
Bruxelles piétine sur la convergence économique

Une certaine insatisfaction règne du côté des gouvernements nationaux au sujet de la manière dont la Commission pilote le contrôle des politiques économiques et des budgets. « Il y a un sentiment que la Commission européenne ne fait pas son travail », a expliqué la semaine dernière à L’Agefi une source proche du Conseil des ministres. Faute de documents de l’exécutif sur l’état des procédures en déficit ou en déséquilibre excessifs, « nous ne sommes pas en mesure d’avoir une discussion de fond », indiquait-elle.
La Commission européenne a publié le mois dernier, en même temps que ses prévisions économiques, des rapports pays par pays. Mais elle n’a pas fourni d'éléments sur des changements éventuels dans les procédures en déficit ou en déséquilibre excessif en cours.
Flot de critiques
La présidence néerlandaise du Conseil Ecofin, assurée par Jeroen Dijsselbloem, se livrera donc à un débat général sur la mise en œuvre des recommandations 2015 de Bruxelles, tandis que l’Eurogroupe devrait examiner les avis de budget 2016 et adopter un simple changement de procédure dans l’application des règles de déséquilibre excessif en réduisant le nombre de « stades » de 6 à 4. « Les sujets ne sont pas suffisamment au point pour que l’on prenne des décisions » sur le fond pays par pays, consent une source haut placée à la Commission. Et d’ajouter que la discussion va continuer « pour un long moment ». Les divergences entre les Vingt-Huit et au sein de la zone euro devraient toutefois être abordées lors du sommet européen de mars.
L’exécutif traverse une passe difficile dans l’application des règles budgétaires. En Italie, le flot des critiques ne tarit pas. Le Premier ministre Matteo Renzi écrivait récemment dans La Republicca qu’alors que le déficit italien était nettement sous les 3%, autrement dit en ligne avec le pacte de stabilité, « l’Allemagne ne respecte pas les règles, avec un excédent qui reste au-dessus de ce que la Commission exige ». Depuis 2012, l’excédent courant allemand est très au-dessus de la fourchette haute de 6% prévue par les règles européennes.
Alors que le budget 2016 du Portugal a été validé de justesse en janvier, le président de la Commission Jean-Claude Juncker sera la semaine prochaine à Lisbonne pour rencontrer le nouveau gouvernement d’alliance de gauche. Le projet de budget de Lisbonne avait été accepté du bout des lèvres par l’exécutif en janvier. Pour la député européenne socialiste portugaise Elisa Ferreira, la ligne de Bruxelles reste excessivement ferme. « On ne peut pas rester sur le mode de l’austérité pendant 8 ans. C’est important que l’Europe donne une chance à un gouvernement de gauche modéré qui se présente comme une alternative aux anti-européens », dit-elle.
Côté français, Emmanuel Macron est monté au créneau lundi dernier pour dénoncer la « politique budgétaire consolidée de type déflationniste » menée par la Commission européenne au niveau de la zone euro. Il faut que l’on « redéfinisse le ‘fiscal stance’ » en faveur d’une politique « plus expansionniste », a-t-il dit en marge d’une réunion du Conseil compétitivité.
Un diagnostic démenti par Pierre Moscovici. « Ce propos est inexact », a déclaré à L’Agefi le commissaire en charge de l’euro. « L’impact de la consolidation budgétaire, qui a longtemps été négatif, est devenu neutre depuis deux ans », dit-il. Et d’ajouter que « la crise des réfugiés » l’a même rendu positive. « C’est une politique de relance masquée », explique-t-il, du fait des dépenses de l’Allemagne pour accueillir les demandeurs d’asile, lesquelles seraient de « 10 à 20 milliards d’euros ».
« Emmanuel Macron a raison sur le fait que l’on pourrait mieux coordonner les politiques économiques », consent toutefois son prédécesseur à Bercy. S’il appelle à « ne pas faire le procès des règles », il admet que certaines questions concernant « les déséquilibres macro-économiques » doivent « être résolues », dit-il.
