
Volatilité et valorisations élevées ont pesé lourdement sur les offres publiques en 2018

Annus horribilis pour les offres publiques en France. Seulement 22 opérations ont eu lieu l’an dernier – contre 40 en 2007, et 35 pour la médiane 10 ans – soit un plus bas historique, constate la dixième édition du baromètre des offres publiques d’EY Corporate Finance. Les capitaux acquis se limitent à 2,6 milliards d’euros, contre 21,5 milliards en 2017 et une médiane 10 ans de 3,2 milliards. Les deux plus importantes opérations de l’année – l’OPAS d’Allianz sur Euler Hermès et l’OPA de Givaudan sur Naturex – représentent près des deux tiers des volumes acquis. «2018 a plutôt été une année décevante, confie Marc Lefèvre, associé EY et co-auteur de l’étude. Si tous les indicateurs macro- et micro-économiques étaient au vert en janvier pour signer une année de référence, le très fort retour de la volatilité et des incertitudes, la perte de confiance et le retour de l’aversion pour le risque en a eu raison.»
En particulier «les niveaux de valorisation atteints en 2018, et notamment durant le premier semestre, ont pu être un frein aux opérations», précise Marc Lefèvre. D’autant que la prime médiane sur le dernier cours est de 21,1%, en progression par rapport à la prime médiane de 19,8% de 2017. Les acheteurs ont donc dû mettre le prix. Néanmoins, hors extrêmes, la prime médiane sur la valeur intrinsèque de la cible, selon les experts indépendants, est de 9,1%, en recul par rapport aux 11% de 2017. Cette valorisation s’écarte cependant de l’évaluation faite par la banque conseil de l’acheteur, qui présentait l’an dernier une prime de 16%. Soit un écart de plus de 7 points entre les deux évaluations, contre plus de 3 points en 2017. «La volatilité élevée peut expliquer les difficultés de valorisation et donc ces écarts importants», poursuit Marc Lefèvre.
Toutes les offres de l’an dernier étaient amicales, et plus de la moitié émanaient de l’actionnaire de référence ou de la société elle-même. Les deux tiers des acquéreurs sont des groupes industriels, deux fois plus nombreux que les acteurs financiers. Surtout, «toutes les opérations ont été réalisées en cash, constate Marc Lefèvre. Signe que les trésoreries sont toujours pléthoriques. Seules les valeurs moyennes sont davantage prêtes à se diluer en offrant des titres sur des niveaux élevés de valorisation».
Des IPO plus nombreuses que les retraits de cote
En dépit de la noirceur de l’année écoulée, la Place parisienne enregistre un point positif, avec une société de plus sur la cote. Or, le flux net était négatif de 19 sociétés en 2017 et de 5 en 2016 ! En effet, si les introductions ont été limitées à 17 (7 sur Euronext et 10 sur Euronext Growth) contre 14 en 2017, les retraits de cote ont également diminué, avec 12 sociétés en moins à la suite d’offres publiques. En outre, 4 sociétés ont été radiées de la cote à la suite d’une faillite.
Cette faiblesse des entrées en Bourse – alors qu’EY tablait sur un «embouteillage» avant l’été 2018 – est inquiétante. Alors que les marchés primaires actions du monde entier ont été très actifs au premier semestre 2018, «Paris n’a pas retrouvé sa place dans le classement des Places les plus actives», constate l’étude. Euronext Paris reste loin derrière Deutsche Börse et le London Stock Exchange. D’ailleurs, les fonds levés ont été divisés par plus que deux à 1,1 milliard d’euros, dont 697 millions pour Neoen, le développeur de parcs solaires et éoliens. De fait, la plupart des sociétés se sont introduites en bas de fourchette et les grosses opérations annoncées (Novares, Autodis, Delachaux et Consolis) n’ont pas eu lieu. Quant à celles qui ont franchi le pas, le parcours boursier 2018 a été très difficile pour la plupart.
«Pour 2019, nous espérons une reprise des introductions en Bourse, notamment celles qui ont été reportées l’an dernier faute de fenêtre de marché favorable, poursuit Marc Lefèvre. L’an dernier, les ‘dual tracks’ se sont multipliés, et face au torrent de liquidité du private equity, les vendeurs ont rapidement fait leur choix. Pourtant, dans cette hypothèse les sociétés familiales risquent de perdre leur pouvoir, alors qu’elles gardent le contrôle en se cotant. Ce pourrait être un moteur pour les IPO 2019.»
Le marché secondaire n’a pas été plus actif. Les 51 sociétés ayant réalisé des augmentations de capital ont seulement levé 2,5 milliards d’euros (dont 750 millions pour Altran dans le cadre du refinancement de l’acquisition d’Aricent). Soit moins d’un quart des 10,9 milliards d’euros levés par 69 entreprises en 2017. En revanche, «les sociétés ont profité de taux bas pour émettre davantage d’obligations», conclut Marc Lefèvre.
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