Le Conseil de l’Union cherche un consensus sur la régulation des marchés financiers

Les points à départager dans la révision de la directive MIF 2 concernent la transparence sur les actions.
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La bataille se poursuit autour des données de marché.  - 

Le groupe de travail du Conseil de l’Union européenne (UE) dédié à la révision de la réglementation sur les marchés d’instruments financiers MIF 2 (MiFIR/MiFID) tiendra ce vendredi sa première réunion en vue de préparer le trilogue final avec la Commission et le Parlement européens qui débutera le 18 avril. Ce dernier a arrêté sa proposition le 1er mars, trois mois après celle du Conseil qui avait pris ses distances avec celle de la Commission. Et il sera compliqué de rapprocher les positions à tous les niveaux, au moins sur plusieurs points.

Consolidated tape «actions»

L’objectif de la révision est d’apporter plus de transparence sur les marchés en créant des bases de données consolidées (consolidated tape, CT) pour les actions, les obligations et les dérivés. Alors que les spécialistes s’accordent à dire que la priorité est d’améliorer la transparence ou la liquidité sur les obligations, le point de litige porte, depuis trois ans dans le cadre d’une «bataille» entre Bourses et banques intermédiaires autour du coût des données, sur l’élargissement de la CT post-négociation sur les actions initialement suggérée par la Commission. Le Conseil propose une base sur les données post-trade en «temps quasi-réel» avec, en cas d’exécution, des données sur le premier niveau pre-trade, un compromis «raisonnable» pour les Bourses. Le Parlement propose une CT sur les données post-trade en «temps quasi-réel» avec, en parallèle, une vision permanente des cinq premiers niveaux de données pre-trade.

«Cela nous paraît répondre au besoin de manière disproportionnée, dans le cadre d’une logique d’utilisation à des fins de trading au détriment des Bourses transparentes (marchés réglementés ou plateformes de négociation multilatérales, MTF), estime Nicolas Rivard, directeur des données chez Euronext. Le risque est alors, comme aux Etats-Unis, de voir davantage d’opérateurs utiliser cette base pre-trade pour proposer un ‘prix de référence’ européen (EBBO) dans les systèmes non transparents (‘dark-pools’ et internalisateurs systématiques, SI).» Pour faire face à une probable perte de revenus, les marchés réglementés réfléchissent à s’associer pour tenter de devenir l’opérateur de la «consolidated tape». «La CT n’a pas vocation à remplacer les flux de données directs achetés auprès des Bourses pour alimenter les outils de trading, estime Antoine Pertriaux, associé du cabinet Adamantia. Il ressort de notre étude qu’une base agrégeant des données pre-trade et post-trade en ‘temps quasi-réel’ - 300 millisecondes par exemple - permettrait d’adresser un nombre important de cas d’usage autour de l’analyse de la liquidité, de la gestion des risques, de la valorisation, des fonctions de contrôle. Elle présenterait un réel intérêt pour l’ensemble des acteurs, petits et grands», ajoute-t-il au nom des institutions qui se sont associées à l’étude pour analyser les conditions d’une viabilité de la base actions...

PFOF

Le deuxième point de tensions, surtout entre Etats au Conseil de l’UE, risque de porter sur le «paiement pour flux d’ordres» (PFOF) sur les actions. Comme au Royaume-Uni, le Parlement propose une interdiction totale de cette pratique critiquée au nom des conflits d’intérêts possibles puisqu’elle permet à une plateforme d’être rémunérée par les paiements d’un autre intermédiaire - et non par ses clients investisseurs - afin de lui apporter des liquidités. L’Allemagne veut son maintien sans conditions et sera très combative sur ce dossier parce qu’elle est le principal pays concerné ; la France soutient la proposition du Conseil d’une interdiction avec option pour les Etats qui le souhaitent de continuer à l’autoriser uniquement chez eux.

Les Bourses ne sont pas concernées pour les commissions sur la transmission d’ordres de professionnels prévues dans leur structure tarifaire. Les banques ont tendance à soutenir cette pratique, bien qu’elle profite davantage aux apporteurs de liquidité non bancaires, parce que s’y opposer ouvrirait une brèche dans l’interdiction d’autres rétrocommissions, notamment sur la distribution de produits financiers. Certains ont relevé une incohérence dans le choix du Parlement de pénaliser les intermédiaires via l’interdiction du PFOF actions tout en les contentant pour la «consolidated tape» pré-négociation dont la justification d’une vue sur le prix EBBO pouvait être liée au maintien de cette pratique…

Internalisateurs systématiques (SI)

Le troisième problème est ressorti avec la proposition du Conseil d’élargir le champ d’action des internalisateurs systématiques (SI) en les autorisant à négocier les actions en milieu de la fourchette (mid-price/mid-point) des prix importés en provenance d’une plateforme de référence, comme c’est possible pour les «dark-pools», ces plateformes alternatives autorisées à ne pas être transparentes pour traiter de grands ordres (LIS) ou des ordres sensibles traités à un prix de référence (reference price, RPW). Le Parlement a confirmé cette proposition, en la conditionnant à de nouvelles obligations de reporting sur la qualité du service et à un calibrage précis des autorisations par l’Autorité européenne des marchés financiers (Esma).
La Commission proposait, elle, d’interdire le trading au «mid-point» - impossible dans les carnets d’ordres transparents des marchés réglementés et MTF - pour les ordres de taille inférieure à deux fois la taille de marché standard (SMS). «Cette approche poursuivait plus logiquement la recherche de ne pas accroître davantage la part des marchés non transparents au détriment de la formation des prix», conclut Nicolas Rivard.

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