
La Commission européenne remporte une demi-victoire contre la Belgique

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a penché jeudi du côté de la Commission européenne dans le dossier fiscal qui opposait cette dernière à la Belgique depuis 5 ans. La plus haute juridiction de l’UE a confirmé que les rescrits fiscaux (‘tax rulings’), accordés par ce pays à des entreprises belges intégrées à des groupes transnationaux, correspondaient bien à un régime d’aides d’Etat. En faisant valoir l’existence d’une réorganisation entraînant la relocalisation de l’entrepreneur central en Belgique, la création d’emplois ou des investissements, ces entreprises pouvaient depuis 2005 être exonérées de l’impôt sur les sociétés sur leurs bénéfices excédentaires, entendus comme des bénéfices supérieurs à ceux que «des entités autonomes comparables auraient réalisés dans des circonstances similaires».
En 2016, la Commission européenne a jugé que ce régime fiscal était illégal et ordonné la restitution des aides octroyées à plusieurs dizaines de bénéficiaires parmi lesquelles BASF, Soudal, AB-Inbev, Atlas Copco, Belgacom, BP ou Magnetrol. Cette dernière entreprise et le gouvernement belge ont introduit un recours devant le Tribunal de l’UE, ce qui a conduit cette juridiction à annuler en février 2019 la décision de la Commission, en estimant que celle-ci n’avait pu démontrer l’existence d’un régime d’aides d’Etat.
Des enquêtes séparées ouvertes par la Commission
L’exécutif européen a alors ouvert des enquêtes séparées sur les entreprises concernées, tout en se pourvoyant devant la CJUE en vue d’obtenir plus de clarté sur l’existence ou non d’un régime d’aides. En décembre dernier, l’avocate générale à la CJUE, Juliane Kokott, a considéré que la Commission européenne avait eu raison dès le départ et qu’une approche par échantillonnage suffisait pour démontrer une pratique administrative établie des autorités fiscales belges.
Dans son arrêt publié jeudi, la Cour a conclu que le Tribunal de l’UE avait commis «plusieurs erreurs de droit» dans ce dossier. Elle a rappelé que des aides peuvent être accordées individuellement à des entreprises sur le fondement d’une «disposition», terme pouvant s’appliquer à «une ligne systématique de conduite» de la part d’une Etat membre. Aucune mesure d’application supplémentaire n’est requise pour l’octroi de ces aides. Contrairement au jugement de l’instance inférieure, «l’identification d’une telle pratique systématique était susceptible de constituer un élément pertinent pour établir, le cas échéant, que les autorités fiscales ne disposaient en réalité d’aucun pouvoir d’appréciation», a relevé la Cour.
Un dénouement encore lointain
Enfin, ces aides individuellesdoivent être définies «de manière générale et abstraite». Etant donné que cette question est liée aux deux points précédents, les erreurs de droit du Tribunal sur les deux premières conditions «ont entaché son appréciation relative à la définition des bénéficiaires de l’exonération des bénéfices excédentaires», explique la Cour.
Mais l’institution n’a pas tranché l’ensemble du litige, en renvoyant l’affaire au Tribunal de l’UE pour qu’il se prononce sur d’autres aspects du dossier. «La CJUE a jugé en droit que les rescrits fiscaux pratiqués par la Belgique obéissaient à un régime d’aide d’Etat, mais elle ne s’est pas prononcée sur la compatibilité de ces aides avec les traités européens», commente pour L’Agefi Cyril Maucour, associé en fiscalité internationale au cabinet DS Avocats.
«Il reviendra donc au Tribunal de l’UE de statuer sur le fond du dossier, en déterminant notamment, dans le cas où elles sont jugées illégales, les modalités du remboursement de ces aides», ajoute l’avocat. En attendant le dénouement définitif de cette affaire, qui pourrait prendre encore plusieurs années, le gouvernement belge a dû geler les 900 millions d’euros d’aides récupérés auprès d’une quarantaine d’entreprises à la suite de la décision prise en 2016 par l’exécutif européen.
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