
L’Union européenne s’apprête à sanctionner de nouveau l’énergie russe

L’Europe poursuit son sevrage de l’énergie russe. Le 5 février, un nouveau pan des sanctions contre la Russie sera mis en place : il sera impossible au bloc européen d’importer des produits distillés russes (carburants et produits chimiques) par voie de mer. Un plafonnement des prix devrait également être mis en place, mais son niveau n’avait toujours pas été décidé vendredi, en début d’après-midi. La Commission européenne proposait un plafond à 100 dollars pour le baril de diesel, le produit raffiné le plus important en valeur, tandis que certains pays membres voulaient le voir fixé plus bas.
Dépendance
Ces nouvelles sanctions remettent en évidence deux questions épineuses. D’abord, l’Europe reste très dépendante des exportations russes. Selon des données de S&P Global, les exportations de diesel de la Russie vers l’Europe (EU, Norvège et Royaume Uni) se sont élevées en moyenne à 448.000 barils par jours (bpj) au cours des 18 premiers jours de janvier, 27% des importations totales, contre 670.000 bpj début de 2022 (46%). Les faibles stocks de carburants compliquent la bascule : les stocks de distillats moyens en Europe ont augmenté de 800.000 barils en décembre, mais restent inférieurs d’environ 30 millions de barils à leur moyenne sur cinq ans, malgré des importations de produits russes en nette hausse au quatrième trimestre (+28% par rapport au trimestre précédent).
Se pose ensuite la question du contournement des sanctions. Le spécialiste du transport maritime Vortexa remarque que les flux ont commencé à se réorganiser : les pays nord-africains ont augmenté leurs importations de produits russes au détriment de leurs achats de distillats produits par les pays du Golfe. La région consomme 1,5 million de bpj, et la Russie y exporte moins de 200.000 bpj pour le moment. La marge de progression y est donc importante, ce qui va pousser les pays du Golfe à se substituer à la Russie dans les importations européennes. Les temps de transit sont par ailleurs à peine plus élevés que pour les destinations historiques. «Il est probable que le baril de diesel russe se maintienne au-dessus des 100 dollars, malgré des remises consenties aux importateurs de plus en plus importantes et des prix en stagnation. A l’inverse, le brut de l’Oural a chuté vers 40 dollars du baril, résume Vortexa. Le diesel pourrait donc à lui seul soutenir le secteur du raffinage russe».
Surcoûts
Reste à voir comment seront réorientés le reste des flux. «Le transport maritime des distillats est plus contraignant et nécessite davantage de navires que pour le pétrole brut», écrit Ehsan Khoman, responsable de la recherche marchés émergents chez MUFG. Cela compliquerait le transport vers les acheteurs asiatiques. D’autant qu’«un plafonnement des prix pourrait inciter l’Asie à acheter des produits russes, mais la région pourrait aussi préférer importer davantage de brut à prix réduit pour profiter de la hausse des marges de raffinage». Goldman Sachs s’attend ainsi à ce que la production russe chute de 600.000 bpj d’ici à avril en raison du manque de navires pour réorienter complètement les flux de distillats. Les analystes de S&P Global tablent sur une baisse de 600.000 bpj après février. Une baisse des activités de raffinage ne se traduira pas nécessairement par une hausse de la production de pétrole : des problématiques logistiques (manque de stockage, de navires) contraignent la production de brut.
Les efforts russes pour maquiller les exportations (des transferts de navire à navire ont ainsi lieu en Méditerranée ou au large des côtes européennes), la flotte de navires non déclarés et le contournement des interdictions - il est très difficile de tracer l’origine des produits distillés, qui peuvent être mélangés à des exportations d’origine indienne ou chinoise, par exemple - vont rendre toute analyse des sanctions compliquée à court terme. Il est pourtant clair que l’embargo obligera la Russie à vendre moins cher son diesel -et l’Europe à payer davantage pour le sien.
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