
Le Conseil de stabilité formule ses propositions sur les fonds monétaires
La crise de mars 2020 avait mis en évidence des fragilités structurelles des fonds monétaires (MMF), pourtant censés offrir un maximum de liquidité à leurs investisseurs. Comme prévu, le Conseil de stabilité financière (FSB) a donc publié, mercredi pour consultation jusqu’au 16 août, son étude et ses propositions devant permettre de réviser les régulations sur les MMF, notamment aux Etats-Unis et en Europe.
Les vulnérabilités s’étaient particulièrement manifestées outre-Atlantique à cause de rachats préventifs dans les «MMF prime» (investis en créances commerciales, CP), au profit des «govies MMF» (investis en dettes publiques) : les investisseurs étaient sortis par anticipation bien avant le premier seuil de liquidité fixé par la réforme de 2016 (coussin de liquidités hebdomadaires à 30% des encours) afin d’éviter les premières restrictions de sortie possibles (fees/gates), avec un effet inverse de celui recherché. D’autant que certains «MMF prime» avaient cherché à céder d’abord des CP de maturité plus longue plutôt que d’entamer leur ratio de liquidité en vendant les plus courts et plus liquides pour faire face aux rachats.
Pour y remédier, et limiter les interventions des banques centrales pour sauver les fonds et marchés monétaires, le FSB propose donc diverses solutions, présentées avec leurs possibles effets collatéraux (sans doute pas tous). La première viserait à imposer aux investisseurs sortants le coût lié à leurs rachats via des mécanismes de «swing pricing», que les experts estiment pourtant quasi impossibles à mettre en œuvre pour des fonds à liquidité intraday. Les deuxième et troisième solutions permettraient d’absorber les pertes, soit avec une limitation des parts du fonds «rachetables» (Minimum balance at risk, MBR, comme un système de tranches seniors et subordonnées), soit avec un coussin de capital préétabli, là encore avec le risque de complexifier le modèle des fonds «prime» déjà peu rentables.
Dissocier les seuils de liquidité réglementaires et les restrictions de sorties
Deux autres options chercheraient à réduire les effets de seuil. D’abord en supprimant le lien entre les seuils de liquidité réglementaires et les restrictions de sorties (fees/gates) : cette solution était apparue comme la plus pertinente des 10 formulées par la SEC au printemps, à condition d’être accompagnée d’une possible diminution du coussin contracyclique de liquidités hebdomadaires (par exemple à 25%) afin de permettre de le reconstituer pendant un temps. Une autre idée reviendrait à supprimer pendant certaines périodes les valeurs d’actifs nettes constantes (CNAV) dans les juridictions où c’est possible afin de mieux refléter les risques, mais le calibrage de la «progressivité» induite semble complexe et n’empêcherait pas des arbitrages, par exemple au bénéfice de dépôts bancaires.
Enfin, les sixième et septième solutions proposées viseraient à fixer des limites sur les actifs éligibles ou des exigences de liquidité supplémentaires afin de réduire la transformation de la liquidité. La restriction sur les actifs éligibles obligerait les fonds monétaires à se concentrer sur des instruments plus court et/ou plus liquides pour atténuer l’impact des rachats importants et les tensions sur les sous-jacents en période de stress, mais réduirait potentiellement la capacité des émetteurs de CP à trouver des investisseurs, à moins d’émettre davantage sur des échéances plus courtes, ce qui pourrait alors augmenter leur risque de refinancement donc leur transférer certains risques de liquidité jusqu’alors portés par les MMF. Avec pour effet la croissance de substituts (fonds obligataires à court terme ou prêts bancaires) au détriment des MMF «prime» et un possible renchérissement des coûts de financement… Des exigences de liquidités supplémentaires, qui pourraient également réduire les effets de seuil subis en mars 2020, auraient des effets similaires.
Toutes ces solutions, et leurs variantes et combinaisons possibles, seront étudiées dans les prochains mois en fonction des priorités politiques propres à chaque juridiction, des considérations transfrontalières, notamment pour empêcher l’arbitrage réglementaire. Mais elles ne semblent pas encore résoudre le problème structurel de «business model» difficile pour les «prime MMF» dans un environnement de taux durablement bas. «Les politiques visant à renforcer la résilience des MMF pourraient être accompagnées de réformes supplémentaires dans la gestion des risques par les gestionnaires de fonds et leur suivi par les autorités ainsi que dans le fonctionnement des marchés de financement à court terme sous-jacents», note d’ailleurs le FSB.
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