
L’Italie regarde de plus près l’idée du recours au fonds de sauvetage européen

Le débat politique autour d’un recours de l’Italie à la ligne de crédit ECCL du Mécanisme européen de stabilité (MES/ESM) créée pendant la crise du Covid s’intensifie. Le président du Conseil italien a déclaré le 12 juin que le gouvernement se déciderait d’ici à juillet, selon les besoins. Depuis, Giuseppe Conte a reconnu que le déficit budgétaire de l’Italie devrait se creuser au-delà des 10,4% du PIB prévus actuellement pour 2020, et d’autres sources ont indiqué que le pays se préparait à mobiliser 15 à 20 milliards d’euros supplémentaires dans le cadre d’un nouveau plan pour soutenir le chômage partiel et les collectivités locales, ce qui tendrait à assouplir sa position.
Le gouverneur de la Banque d’Italie, Ignazio Visco, le ministre italien de l’Economie, Roberto Gualtieri, et d’autres cadres du Parti démocrate (PD) ont prôné l’utilisation du prêt du MES, même si la question reste politiquement très sensible en Italie, où y sont opposés de nombreux cadres du parti de coalition Mouvement 5 Etoiles (M5S), et encore plus la Ligue de Matteo Salvini et le parti (également eurosceptique) Fratelli d’Italia. Leur argument du risque de lourdes mesures d’austérité tient moins depuis que l’Eurogroupe a entériné, le 8 mai, l’ouverture pendant douze mois (prolongeables) de prêts ECCL à 10 ans (renommés pandemic crisis supports) à un taux d’emprunt autour de 0,1% à hauteur de 2% du PIB pour chaque Etat sans conditionnalité autre que de les utiliser pour des mesures liées à la crise sanitaire comme les dépenses de santé. «Mais il faut garder à l’esprit que toute implication du MES nécessite un vote positif au Parlement, que le gouvernement dispose d’une petite majorité au Sénat, et que le soutien de Forza Italia et de certains députés M5S ne permet pas de savoir si un tel vote ne pourrait pas compromettre la stabilité et diviser le gouvernement», préviennent Clemente Delucia et Mark Wall, économistes de Deutsche Bank.
Pour ces derniers, le risque de stigmatisation par les marchés des pays ayant recours au MES n’est plus trop d’actualité. «L’image de la Grèce sous tutelle du FMI reste forte, et c’est pour éviter ce genre de situations que les autorités avaient lancé cet automne la réforme du MES», rappelle Stéphane Deo, stratégiste de LBPAM. Mais cette réforme, qui pouvait mener à simplifier les procédures de restructuration des dettes d’Etats en difficulté et donc à faire remonter les risques autour de l’Italie, a été repoussée avec la crise du coronavirus.
Risque de stigmatisation éloigné
D’un point de vue économique, le MES offre actuellement des taux intéressants (0,08% après commissions) pour 11 des 19 Etats de la zone euro, dont l’Italie. «Mais les montants envisagés autour de 30 milliards pour ce pays ne permettent pas de changer la donne, poursuit Stéphane Deo. En supposant qu’il emprunte à 0,1% via le MES au lieu de 1,5% à 10 ans, ce ne seraient que 420 millions d’intérêts économisés chaque année. Le gain pourrait davantage être psychologique, confirmant une meilleure intégration de la zone euro, avec la possibilité de réduire les spreads, sachant que, aux niveaux actuels, l’Italie n’a absolument aucun problème à émettre de nouvelles dettes qui diminuent à chaque fois son coût de financement moyen pondéré.»
