
L’inflation persistante réveille les marchés de taux en zone euro

L’inflation continue d’envoyer des signaux contradictoires. Si la hausse des prix a continué de faiblir en mars, en Espagne comme en Allemagne, c’est principalement en raison d’un effet de base très favorable lié à la baisse des prix de l’énergie. Mais l’inflation sous-jacente reste soutenue, provoquant un réajustement sur les marchés de taux et des anticipations pour la Banque centrale européenne (BCE).
En Espagne, l’inflation totale a chuté de 6% en février à 3,3% ce mois-ci (+3,1% contre +6% en données harmonisées zone euro) à un plus bas depuis août 2021, selon les chiffres préliminaires publiés jeudi par l’institut national de statistique INE. Cette baisse s’explique par le net repli des prix du gaz et de l’électricité en mars alors qu’ils avaient bondi un an plus tôt au début de la guerre en Ukraine. Mais si l’indice des prix à la consommation core (hors prix de l’énergie et de l’alimentation) a reculé pour la première fois depuis près de deux ans, il reste élevé à 7,5% contre 7,6% un mois plus tôt. Les pressions inflationnistes restent élevées, notamment dans le secteur des services.
Ces pressions inflationnistes sont également visibles dans les données publiées jeudi par Destatis, l’institut allemand de la statistique.
Comme en Espagne, l’inflation totale a reculé plus que prévu à 7,4% en mars contre 8,7% le mois dernier (+7,8% contre 9,3% en données harmonisées). «Est-ce que le processus de désinflation a commencé ? Nous ne le croyons pas», affirme Carsten Brzeski, chef économiste chez ING. Destatis ne publie pas de données sous-jacentes lors de cette première estimation mais les chiffres des régions le confirment. Par ailleurs, au niveau national, les prix de l’alimentation continuent de progresser (+22,3% contre 21,8%) et hormis la baisse des prix de l’énergie, les autres composantes se stabilisent à un niveau élevé. L’économiste d’ING ajoute que la variation mensuelle de l’inflation globale est supérieure aux moyennes historiques avec une hausse de 0,8% par rapport à février (+1,1% en données harmonisées).
Les données totales sont trompeuses et la BCE devrait se pencher sur l’inflation hors énergie mais intégrant l’alimentation pour laquelle la sensibilité de la demande à l’évolution des prix est plus faible pour mieux évaluer la direction des prix.
Hausse des taux
«La forte baisse de l’inflation globale confortera tous ceux qui ont toujours soutenu que la poussée de l’inflation dans l’ensemble de la zone euro était principalement liée à un long choc des prix de l'énergie mais transitoire», note Carsten Brezski. Pour ces derniers, la baisse actuelle de l’inflation globale serait le début d’une tendance désinflationniste plus longue. «Bien que nous ayons sympathisé avec ce point de vue il y a un ou deux ans, l’inflation est, entre-temps, également devenue un problème du côté de la demande, qui s’est propagée à l’ensemble de l'économie. L'élargissement des marges bénéficiaires et la hausse des salaires alimentent également les pressions inflationnistes sous-jacentes, non seulement en Allemagne mais dans l’ensemble de la zone euro.»
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Alors que le marché a fait un pas de côté sur les banques, ces chiffres ont entraîné un ajustement des anticipations de hausse des taux de la BCE et des rendements sur les marchés de taux jeudi. Sur le marché monétaire, les investisseurs anticipent désormais deux hausses de taux de 25 points de base (pb) d’ici la fin de l’année, à 3,5%.
En pleine panique sur un risque de contagion de la crise bancaire, le marché avait estimé que la BCE laisserait ses taux inchangés cette année au niveau actuel de 3%. Sur les marchés de taux, la partie courte de la courbe s’est de nouveau pentifiée, le rendement à 2 ans des emprunts d’Etat allemands (Schatz) progressant de 11 pb, à 2,74%, tandis que celui à 10 ans (Bund) progressait de 4 pb, à 2,36%. Le taux 2 ans a regagné 50 pb en une semaine et a refait la moitié du chemin perdu dans le sillage des inquiétudes sur le secteur bancaire.
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