
Les jeunes diplômés larguent les amarres
Malgré un climat économique plus porteur en France, les financiers en herbe choisissent souvent de faire leurs premiers pas professionnels en dehors des frontières de l’Hexagone.
Soraya Haquani

« Au départ, je souhaitais partir à Londres ou à New York, puis cette opportunité de poste à Dubaï chez Commerzbank s’est présentée, j’ai candidaté et j’ai été retenu !, raconte avec enthousiasme Hugo Maugenest, 25 ans, sales fixed income au sein de la salle des marchés dubaïote de la banque allemande. Je ne connaissais ni Dubaï ni cette région du monde. Je me vois rester ici encore trois à cinq ans... » Ce mois de juillet, le jeune diplômé du MSc Financial Markets & Investments de Skema Business School a fêté sa première année dans cette ville des Emirats arabes unis, où il dit profiter d’« une qualité de vie incroyable pour un professionnel de mon âge. (...) J’ai un contact direct avec les clients, des responsabilités, et je baigne dans un environnement multiculturel avec des collègues français mais aussi bahreïniens, indiens, anglais... », confie le jeune sales. Comme lui, de nombreux étudiants qui se destinent à des carrières en finance choisissent l’international pour démarrer leur vie professionnelle. Pour les jeunes diplômés des écoles de management en 2017, même si la conjoncture s’est améliorée en France, la tendance à l’expatriation ne fléchit que modérément par rapport aux promotions précédentes. Selon la dernière enquête annuelle de la Conférence des grandes écoles (CGE) qui porte sur 176 écoles et trois promotions (2017, 2016 et 2015, soit 148.000 diplômés interrogés), 18,6 % des jeunes managers diplômés l’an dernier ont choisi l’étranger pour leur insertion professionnelle, contre 22,2 % pour ceux de la promotion 2016 et 23,9 % pour celle de 2015. « Deux ans après leur diplôme, 23,8 % des managers occupent un emploi à l’étranger », souligne aussi l’étude. « Le choix de l’international reste ancré chez les étudiants mais certaines années sont un peu différentes, observe Alice Guilhon, présidente du chapitre des écoles de management à la CGE et directrice générale de Skema Business School. Comme la France est redevenue attractive, ils sont un peu moins nombreux à s’expatrier mais ils pourront le faire plus tard. » Les jeunes ingénieurs, en revanche, sont moins attirés par l’international : ils ne sont que 9,9 % à commencer leur carrière à l’étranger. « Les écoles d’ingénieurs les incitent à y aller pourtant, et je vois de plus en plus de stages réalisés à l’étranger ainsi que des doubles diplômes avec des établissements non-français, déclare Marie-Annick Chanel, présidente de l’Observatoire de l’ingénieur. Notre dernière enquête nationale sur les ingénieurs montre que près de 133.000 d’entre eux travaillent à l’étranger, avec la Suisse comme première destination, suivie par les Etats-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni. » L’ADN du management Fait notable chez les jeunes managers comme chez les jeunes ingénieurs, le Brexit ne les rebute pas. Ils privilégient toujours le Royaume-Uni comme première destination de travail selon l’enquête de la CGE. Un quart des nouveaux diplômés sont accueillis outre-Manche et en Allemagne ; et hors Union européenne (UE), la Chine est leur premier choix devant la Suisse et les Etats-Unis. Ces deux derniers pays sont plus volontiers choisis par les ingénieurs tandis que les managers ont une préférence pour la Chine. Amaury Goguel, directeur du MSc Financial Markets & Investments de Skema Business School, voit ses élèves s’orienter sensiblement du côté de l’Asie. « En particulier Singapour et Hong Kong, relève le professeur de finance, car les marchés financiers y sont en pleine croissance, et la forme de pensée asiatique les confronte à quelque chose de nouveau qui constitue un élément différenciant pour performer en tant que jeune investisseur. Je constate aussi une montée en gamme de l’offre académique en Chine, avec des business schools qui offrent des programmes de qualité en finance et la possibilité d’étudier un an dans des pays occidentaux. » Si son ancien étudiant Hugo Maugenest a, lui, élu domicile à Dubaï, c’est pour expérimenter « une vision différente dans l’exercice de son métier ». « Aujourd’hui, je connais mieux les clients de différents marchés, comme les clients indiens par exemple, illustre le jeune