
Immobilier, laissons la loi du marché s’appliquer

Il aura suffi que le marché du crédit immobilier s’enrhume pour que banques et courtiers réclament à cor et à cri un énième coup de pouce de l’Etat. Après le feuilleton du taux d’usure, dont il a fallu modifier la formule de calcul, voilà le Haut Conseil de stabilité financière sommé de mettre au panier les règles d’octroi plus strictes imposées aux prêteurs depuis 2021. Leur tort ? Priver les Français, et tout particulièrement les investisseurs en immobilier locatif, de l’accès au crédit, comme si ce dernier relevait d’un droit constitutionnel. L’un des lobbies du secteur est même allé ces derniers jours jusqu’à évoquer le risque «d’explosion sociale» !
Bercy écoute d’une oreille bienveillante ces revendications. La Banque de France a donc dû, mercredi soir, procéder à une salutaire mise au point. Oui, la production de crédit baisse, mais elle reflète l’attentisme des acquéreurs, et ne fait que revenir à un étiage plus normal après des années d’une croissance très supérieure à celle de l’économie. Non, il n’est pas nécessaire d’assouplir des normes qui visent à la fois à protéger les ménages du surendettement et à éviter une dégradation des bilans bancaires. A fortiori en période de forte remontée des taux et d’interrogations sur la solidité du système financier.
Ce rappel au bon sens ne suffira pas. Tel Harpagon cherchant sa cassette, le secteur de l’immobilier se lamente sur ce qu’il croit perdre : «Mon crédit facile ! Ma subvention !». Difficile de se priver de l’un et de l’autre après deux décennies d’accoutumance. La fin des taux zéro étant actée, c’est sur le second front que se déplacera bientôt la bataille. Des promoteurs réclament déjà le plein rétablissement du Pinel, le régime de défiscalisation pour l’immobilier locatif neuf. Là, encore, l’argument est imparable : permettre aux Français de se loger ou de préparer leur retraite, et soutenir le secteur du bâtiment, gros employeur.
On ne résoudra pourtant pas la crise du logement et la fracture générationnelle qui l’accompagne en permettant aux jeunes ménages de s’endetter plus cher sur trente ans. Pas davantage en multipliant des niches fiscales dont les gains sont captés par les constructeurs et les intermédiaires. Qu’ont accompli en vingt-cinq ans les dispositifs Périssol, Besson, Borloo, Robien, Scellier, Duflot ou Pinel, sinon contribuer à l’allocation disproportionnée de l’épargne des Français vers la pierre ? Qu’apporte à l’intérêt général la fiscalité très favorable dont bénéficient les locations meublées, Airbnb compris ?
On n’a guère entendu les professionnels contester la loi de l’offre et de la demande lorsque, au sortir du Covid, les volumes de transactions et les prix ont explosé dans certaines régions françaises. A présent qu’un retournement s’amorce, pourquoi faudrait-il empêcher les forces du marché d’agir ? Au bout du compte, le pouvoir d’achat immobilier des ménages, qui semble préoccuper au plus haut point certains acteurs, ne s’en porterait pas plus mal.
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