Les collectivités locales font face à la hausse des taux

Le relèvement des taux a affecté leur recours à l’emprunt, notamment sur les marchés obligataires.
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Le recours à l'emprunt des collectivités a reculé l'an dernier, une première depuis 2018  - 

Les 1.200 collectivités françaises représentant environ 42% de la dette des collectivités ont diminué leur recours à l’emprunt pour la première fois depuis 2018, avec 9,4 milliards d’euros en 2022 après 11,6 milliards en 2021 et 10,1 en 2020, selon l’Observatoire Finance Active présenté mercredi.

«La diminution des emprunts a concerné en premier les plus grandes collectivités, expliquent les auteurs Olivier Bertrand et Antoine Le Niniven. Elle peut s’expliquer par plusieurs facteurs : emprunts supérieurs à la moyenne les années précédentes, utilisation de leur trésorerie, abandon de projets trop coûteux, contraintes en face d’une offre à taux variables… Mais on peut globalement lier tout ça à la hausse des taux.»

A l’inverse des années précédentes, ce renversement de tendance a porté le taux moyen de ces crédits à 2,07% en 2022, après 0,62% en 2021, 0,56% en 2020 et 0,71% en 2019, avec une maturité raccourcie de 20 à 18,2 ans, du fait d’un recours en financement obligataire accru et ciblé sur des maturités un peu plus courtes. Les consultants notent que les grandes collectivités n’ont pas non plus profité de taux plus avantageux que les plus petites dans les proportions habituelles du fait de calendriers d’emprunt qui ont impliqué des taux très disparates entre le début et la fin d’année.

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Sensibilité au taux d’usure

Les marges moyennes sont passées de 32 à 54 points de base (pb), «et la part des taux variables a nettement augmenté, de 17% à 27% en 2022 (en intégrant les Livrets A), car l’offre de taux fixes (73%) a été contrainte par le taux d’usure», poursuit Olivier Bertrand. Avant sa mensualisation depuis février et jusqu’à juillet, le taux de prêt bancaire maximum pour un trimestre donné correspondait au taux moyen du trimestre précédent rehaussé d’un tiers, avec donc un fort décalage vu le rythme rapide de hausses des taux directeurs depuis juillet 2022.

Du côté des prêteurs, les banques commerciales ont regagné des parts de marché pour la première fois depuis 2018 (de 47,8% à 56,5%), au détriment des émissions obligataires (de 37,3% à 33%), de l’Agence France Locale (5,4%) et des autres banques publiques (5,1%). «La baisse de l’obligataire s’explique par la typologie des émetteurs : ceux qui s’étaient déjà engagés dans ce type de financements dont les contraintes d’accès restent assez lourdes (notation, documentation, etc.) ont trouvé des solutions pour émettre moins en attendant une stabilisation des taux ; les autres ne s’y sont pas engagés malgré la contrainte du taux d’usure qui limitait l’offre de prêts bancaires, complètent les consultants. Celle-ci les a plutôt amenés à accepter davantage de taux variables.»

Ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose dans une logique de diversification des financements à l’approche de la fin des hausses de taux. «Sachant qu’une réduction des liquidités de banque centrale pourrait aussi conduire à une hausse des marges de prêt cette année», ajoute Antoine Le Niniven, ne notant pas de désendettement massif des collectivités étudiées (102 milliards d’encours). Dans un récent rapport, l’agence S&P Global Ratings évoquait une diminution de l’encours total pour les collectivités françaises - avec la dette à court terme moins souscrite l’an dernier - de 3,6% en 2022, et anticipait une poursuite de la tendance via la baisse de la dette à long terme (-0,3% à 157,2 milliards fin 2022) dans les années à venir.

La percée du Crédit Mutuel dans le financement

Dans le détail, l’ensemble La Banque Postale-Sfil perd un peu de parts de marché cette année (de 34% à 31% en 2022, 20% sur le stock), moins que le groupe BPCE (de 32% à 22%, 16% sur le stock) et la Société Générale (de 7,5% à 5,3%, 6% sur le stock), au profit du Crédit Agricole (de 12,5% à 16,4%, 9% sur le stock), et surtout du groupe Crédit Mutuel et Arkea (de 10,1% à 22,8%, 4% sur le stock).

Le stock de dette a moins souffert de la hausse des taux que les flux, avec un taux moyen de 2,01% fin 2022 au lieu de 1,72% fin 2021, du fait d’un moindre effet relatif des taux variables, qui passent pourtant de 0,70% à 2,37% en moyenne, mais pour 23% de l’encours total en 2022 (au lieu de 24% en 2021). Le stock évolue également assez peu en termes de maturité moyenne (14,1 ans), de répartition taux fixe-taux variable (76%-23%), d’emprunts bancaires-obligataires (65%-17%), et de simplicité de la dette (98,6% de notations 1A).

Par ailleurs, les 310 établissements de santé suivis par Finance Active ont aussi diminué leurs emprunts, de 1,83 à 1,57 milliard (sur 19,3 ans en moyenne), avec un taux moyen remonté de 0,81% à 2,12% en 2022 à cause de la hausse des taux variables (23%), pour un encours total de 20 milliards et un coût total moyen à 2,59% désormais.

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