L’économie italienne aborde 2023 sur de meilleures bases

La révision technique sur les déficits budgétaires 2020-2021-2022 n’a pas vraiment d’effet sur les finances publiques.
Rome Italie place Navone
L'effet du resserrement monétaire sur la consommation sera moindre en Italie qu’ailleurs car les ménages y ont plus d’épargne que de dettes.  -  © UE CE Frederic Stevens

Jusqu’ici tout va bien entre Rome et les investisseurs. Certes les taux des emprunts d’Etat (BTP) italiens à 10 ans ont bondi, de 4,27% à 4,64% entre le 20 février et le 2 mars (4,50% lundi). Mais l’écart avec le taux du Bund allemand a plutôt eu tendance à baisser, de 196 points de base (pb) le 22 février à 181 pb lundi 6 mars. Le recul de 5 pb après la parution du PIB du quatrième trimestre vendredi signale que les marchés valident les bonnes bases sur lesquelles l’économie transalpine a redémarré l’année.

L’Istat (Institut national de statistique) a confirmé une légère contraction au dernier trimestre 2022, de 0,1% par rapport aux trois mois précédents, après +0,4% au troisième trimestre. Pour 2022, le PIB a progressé de 3,7% à 1.909,1 milliards d’euros. Il s’agissait de la première diminution de la croissance trimestrielle depuis le quatrième trimestre 2020, à cause d’une baisse de la consommation des ménages (-1,6%) non compensée par la hausse des dépenses publiques (+0,5), de l’investissement (+2%) ou des exportations (+2,6%).

Mais tout était prévu, et «la variation des stocks (-1,1% de contribution trimestrielle) et celle de la consommation privée (contribution de -0,9%) ont agi avec un effet retard», note Paolo Pizzoli, économiste senior chez ING. «Nous nous attendions à ce que l’effet combiné des augmentations de l’inflation et de la faible croissance des salaires finisse par absorber le revenu disponible réel, entraînant une moindre consommation, malgré les mesures de compensation mises en place par le gouvernement», ajoute-t-il. L'économiste rappelle que le taux d’épargne des ménages avait déjà chuté à 7,1% au troisième trimestre, au-dessous de sa moyenne de moyen terme, et que ces derniers ont moins sollicité leur réserve d’épargne au quatrième trimestre, préférant ajuster leur consommation.

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Effet stock

«L’énorme frein lié à la variation des stocks a été surprenant. Les perspectives pour la demande restent bonnes, et se sont en effet améliorées ces deux derniers mois en raison du contre-choc énergétique et de la réouverture de la Chine», commente l’économiste Lorenzo Codogno (LC-Macro Advisors), notant des messages rassurants du côté de la demande et une certaine volatilité des données. De fait, si la confiance des entreprises n’est que légèrement remontée la semaine dernière (102,8), celle des ménages a retrouvé un plus haut depuis début 2022 (104). Et les indices d’activité aussi : 52 en février pour le PMI manufacturier après 50,4 en janvier ; 51,6 pour le PMI des services après 51,2 en janvier ; et 52,2 pour le PMI composite après 51,2 en janvier.

«L’effet négatif des stocks a été énorme et surprenant : étant donné que les stocks sont estimés comme résiduels, ils pourraient être réalloués dans le prochain rapport, par exemple en importations, poursuit Lorenzo Codogno. Néanmoins, les contributions des stocks précédents à la croissance n’ont pas été spectaculaires (0,0 point de pourcentage au T3-2022, -0,3 au T2-2022, -0,4 au T1-2022) : le cycle des stocks laisse présager un important restockage en 2023, ce qui soutient ma vision d’un rebond d’activité en ce premier trimestre, probablement plus significatif que prévu, avant une récupération solide et durable sur la seconde moitié de l’année.»

Bien qu’un peu inquiet pour l’industrie qui, hors énergie et construction, a beaucoup souffert, l'économiste anticipe quand même 1,1% de croissance pour le PIB de l’Italie cette année, bien au-dessus du consensus (+0,5%), des prévisions du gouvernement et du FMI (+0,6%), ou de la Commission européenne (+0,8%).

«Nous reconnaissons que, au deuxième trimestre de cette année, l’industrie pourrait à nouveau redevenir un moteur de croissance du côté approvisionnement, mais nous préférons rester prudents sur la portée des développements de la croissance, car nous pensons que le resserrement de la politique monétaire n’a pas encore affiché son plein effet sur la demande intérieure», estime pour sa part Paolo Pizzoli, qui prévoit désormais une croissance de 0,7% en moyenne en 2023.

Inflation et dette publique

Le resserrement monétaire finira par jouer sur la consommation, mais moins en Italie qu’ailleurs car les ménages y ont plus d’épargne que de dettes. En revanche, il pourrait finir par peser sur les finances publiques, alors que le ratio de dette sur PIB frôle 145%. «Le déflateur du PIB s’est retrouvé à 5,6% en glissement annuel au T4-2022, considérablement au-dessous du déflateur de la consommation des ménages (11% en glissement annuel). Pour la dynamique de la dette publique, c’est une terrible nouvelle, car le numérateur augmente donc plus que le dénominateur, même s’il est plus facile pour le gouvernement de réduire les dépenses publiques réelles dans un environnement inflationniste», rappelle Lorenzo Codogno.

Le Trésor italien a publié le 1er mars un déficit budgétaire de 153,5 milliards d’euros, soit 8% du PIB 2022, bien au-dessus des 5% attendus. La raison tient au récent changement de traitement «maastrichtien» des crédits d’impôt comme le «SuperBonus» italien pour la rénovation énergétique de l’habitat. Ce changement de méthode a également rehaussé les déficits 2020 (9,7%) et 2021 (9%). L’obligation de comptabiliser la «dépense» induite dès la première année aura moins d’incidence voire des effets positifs sur le déficit de 2023 (initialement ciblé à 4,5%) et sur ceux des années suivantes.

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