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La correction de l’immobilier résidentiel européen n’est pas finie

Jusqu'à présent, l’immobilier résidentiel européen a bien mieux résisté à la hausse des taux d’intérêt que ce que l’on pouvait prévoir. Si la réalité du marché est à des années-lumière de l’effondrement des prix que certains avaient prédit, elle est également assez loin de la correction soutenue et progressive que nous envisagions il y a juste un an, lorsque nous prévoyions des baisses de prix dans le résidentiel de l’ordre de 10 à 15% à horizon mi-2024.
Pour l’heure, les prix n’ont baissé en moyenne que de 2% dans la zone euro depuis que la BCE a commencé à relever ses taux, et de 1% en France métropolitaine. Les plus fortes corrections en cours, en Suède, au Danemark et en Allemagne, ont vu les prix chuter de 10% ou moins par rapport à leur pic. Et les prix continuent d’augmenter dans de nombreux pays européens, tels que l’Italie, l’Espagne, l’Irlande, le Portugal et la Belgique.
Quels facteurs, que nous avions omis ou sous-estimés il y a un an, expliquent la résilience actuelle des marchés immobiliers européens ? Cette résilience signifie-t-elle que la correction des prix est achevée, maintenant que la hausse des taux d’intérêt est terminée ?
L’immobilier européen a été soutenu par la demande
En réponse à la première question, il semble qu’un mix de facteurs de demande et d’offre soit à l’œuvre de cette résilience, les facteurs d’offre dominant. Tout d’abord, la demande s’est moins affaiblie que prévu. L’une des raisons est que le marché du travail européen a mieux résisté qu’attendu, l'économie européenne ayant encore créé des emplois nets aux deuxième et troisième trimestres 2023, tandis que la croissance des salaires a continué d’accélérer. Plusieurs gouvernements européens ont intensifié leur soutien financier aux ménages, les prestations sociales nettes contribuant à hauteur de 2 points de pourcentage à celle du revenu des ménages.
Dans certains cas, les prêteurs ont également eu recours à des mesures compensatoires (forebearance) pour amortir les chocs de taux d’intérêt pour les ménages. De plus, même si la demande de logements neufs est freinée par le resserrement des conditions financières, le niveau des commandes en attente de construction reste particulièrement élevé. Les entreprises européennes estiment qu’il leur reste encore près de neuf mois d’activité sur leurs carnets de commandes actuels, seize mois même en Italie à la suite du «super-bonus» gouvernemental.
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Ce sont néanmoins les facteurs d’offre qui expliquent le mieux la résilience de l’immobilier résidentiel européen. Dans la dernière enquête de la Commission européenne, 70% des facteurs limitant l’activité de construction dans l’UE se trouvent du côté de l’offre contre 30% du côté de la demande. Si les pénuries de matériaux et d'équipements se sont atténuées au cours des six derniers mois, les pénuries de main-d'œuvre restent importantes.
En outre, le prix des matières premières et composantes utilisées dans la construction, telles que ciment, briques ou fenêtres, n’a toujours pas quitté les sommets qui avaient été atteints l’année dernière. Par conséquent, les coûts de production dans la construction résidentielle sont toujours au plus haut.
La rigidité à la baisse des coûts de construction dans un contexte de forte hausse des taux d’intérêt amène un paysage nouveau pour l’immobilier résidentiel européen, celui d’un découplage sans précédent entre les prix du neuf et de l’ancien.
Tandis que les prix dans l’ancien ont reculé de 3% depuis un an, ceux des logements neufs ont augmenté de 4% à l’échelle de la zone euro. Jamais on n’avait observé un tel écart entre les deux segments du marché résidentiel. Et cet écart explique largement les hétérogénéités entre pays européens : ce sont dans les pays où les transactions dans le neuf ont été les plus importantes, et où le parc immobilier est le moins âgé, que les prix immobiliers se sont le mieux tenus au cours des six derniers mois (Portugal, Belgique, Irlande, Espagne et Italie).
La résilience plus forte qu’attendu de l’immobilier européen aux deuxième et troisième trimestres 2023 ne signifie pas que l’ajustement des prix est terminé. Au contraire, nous pensons que le bas du cycle des prix de l’immobilier est encore devant nous. Un élément est que nous ne pensons pas que les banques centrales commenceront à réduire leurs taux directeurs aussi rapidement que les marchés financiers l’anticipent. Un autre élément est que l’ajustement des taux hypothécaires au nouvel environnement de taux n’est pas achevé, de nombreux prêts à taux variables ou à taux courts ayant été contractés jute avant les premières hausses de taux banque centrale. L’emploi est en passe de se retourner et les salaires n’accélèrent plus.
Vu que la demande nouvelle a été asséchée par les hausses de taux, les tensions sur l’offre de construction devraient se résorber à mesure que les commandes en attente sont traitées, à moins bien sûr d’un nouveau choc sur le cours des matières premières. Finalement, il est probablement trop tôt encore pour affirmer que le point bas du cycle des prix immobiliers est atteint. Il reste prudent de regarder à quelle vitesse le marché du travail se retourne.
A lire aussi: Le marché immobilier résidentiel en zone euro à l'épreuve de la normalisation monétaire, BNP Paribas
Achevé de rédiger le 29 janvier 2024
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