Les économistes de Deutsche Bank estiment que l’Italie aura des besoins de financement bruts en hausse de 12% du PIB cette année, mais aboutissent à la conclusion qu’un accord rapide - dès cet été - sur le Fonds de relance paneuropéen, dont l’Italie pourrait obtenir 170 milliards en subventions et prêts, diminuerait fortement l’intérêt du prêt MES, donc la probabilité que le gouvernement risque une dissolution sur ce débat. Le scénario, tout aussi probable, d’un accord européen retardé redonnerait de l’intérêt à l’instrument, mais sous réserve d’y recourir rapidement pour ne pas risquer à la fois d’être à nouveau stigmatisé et de donner des arguments aux «pays frugaux» pour repousser le besoin du Fonds de relance en s’appuyant sur le fait que le MES n’est pas utilisé…
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Nucléaire iranien : un nouveau cadre de coopération convenu entre l'Iran et l'AIEA
Le Caire - L’Iran a annoncé mardi avoir convenu d’un nouveau cadre de coopération avec l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), après avoir suspendu sa collaboration avec le gendarme onusien du nucléaire dans le sillage de la guerre contre Israël en juin. Le directeur de l’AIEA, Rafael Grossi, a salué «une étape importante dans la bonne direction». Il a indiqué sur X s'être entendu lors d’une réunion au Caire avec le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi «sur des modalités pratiques pour reprendre les inspections en Iran» des activités nucléaires. La rencontre au Caire, à laquelle a participé le ministre égyptien des Affaires étrangères Badr Abdelatty, était la première entre MM. Araghchi et Grossi depuis la guerre de 12 jours déclenchée par une attaque israélienne sur l’Iran en juin. Le dossier du nucléaire iranien empoisonne de longue date les relations de l’Iran avec les Occidentaux. Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël, ennemi juré de l’Iran, soupçonnent le pouvoir iranien de vouloir se doter de la bombe atomique. L’Iran dément vigoureusement avoir de telles ambitions militaires mais insiste sur son droit au nucléaire pour des besoins civils. Après la rencontre au Caire, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Esmaïl Baghaï, a annoncé que «l’Iran et l’AIEA étaient parvenus à une entente sur la manière d’agir dans ce nouveau contexte, après les attaques illégitimes menées par les Etats-Unis et le régime sioniste contre les installations nucléaires pacifiques de notre pays», sans autre précision. «Nouvelle relation» Plus tard, MM. Araghchi et Grossi ont signé un accord intitulé «Modalités techniques pour la mise en œuvre des inspections». M. Abdelatty a dit espérer que l’accord «marquera le véritable point de départ d’une nouvelle relation entre les deux parties, caractérisée par une plus grande transparence». Il a aussi espéré qu’il «favorise une entente» d’abord avec les pays européens ayant menacé de rétablir les sanctions contre l’Iran, puis «conduise à un retour à la table des négociations entre l’Iran et les Etats-Unis». MM. Araghchi et Grossi ont ensuite rencontré le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui a salué «une étape positive vers la désescalade». Téhéran avait suspendu sa coopération avec l’AIEA après la guerre déclenchée le 13 juin par une attaque sans précédent d’Israël sur le sol iranien. L’Iran avait reproché à l’AIEA de ne pas avoir condamné les bombardements israéliens, puis américains, qui ont visé ses installations nucléaires durant le conflit. Téhéran estime également que l’AIEA a une part de responsabilité dans le déclenchement de l’attaque israélienne surprise, car elle a été lancée au lendemain du vote d’une résolution critique sur le programme nucléaire iranien au siège de l’agence à Vienne. Depuis juillet, une loi votée au Parlement iranien bannit en principe toute coopération avec l’AIEA. Menaces de sanctions Des inspecteurs de l’agence ont néanmoins fait un bref retour en Iran fin août pour remplacer le combustible du site de Bouchehr, la principale centrale nucléaire de production d'électricité du pays. Mais ils n’avaient pu accéder aux sites bombardés en juin et dont l'étendue exacte des dégâts n’est pas connue. La rencontre entre MM. Araghchi et Grossi est intervenue au moment où la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne (groupe E3) menacent de rétablir fin septembre des sanctions contre l’Iran, suspendues depuis 