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Népal: Sushila Karki, la nouvelle Première ministre, s'affiche au chevet des victimes des émeutes
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Népal: la Génération Z en révolte après la mort de Santosh Bishwakarma
Katmandou - «Il rêvait de mourir en ayant été utile à son pays». Santosh Bishwakarma, 30 ans, a été abattu lundi par les forces de l’ordre dans une rue de Katmandou alors qu’il manifestait contre le gouvernement, et sa femme est inconsolable. Dans sa petite maison de la capitale népalaise encombrée de ses proches venus partager son deuil, Amika Bishwakarma, 30 ans elle aussi, peine à évoquer le souvenir de son mari. «Il avait l’habitude de dire qu’il ne voulait pas mourir comme un chien», lâche-t-elle entre deux sanglots. «Il voulait que le Népal soit reconnu dans le monde, et ne pas mourir avant d’y avoir contribué. Je crois qu’il a réussi». Santosh avait rejoint lundi le cortège de ces jeunes réunis sous la bannière de la «Génération Z» qui dénonçaient le blocage des réseaux sociaux et la corruption des élites du pays. Il est tombé lorsque la police, débordée, a ouvert le feu sur les manifestants. Une vingtaine d’entre eux ont été tués, des centaines d’autres blessés. La répression a nourri la colère de cette «Gen Z», qui est revenue le lendemain dans les rues de la capitale et a incendié ou mis à sac tous les symboles du pouvoir: parlement, bureaux ministériels, tribunaux, jusqu’aux résidences de plusieurs dirigeants. Le Premier ministre KP Sharma Oli n’a eu d’autre choix que de démissionner. Respectée pour son indépendance, l’ex-cheffe de la Cour suprême Sushila Kari, 73 ans, a été nommée vendredi soir à la tête d’un gouvernement provisoire chargé de conduire le pays jusqu'à des élections prévues dans six mois. Son entrée en fonction semble satisfaire de nombreux Népalais mais pas Amika Bishwakarma, désormais toute seule pour élever son fils Ujwal, 10 ans, et sa fille Sonia, 7 ans. «Un peu de justice» «Mon mari aurait tout fait pour leur permettre de réaliser leurs rêves, même au prix de sa vie», assure-t-elle. «Mais comment je vais pouvoir y arriver seule maintenant ? Il a sacrifié sa vie pour le pays, j’espère que le gouvernement va m’aider». Quand il a appris la mort de Santosh, son ami Solan Rai, 42 ans, a accouru au chevet de sa veuve. Après les violences de la semaine, il veut croire à des jours meilleurs pour son pays. «je n’avais jamais vu pareille colère», note-t-il, «j’espère que cette fois, ça va enfin changer». D’autres veulent croire que la mort de leurs proches ne sera pas vaine. Ce vendredi, ils étaient des centaines à se presser dans le temple de Pashupatinath, à Katmandou, pour assister à la crémation d’un fils, d’un frère ou d’un ami tué cette semaine. «J’espère que de tout ça sortira une forme de justice, que notre peuple obtiendra enfin les changements qu’il cherche désespérément depuis si longtemps», espère Ratna Maharjan en pleurant son fils, tué d’une balle tirée par un policier. Sur les marches du temple, au bord du fleuve Bagmati, une femme vêtue de rouge s’accroche désespérément à la dépouille de son fils, qu’elle refuse de voir partir en cendres. Un peu à l'écart, des policiers déposent des gerbes de fleurs sur le cercueil d’un de leurs collègues, mort lui aussi pendant les émeutes. La police a fait état de 3 morts dans ses rangs. Avant de retourner au silence de son deuil, Amika Bishwakarma fait un dernier vœu, plus politique. «On ne demande pas la lune», glisse-t-elle d’une petite voix. «On veut juste un peu plus d'égalité, que les riches ne prospèrent pas pendant que les pauvres continuent à dépérir». Bhuvan BAGGA et Glenda KWEK © Agence France-Presse