
La Chine cherche du soutien pour son économie

La trajectoire de croissance de la Chine est vue par de nombreux analystes comme l’un des principaux risques pour les marchés en 2022. «Les sujets d’incertitudes sont nombreux et la Chine en est un, relève Raphaël Thuin, directeur capital markets strategies chez Tikehau Capital. La transformation économique du pays va se poursuivre et il est difficile de dire dans quelle mesure la croissance va ralentir.» Et les chiffres du quatrième trimestre 2021, bien que supérieurs aux attentes, ne suffisent pas pour rassurer les opérateurs. D’autant que la banque centrale chinoise (PBoC) a dans le même temps abaissé son taux directeur plus tôt que prévu par le marché.
La croissance du produit intérieur brut (PIB) s’est établie à 4% au quatrième trimestre (+3,6% anticipé par le consensus des économistes), en rythme annualisé, et 8,1% sur l’ensemble de l’année 2021, alors que Pékin visait plus de 6%, ce qui implique un rebond au dernier trimestre (de 0,7% au troisième trimestre en rythme trimestriel à 1,6% au quatrième). «Cette reprise reflète une demande externe résiliente de même que l’assouplissement de certaines contraintes d’approvisionnement auto-infligées, à savoir les pénuries d’électricité et les difficultés de financement de l’immobilier», affirme Wei Yao, économiste chez Société Générale CIB (SG CIB).
PIB au ralenti
Toutefois, si la hausse du PIB a été plus importante que prévu au quatrième trimestre, il s’agit de son rythme le plus lent depuis un an et demi. Une partie de cette performance est due à la révision en hausse des prévisions des trimestres précédents qui se répercute sur la période octobre-décembre, notent les économistes de Deutsche Bank (DB). Surtout, les données d’activité sont mitigées en décembre. L’investissement dans l’immobilier chute de 13% sur un an tandis que la consommation est affectée par la multiplication des restrictions pour faire face à la propagation du nouveau variant Omicron. «La croissance des ventes de détail recule à 1,7% sur un an contre 3,9% en novembre ; les activités de services ont également ralenti», relève Yi Xiong, économiste chez DB.
Outre la faiblesse de la consommation, les économistes soulignent une nouvelle détérioration sur le marché du travail avec une légère hausse du taux de chômage (5,1%) et une baisse des revenus et des dépenses des ménages, tandis que l’immobilier continue de se dégrader.
Intervention surprise
Avec 4% au quatrième trimestre, une croissance de 5% est possible en 2022. «C’est très probablement le niveau minimum que Pékin aimerait fixer lors de l’Assemblée nationale populaire (NPC) en mars, estime Wei Yao. Cependant, c’est loin d'être certain. Compte tenu du coût croissant pour maîtriser la propagation du virus, nous maintenons notre prévision de 4,8 %. À en juger par la baisse du taux directeur de la PBoC quelques heures seulement avant la publication des données, même les décideurs politiques chinois ne semblent pas convaincus par cette bonne surprise.»
La Chine fait face à des vents contraires dus aux politiques de régulation, au déclin du secteur de l’immobilier et aux résurgences de l'épidémie de coronavirus et les opérateurs s’attendaient à ce que la banque centrale intervienne de nouveau mais pas si tôt. La PBoC a réduit le taux de sa facilité de crédit à moyen terme (MLF) à un an, pour la première fois depuis près de deux ans, de 10 points de base (pb) à 2,85%. L’inflation, moins marquée, et l’inquiétude liée à Omicron, lui ont offert les marges pour agir.
Effet d’entraînement
DB estime que les restrictions imposées dans les villes touchées par le Covid ainsi que les restrictions de déplacements qui seront probablement prises pendant le nouvel an chinois risquent de peser encore sur l’activité au premier trimestre. Ses économistes ont revu en baisse leurs prévisions de 1,1% à 0,5%. «Pour contrer le ralentissement lié à l’épidémie et aux confinements ainsi qu’au secteur du logement, un assouplissement supplémentaire des politiques est nécessaire, juge Wei Yao. Nous prévoyons maintenant une nouvelle baisse de taux directeur de 10 pb et une autre baisse de 50 pb du RRR (ratio de réserves obligatoires des banques).» L’économiste s’attend également à des annonces de mesures de relance ciblées sur les infrastructures et la consommation lors du NPC en mars.