2015 par un accord international sur le nucléaire conclu alors avec Téhéran. Une clause de cet accord, enclenchée fin août, permet le rétablissement de ces sanctions si une partie estime que l’Iran ne respecte pas ses engagements. L’accord de 2015, signé par l’E3, les Etats-Unis, la Chine, la Russie et l’Iran prévoyait d’importantes restrictions au programme nucléaire de Téhéran en échange de la levée progressive des sanctions. En 2018, sous le premier mandat du président Donald Trump, les Etats-Unis avaient décidé de s’en retirer et avaient rétabli leurs propres sanctions. Téhéran s'était ensuite affranchie de certains engagements, en accélérant l’enrichissement d’uranium. L’Iran a enrichi de l’uranium au niveau élevé de 60%, selon l’AIEA, niveau proche du seuil de 90% requis pour la fabrication d’une bombe atomique. © Agence France-Presse -
La bourse de New York termine sur des records dans l'attente des taux de la Fed
Washington - La Bourse de New York a terminé à de nouveaux sommets mardi, abordant avec optimisme la publication de plusieurs indicateurs d’inflation aux Etats-Unis susceptibles de donner de nouveaux indices sur la trajectoire monétaire privilégiée par la Réserve fédérale (Fed). Le Dow Jones a avancé de 0,43%, à 45.711,34 points, l’indice Nasdaq a pris 0,37% à 21.879,49 points et l’indice élargi S&P 500 a gagné 0,27% à 6,512,61 points. «Le groupe des mégacapitalisations a joué un rôle moteur en contribuant à soutenir les principaux indices», souligne auprès de l’AFP Patrick O’Hare, de Briefing.com. Nvidia a ainsi gagné 1,46%, Alphabet (Google) 2,39% et Amazon a avancé de 1,02%. Globalement, les investisseurs sont «dans l’expectative des données sur l’inflation, avec l’indice des prix à la production (PPI) qui sera publié mercredi, puis jeudi avec l’indice des prix à la consommation (CPI)», relève Patrick O’Hare. «Les acteurs du marché s’attendent non seulement à ce que la Fed abaisse ses taux en septembre, mais aussi en octobre et en décembre», note l’analyste. Selon l’analyste, les données sur l’inflation donneront par conséquent «une base pour réévaluer la probabilité de ces baisses de taux». La banque centrale des Etats-Unis est investie d’un double mandat pour le pays, consistant à la fois à surveiller le marché de l’emploi et à maintenir l’inflation proche de 2% sur le long terme. Toutefois, prévient M. O’Hare, «il semble que les marchés financiers se concentrent davantage sur l’affaiblissement du marché du travail que sur les données d’inflation pour le moment». Mardi, ils ont gardé un oeil sur la forte révision à la baisse des chiffres de l’emploi américain entre avril 2024 et mars 2025, sans pour autant y réagir négativement. Selon le Bureau des statistiques du travail (BLS), les entreprises américaines ont au final créé 911.000 emplois de moins sur l’ensemble de l’année fiscale 2024-2025, soit quasiment deux fois moins que ce qui avait été rapporté initialement. «Pour ce marché, les mauvaises nouvelles économiques sont synonymes de bonnes nouvelles en matière de baisse des taux», résume Patrick O’Hare. Dans ce contexte, sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d’Etat américains à échéance 10 ans se tendait par rapport à la clôture lundi, à 4,08% contre 4,04%. Côté entreprises, Apple (-1,48% à 234,35 dollars) a souffert de la présentation de sa nouvelle gamme d’iPhone 17. L’entreprise a présenté un modèle «Air» ultrafin, a promis des progrès sur l’autonomie et les objectifs photographiques, mais n’a pas annoncé d’avancées majeures pour rattraper son retard dans l’intelligence artificielle (IA). La firme de Cupertino (Californie) a aussi annoncé que les prix des nouveaux iPhone devraient augmenter aux Etats-Unis en raison des droits de douane imposés par le président Donald Trump, qui alourdissent les coûts de production en Chine, toujours le principal centre de fabrication de la marque à la pomme. La start-up américaine spécialisée dans l’informatique à distance («cloud computing») CoreWeave a bondi de 7,13% à 100,22 dollars après avoir annoncé le lancement d’un fonds de capital-risque dédié aux investissements dans l’IA. Le spécialiste néerlandais des infrastructures et services IA Nebius (+49,42% à 95,72 dollars) s’est envolé à l’annonce d’un partenariat avec Microsoft. Nebius dédira une partie des ressources de son nouveau data center au géant américain de l’informatique. Nasdaq © Agence France-Presse