Français. Les banques hexagonales sont en train de délocaliser leurs back offices en Inde, et c’est un avantage de savoir comment échanger avec les professionnels de la finance de ce grand sous-continent. » « La dimension internationale, c’est l’ADN de nos écoles de management, rappelle Alice Guilhon. Les écoles cherchent à obtenir les accréditations internationales, raison pour laquelle elles se sont elles-mêmes beaucoup internationalisées, notamment en accueillant de plus en plus d’étudiants étrangers. La compétitivité de la France profite de ce brassage de nationalités différentes. (...) Par ailleurs, la France tire avantage d’événements comme le Brexit, poursuit la directrice générale de Skema Business School. Les étudiants d’Inde, de Chine, d’Italie, d’Espagne ou d’Amérique latine qui se dirigeaient auparavant vers des écoles au Royaume-Uni, montrent désormais plus d’intérêt pour les écoles tricolores. » « A Dubaï, mon MSc est connu par des professionnels de la finance qui ne sont jamais venus en France !, s’amuse Hugo Maugenest. Les jeunes diplômés en France sont très bien formés aux métiers financiers et cela se sait. » Si bien que les rémunérations sont souvent plus attractives qu’en France, où leur salaire brut annuel moyen hors primes s’élève à 34.122 euros en 2018. Ainsi, les jeunes diplômés de 2017 qui travaillent en Allemagne – pays de l’UE le plus rémunérateur pour eux – affichent un salaire moyen brut annuel hors primes de 46.053 euros, tandis que ceux qui exercent aux Etats-Unis ou en Suisse émargent à respectivement 60.926 euros et 62.464 euros.
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Cuba : fin du black-out, l’électricité est revenue après la cinquième panne en un an
La Havane - Le courant a été rétabli à Cuba, a annoncé jeudi le ministère de l’Energie et des mines, au lendemain d’une coupure générale, la cinquième en moins d’un an. «Le réseau électrique national est désormais rétabli», a fait savoir le ministère sur le réseau social X. En début de matinée, la compagnie nationale d'électricité avait annoncé que le courant était à nouveau disponible dans 11 provinces sur 15. Dans la capitale, la circulation et les activités ont repris quasiment normalement, a constaté l’AFP. «Le courant est revenu à 3h30 (7h30 GMT) du matin. Nous nous en sommes aperçus parce que nous avions laissé toutes les lumières allumées pour le savoir», a raconté à l’AFP Maria Beltran, 58 ans, qui vit dans un quartier populaire de l’ouest de La Havane. «Hier, ce n’a pas été facile. Nous sommes restés chez nous (...) assis dans un fauteuil toute la journée», a-t-elle ajouté, alors que ces coupures générales paralysent la vie économique de l'île et chamboulent la vie quotidienne des habitants. Mercredi matin, un arrêt de la centrale électrique Antonio Guiteras, la plus importante du pays, située au centre de l'île, a provoqué la déconnexion du système électrique sur l’ensemble du pays. Les autorités ont précisé par la suite que la coupure était due à un signal erroné de surchauffe dans la chaudière de la centrale. Depuis octobre 2024, l'île communiste a ainsi subi cinq pannes généralisées, dont certaines ont duré plusieurs jours. Cette dernière coupure a duré un peu plus de 24 heures. Cuba est en proie depuis cinq ans à une profonde crise économique, avec un manque cruel de devises, et le système électrique vétuste souffre d’avaries fréquentes et de pénuries de combustible. Les huit centrales électriques du pays ont presque toutes été inaugurées dans les années 1980 et 1990. Elles tombent régulièrement en panne ou doivent être arrêtées pour de longues semaines de maintenance. L’installation récente de trente parcs photovoltaïques, soutenue par la Chine, sur les 52 prévus pour cette année, n’a pas permis pour l’heure de faire diminuer les coupures. Pendant les fortes chaleurs l'été, lorsque la consommation atteint des pics à cause de l’utilisation de la climatisation, les délestages se sont multipliés. Selon les autorités, ces coupures programmées ont duré en moyenne près de quinze heures par jour en août et seize heures en juillet, dans tout le pays. Cuba traverse sa pire crise économique depuis trois décennies. Aux faiblesses structurelles de son économie planifiée et centralisée s’ajoutent l'échec d’une réforme monétaire récente et un renforcement de l’embargo américain, en vigueur depuis 1962. © Agence France-Presse