La situation en Chine, et sa stratégie zéro-Covid, inquiète d’autant plus les économistes qu’elle aura un rôle dans la résorption plus ou moins rapide des goulots d’étranglement dans la chaîne d’approvisionnement et donc la croissance mondiale. Barclays a revu en légère baisse ses prévisions de croissance à court terme pour l’Europe et les Etats-Unis.
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Londres - L’ambassadeur britannique aux Etats-Unis, Peter Mandelson, a été limogé jeudi en raison de ses liens avec le délinquant sexuel américain Jeffrey Epstein, un revers de plus pour le Premier ministre Keir Starmer avant la visite d’Etat de Donald Trump au Royaume-Uni. La pression montait depuis plusieurs jours sur Keir Starmer, qui avait nommé il y a moins d’un an cet architecte du «New Labour» de Tony Blair, pour tenter de consolider les liens entre son gouvernement et la nouvelle administration Trump. Des mails entre le vétéran du parti travailliste de 71 ans et le financier américain, mort en prison en 2019, révélés cette semaine, «montrent que la profondeur et l'étendue des relations de Peter Mandelson avec Jeffrey Epstein sont sensiblement différentes de celles connues au moment de sa nomination», a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. «Compte tenu de cela, et par égard pour les victimes des crimes d’Epstein, il a été révoqué comme ambassadeur avec effet immédiat», a ajouté le Foreign Office. Dans une lettre écrite par Peter Mandelson pour les 50 ans de Jeffrey Epstein en 2003, et publiée en début de semaine par des parlementaires à Washington, le Britannique affirme que le financier américain est son «meilleur ami». Interrogé mercredi après la publication de cette lettre, le Premier ministre Keir Starmer lui avait apporté son soutien, assurant que Peter Mandelson avait «exprimé à plusieurs reprises son profond regret d’avoir été associé» à Jeffrey Epstein. Mais cette position est rapidement devenue intenable. En fin de journée mercredi, des médias britanniques, dont le tabloïd The Sun, ont rapporté que M. Mandelson avait envoyé des mails de soutien à Jeffrey Epstein alors que ce dernier était poursuivi en Floride pour trafic de mineures. Juste avant que M. Epstein ne plaide coupable pour conclure un arrangement dans cette affaire en 2008, Peter Mandelson lui aurait écrit: «Je pense énormément à toi et je me sens impuissant et furieux à propos de ce qui est arrivé», l’incitant à "(se) battre pour une libération anticipée». «Je regrette vraiment très profondément d’avoir entretenu cette relation avec lui bien plus longtemps que je n’aurais dû», avait tenté de se défendre l’ambassadeur dans un entretien diffusé mercredi sur la chaîne YouTube du Sun. Il y a affirmé n’avoir «jamais été témoin d’actes répréhensibles» ou «de preuves d’activités criminelles». «Sérieuses questions» «L’affirmation de Peter Mandelson selon laquelle la première condamnation de Jeffrey Epstein était injustifiée et devait être contestée constitue une nouvelle information», a fait valoir le Foreign Office pour expliquer la décision de le limoger. Dans une lettre au personnel de l’ambassade, citée jeudi soir par la BBC, Peter Mandelson affirme que ce poste a été le «privilège» de sa vie. «Je regrette profondément les circonstances qui entourent l’annonce faite aujourd’hui», ajoute-t-il. Les relations entre Londres et Washington sont «en très bonne posture», se félicite l’ex-ambassadeur, disant en tirer une «fierté personnelle» Pour Keir Starmer, ce départ, à une semaine de la visite d’Etat du président Donald Trump au Royaume-Uni les 17 et 18 septembre, est un nouveau coup dur. Le dirigeant travailliste, au plus bas dans les sondages, a déjà dû se séparer il y a quelques jours de sa vice-Première ministre, Angela Rayner, emportée par une affaire fiscale, ce qui a déclenché un remaniement de taille du gouvernement. Trois fois ministre et commissaire européen, Peter Mandelson était le premier responsable politique nommé ambassadeur à Washington, un poste traditionnellement réservé à des diplomates chevronnés. Cet homme de réseaux et d’influence, surnommé le «Prince des ténèbres», était déjà tombé à deux reprises par le passé en raison d’accusations de comportements répréhensibles ou compromettants. La cheffe de l’opposition conservatrice Kemi Badenoch a fustigé le «manque de courage» de Keir Starmer, qui «a encore échoué à un test de son leadership». Marie HEUCLIN © Agence France-Presse -
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