisse sa toile en Afrique
Les hypermarchés, supermarchés et magasins «cash & carry» gagnent du terrain sur le continent face à la distribution traditionnelle. Dopé par l'essor de la classe moyenne, les dépenses de consommation sont en constante progression -
Tribune libre
«La forêt a tout pour plaire aux investisseurs». La tribune de Christelle Sauvage et Raphaël de Valence
«La détention d’une forêt permet de transmettre à ses descendants un actif tangible et durable dans des conditions fiscalement avantageuses» -
Lancée
Réforme des retraites: l’intersyndicale appelle à une nouvelle journée de mobilisation le 28 mars
« Le puissant rejet social de ce projet est légitime et son expression doit se poursuivre », a indiqué Marylise Léon, secrétaire générale adjointe de la CFDT, lors d'une conférence de presse