
La Fed attend encore son prochain capitaine

Il n’y a pas qu’en zone euro, où la Bundesbank va devoir se trouver un nouveau président après le départ de Jens Weidmann, que le casting des banques centrales fait couler de l’encre. Aux Etats-Unis, Jerome Powell est sous le feu des critiques. L’opération a été révélée mardi soir par le journal progressiste The American Prospect : le président de la Réserve fédérale aurait cédé en Bourse entre 1 et 5 millions de dollars le 1er octobre 2020, avec «pour but de couvrir des dépenses familiales», a indiqué à l’AFP un porte-parole de la banque centrale.
Cette mise en cause tombe mal : le mandat de Jerome Powell, qui prend fin le 31 janvier, n’a toujours pas été renouvelé alors que sa reconduction paraissait une formalité début septembre. Elle survient trois semaines après les démissions annoncées des présidents des Fed régionales de Dallas (Robert Kaplan) et de Boston (Eric Rosengren). Les deux dirigeants ont en effet été des investisseurs très actifs en 2020, intervenant directement à l’achat et à la vente en profitant potentiellement d’informations privilégiées en cette année de forte volatilité sur les marchés financiers pour cause de Covid.
Pas de délit d’initiés
Bien qu’attaqué également par Fox Business Network, le cas Powell ne tomberait pas sous le coup du délit d’initiés ou des transactions interdites par les autorités. Le président de la Fed, dont le patrimoine est évalué à 60 millions de dollars depuis ses carrières d’avocat, banquier d’affaires et associé du fonds de private equity Carlyle, n’aurait pas fait de véritables «va-et-vient» en Bourse. Il aurait seulement liquidé une participation dans un fonds d’actions passif de Vanguard qui reproduit tout le marché, et aurait même, via cette transaction réalisée avant la fin du rebond boursier, perdu 35% des gains à venir sur les douze mois suivants, alors que, après le changement de stratégie monétaire d’août 2020, il savait que l’institution soutiendrait encore les marchés pendant longtemps.
Les prévisionnistes l’ont compris ainsi. Les probabilités calculées au travers des sites de paris comme Predict It sur le prochain choix du président Joe Biden pour la Fed sont passées d’environ 75% en faveur de Jerome Powell depuis quinze jours à 65%, avant de remonter à 71%. Principale challenger, la gouverneure Lael Brainard, encore plus accommodante en termes de politique monétaire, a vu ses chances remonter à près de 24%. Le troisième candidat présumé à la succession, le président de la Fed d’Atlanta, Raphael Bostic, pointe loin derrière.
«Cette affaire ne semble pas engager de conflits d’intérêts. Elle tombe mal dans un environnement où tout le monde reconnaît que la Fed soutient les marchés d’actions, mais ne devrait pas changer grand-chose : d’une part parce que Jerome Powell s’est montré ferme par rapport à ses collègues ayant opéré des réallocations de portefeuille, d’autre part parce que ce président apprécié des républicains dont il est issu a su se montrer à la fois accommodant et pragmatique depuis le début de la crise», rappelle Thomas Costerg, économiste US chez Pictet WM.
Plus d'articles du même thème
-
L’instabilité gouvernementale s’accroît au Japon
Moins d’un an après son arrivée au pouvoir, le Premier ministre Shigeru Ishiba a annoncé sa démission après avoir subi plusieurs revers électoraux. -
La perception du risque monte autour de la France
Le gouvernement de François Bayrou devrait tomber lundi après le vote de confiance à l’Assemblée nationale. La nouvelle incertitude politique et budgétaire qui en résultera inquiète un peu plus les marchés, mais pas au point d'imaginer des risques extrêmes. -
Les gestionnaires changent leurs vues sur les taux directeurs
Les prévisionnistes sondés par L’Agefi ont davantage touché à leurs prévisions de taux début septembre que début juillet. Ils repoussent la dernière baisse de la Banque centrale européenne à la fin de l’année plutôt qu’en septembre, et voient la Fed relancer prochainement son assouplissement, en parallèle d’une repentification de la courbe.
