Un deuxième trimestre sans relief est promis aux banques françaises

BNP Paribas ouvre jeudi le bal des résultats trimestriels. Les investisseurs seront en quête de visibilité, alors que les revenus devraient rester sous pression, notamment dans la banque de détail en France.
BNP Paribas
Les attentes du marché sont peu élevées pour les trimestriels des banques françaises dont la publication débutera par ceux de BNP Paribas  -  Photo Bloomberg

Les performances des banques françaises devraient rester en deçà de leurs homologues européennes au deuxième trimestre. Alors que BNP Paribas ouvre la série des publications trimestrielles ce jeudi, suivie par la Société Générale et le Crédit Agricole la semaine prochaine, les attentes du marché sont peu élevées. «Ce trimestre ne sera un catalyseur important pour aucune des banques françaises», jugent les analystes de Jefferies.

Selon le consensus Factset, le bénéfice net de BNP Paribas devrait s’afficher en baisse de 22,5% à 2,463 milliards d’euros, celui de Crédit Agricole SA en recul de 30%, à 1,381 milliard d’euros. Etant donné la lourde perte nette de 1,482 milliard d’euros enregistrée au deuxième trimestre 2022 du fait de la cession de sa filiale russe Rosbank, la Société Générale bénéficiera d’un effet de base favorable. Son bénéfice net est attendu à 720 millions d’euros. Son résultat net ajusté devrait toutefois s’afficher en baisse de 55% sur un an, anticipent les analystes de Deutsche Bank.

La marge nette d’intérêt à la loupe

Cette sous-performance attendue s’explique par une pression forte sur les revenus, qui devraient chuter de près de 8% pour CASA, 9% pour la Société Générale et près de 12% pour BNP Paribas selon le consensus Factset. La dégradation sera plus marquée dans la banque de détail en France, bien que certains métiers de la banque de financement et d’investissement, notamment dans les activités de marchés, commenceront à s’essouffler. «A l’exception de BNP Paribas, qui tirera son épingle du jeu, le sujet de la marge nette d’intérêt dans la banque de détail en France restera le point d’attention central», relève Rafael Quina, analyste chez Fitch Ratings.

Contrairement à leurs concurrentes européennes, les banques françaises restent pénalisées par une base d’actifs composée essentiellement de crédits à taux fixe qui les empêche de bénéficier des effets positifs de la remontée des taux. «Nous estimons que la marge nette d’intérêt devrait toucher un point bas au second semestre 2023 avant une amélioration nette au tournant de 2024», ajoute Rafael Quina. Ce qui constitue aujourd’hui un effet retard pourrait donc se transformer en atout. «Si le régime de taux reste stable pendant deux à trois ans, les banques françaises pourraient bénéficier d’un véritable potentiel haussier sur leurs revenus», remarque-t-il. Dans ce contexte, «les investisseurs attendront de la clarté sur la trajectoire et de la visibilité sur le rythme auquel les banques françaises pourront monter à bord du train de la remontée des taux», juge Antonio Roman, gérant actions chez Axiom AI. D’autant que les banques françaises ont mis en place des couvertures à long terme qui les protègent contre la baisse des taux, mais brident également leur capacité à bénéficier de leur remontée.

La Société Générale scrutée sur ses coûts

La dégradation des revenus dans la banque de détail devrait être particulièrement marquée pour la Société Générale – de l’ordre de 14% selon le consensus Factset – tandis que le groupe, qui vient de changer de directeur général en juin, est attendu au tournant sur sa capacité à restaurer sa performance boursière. A l’approche de la journée investisseurs du 18 septembre, au cours de laquelle le nouveau capitaine Slawomir Krupa présentera sa feuille de route, les investisseurs se montreront notamment attentifs à la gestion des coûts. La fusion stratégique de ses réseaux Société Générale et Crédit du Nord, qui a notamment impliqué un lourd chantier informatique, ainsi que l’absorption de Leaseplan par ALD, devraient se traduire par «des coûts ponctuels», anticipent les analystes. Le coefficient d’exploitation de la banque est attendu à 70,5%, contre 67% au deuxième trimestre 2022. «Tout comme l’a fait Deutsche Bank, la Société Générale devra prouver qu’elle est en mesure de maîtriser ses coûts», souligne Antonio Roman.

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Le marché sera également à l’affût de signaux positifs sur un renforcement du ratio de capital CET 1 qui pourrait nourrir la capacité de la banque à dynamiser sa politique de distribution, notamment via des programmes de rachats d’actions. «Les investisseurs sont court-termistes, ils veulent de la distribution tout de suite», rappelle Antonio Roman. Le retour sur fonds propres (ROTE) de la banque de la Défense est attendu à 5,5% ce trimestre, selon le consensus Factset, tandis qu’elle vise une cible de 10% en 2025. Les analystes disent, pour la plupart, anticiper un ROTE de 6 à 7% en 2023, avant un redressement progressif au cours des deux années suivantes.

Les analystes n’attendent pas d’annonce majeure du côté de BNP Paribas ou de CASA. La banque de la rue d’Antin pourrait cependant déclarer son intention de lancer la deuxième tranche de son programme de rachat d’actions de l’ordre de 2,5 milliards d’euros.

Coût du risque maîtrisé

Le coût du risque devrait rester globalement maîtrisé, alors que les analystes n’escomptaient pas de dégradations majeures de la qualité de l’actif. «Nous anticipons un coût du risque en légère hausse à environ 30 points de base en 2023 pour la moyenne des banques françaises, contre 25 pb en 2022», précise Rafael Quina. Le trimestre devrait, selon lui, être marqué par une montée du coût du risque avéré, pouvant conduire à des dotations de provisions, alors que les faillites d’entreprises atteignent un niveau supérieur à leur moyenne de long terme, et que plusieurs dossiers, à l’image d’Orpea et de Casino, agitent la place.

Sans être une préoccupation majeure, l’exposition des banques françaises à l’immobilier commercial et à la construction restera un point d’attention. «Leur exposition est significative même si le taux de créances douteuses atteint 3% seulement sur ces portefeuilles, tiré vers le haut par la construction et la promotion. Cela pourrait créer une certaine volatilité du coût du risque en 2023 et 2024», analyse Rafael Quina.

Après la crise bancaire du mois de mars, et alors que les banques françaises ont fait face à la fin juin à une nouvelle échéance de remboursement du TLTRO (les facilités de refinancement à long terme de la BCE), la liquidité sera également un sujet d’attention. Alors que la concurrence sur les dépôts des entreprises s’accélère et que les particuliers se détournent progressivement des comptes à vue, «l’accès au marché des banques françaises reste bon», juge Rafael Quina. On devrait donc assister, selon lui, à un mouvement de «normalisation de leur liquidité».

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