Les dettes bancaires Cocos changent d’ère

Le risque de non-remboursement anticipé remonte, mais avec le consentement des investisseurs.
Fabrice Anselmi

La hausse des taux et des spreads de crédit n’est pas sans conséquences sur les dettes bancaires subordonnées Additional Tier 1 (AT1). Alors qu’Intesa et Deutsche Bank viennent de rouvrir ce marché des dettes dites «CoCos», car convertibles en capital au-dessous d’un certain ratio de fonds propres durs, le «risque» de non-remboursement anticipé (call) à la date prévue augmente sensiblement.

Les banques européennes doivent obtenir l’accord du superviseur pour de tels remboursements, et refinancer ces titres au préalable pour conserver assez de capital prudentiel. Cette année, 22 établissements sont concernés par une telle échéance en 2022, dont 10 ont confirmé qu’ils exerceraient le call comme prévu. Pour les autres, «la probabilité d’un ‘non call’ a augmenté, et ce n’est plus forcément autant un problème que par le passé de voir les banques émettrices suivre de plus en plus la logique économique, comme leurs homologues américaines», explique Jérémie Boudinet, gérant spécialisé à La Française AM.

Crainte sur la volatilité

En cas de non-remboursement anticipé, le coupon du titre est réinitialisé à la date prévue en tenant compte du spread à l’émission (reset spread) et du taux swap à 5 ans, la maturité courante des dates de call. Avec la hausse des spreads liée à l’incertitude et à la guerre en Ukraine, les banques, qui raisonnent uniquement en spreads puisque la composante taux est systématiquement couverte, auraient pour la plupart intérêt à ne pas rembourser. Un refinancement sur le marché leur coûterait en effet plus cher. La valeur de l’AT1 Déc 2022 de Raiffeisen Bank International (RBI) – particulièrement exposée à la Russie – a, par exemple, chuté très au-dessous du pair ces dernières semaines, mais elle n’est pas la seule à être décotée.

Du fait de taux bas les années passées, les non-remboursements à date de call étaient mal perçus par les investisseurs, qui comptaient sur des remontées de capitaux. Mais Santander n’avait finalement pas souffert de la prolongation de son AT1 au printemps 2019, pas plus que Deutsche Bank, Aareal Bank et Lloyds Banking Group avec le Covid au printemps 2020. «Avec la récente hausse des taux, les investisseurs vont voir le coupon se maintenir autour de 6%-7% en cas de ‘non call’, et bénéficier d’un effet portage, qui peut même être plus intéressant pour les titres déjà décotés que pour ceux qui vont l’être. La principale crainte porte sur la volatilité autour de ces mouvements», conclut Jérémie Boudinet.

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