ETF à la Une

Xtrackers lance un ETF sur la défense
- A la Société Générale, les syndicats sont prêts à durcir le ton sur le télétravail
- Revolut s’offre les services de l’ancien patron de la Société Générale
- Boeing essaie de contourner la grève en cours dans ses activités de défense
- Les dettes bancaires subordonnées commencent à rendre certains investisseurs nerveux
- Mistral AI serait valorisé 12 milliards d’euros par une nouvelle levée de fonds
Contenu de nos partenaires
-
Infrapolitique
« La crise du politique » – par Raphaël LLorca
La rupture entre les Français et la classe politique est tellement documentée et a fait l’objet de tellement de commentaires qu’on n’y prend plus vraiment garde, alors que la rupture est historique, souligne l'essayiste Raphaël LLorca dans sa chronique pour l'Opinion -
Incitation
Allemagne : les avantages fiscaux pour maintenir les retraités en activité sous le feu des critiques
Le chancelier Friedrich Merz veut permettre aux retraités de gagner jusqu'à 2 000 euros par mois totalement défiscalisés dès 2026 -
Népal: au moins 16 morts à Katmandou pendant une manifestation contre la censure des réseaux sociaux et la corruption
Katmandou - Au moins 16 personnes ont été tuées et une centaine blessées lundi dans la capitale népalaise Katmandou, lorsque la police a dispersé une manifestation contre le blocage des réseaux sociaux et la corruption du gouvernement. «Seize personnes sont malheureusement décédées selon un décompte auprès des hôpitaux. Une centaine d’autres ont été hospitalisées, dont des policiers», a annoncé à l’AFP un porte-parole de la de la police, Shekhar Khanal. Des affrontements étaient toujours en cours en fin d’après-midi dans les rues de Katmandou, où la police tentait de disperser le dernier carré des protestataires, selon des journalistes de l’AFP. Le gouvernement du Premier ministre KP Sharma Oli devait se réunir en urgence en soirée pour faire le point de la situation. Les forces de l’ordre sont intervenues lorsqu’une foule de plusieurs milliers de personnes s’est rapprochée du Parlement, dont elles avait bloqué l’accès, notamment avec des barbelés. Certains manifestants ont alors tenté de franchir le cordon de sécurité mis en place par la police. «Nous avons utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau quand les manifestants ont pénétré dans la zone interdite», a justifié auprès de l’AFP le porte-parole de la police. Selon des témoignages anonymes publiés par les médias locaux, la police a tiré à balles réelles sur la foule pour la contenir. L’AFP n’a pas été en mesure de confirmer immédiatement ces informations. Au moins trois des victimes ont succombé à leurs blessures à l’Hôpital civil de Katmanadou tout proche, qui a accueilli plus de 150 blessés, selon une porte-parole de l'établissement, Ranjana Nepal. «Je n’ai jamais vu un tel chaos à l’hôpital», a-t-elle dit à l’AFP. «Les gaz lacrymogènes se sont propagés dans les locaux et ont rendu difficile le travail des médecins». «Pratiques autoritaires» Le ministère népalais de la Communication et des Technologies de l’information a annoncé jeudi avoir ordonné le blocage de 26 plateformes, dont Facebook, Youtube, X et Linkedin, qui ne se sont pas enregistrées auprès de lui dans les délais. En application d’un arrêt rendu en 2023 par la Cour suprême, le ministère exige qu’elles nomment un représentant local et une personne chargée de la régulation de leurs contenus. Cette décision, qui a continué lundi à perturber de nombreuses activités, a convaincu de nombreux usagers en colère de descendre dans la rue. Les manifestants se sont rassemblés dans la matinée en brandissant des drapeaux nationaux et en chantant l’hymne national, avant de lancer des slogans hostiles au gouvernement. «Nous sommes là pour dénoncer le blocage des réseaux sociaux mais ce n’est notre seule motivation», a déclaré à l’AFP un étudiant, Yujan Rajbhandari, 24 ans, «nous dénonçons aussi la corruption institutionnalisée au Népal». «Cette décision traduit les pratiques autoritaires du gouvernement et nous voulons que ça change», a renchéri un autre, Ikshama Tumrok, 20 ans. Depuis l’entrée en vigueur du blocage, les plateformes encore en service, comme Tik Tok, sont inondées de vidéos mettant en cause la vie luxueuse des enfants de responsables politiques. «Il y a eu des mobilisations contre la corruption partout dans le monde, ils (nos dirigeants, ndlr) redoutent qu’il en soit de même ici», a commenté un autre protestataire, Bhumika Bharati. Dans une déclaration publiée dimanche, le gouvernement a démenti vouloir grignoter les libertés de pensée et d’expression et affirmé que sa décision visait à créer «un environnement destiné à leur protection et à leur libre exercice». Il a répété que le fonctionnement des plateformes visées serait rétabli sitôt le dépôt d’une demande d’enregistrement de leur part. Le blocage décrété jeudi n’est pas inédit. En juillet dernier, le gouvernement avait déjà suspendu la messagerie Telegram en raison, selon lui, d’une hausse des fraudes en ligne. Paavan MATHEMA © Agence France-Presse