Credit Suisse entraîne le secteur bancaire européen dans sa chute

Des déclarations de l’actionnaire saoudien de Credit Suisse ont mis le feu aux poudres. Tout le secteur bancaire plonge en Bourse, à l’image de BNP Paribas et Société Générale en baisse de plus de 10%. Wall Street est aussi dans le rouge.
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Credit Suisse  -  Photo Credit Suisse.

Le répit aura été de courte durée pour les marchés actions et pour le secteur bancaire. Après leur rebond mardi, sur la réduction des craintes de contagion de la crise qui secoue les banques régionales aux Etats-Unis, les places boursières européennes chutent de nouveau mercredi, affectées par le regain d’inquiétude autour de Credit Suisse.

Les valeurs bancaires sont de nouveau au centre de la tourmente. A Paris, l’action BNP Paribas, qui a été momentanément suspendue à la baisse dans la matinée après avoir chuté de 8%, a perdu jusqu'à 12% avant de clôturer en repli de 10,1%, devancée par la Société Générale (-12,2%), qui a également été suspendue. L’ensemble du secteur a dégringolé, l’indice Euro Stoxx Banks abandonnant plus de 8%. La crainte sur les banques a traversé l’Atlantique avec comme risque celui d’un défaut de Credit Suisse.

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Sauve qui peut

Le président de la Saudi National Bank, le principal actionnaire de Credit Suisse depuis l’augmentation de capital réalisée l’automne dernier, a indiqué mercredi dans une interview à Bloomberg TV qu’il ne comptait pas renflouer à nouveau la banque. «La réponse est absolument pas, pour de nombreuses raisons, au-delà de la plus simple, qui est réglementaire et statutaire», a déclaré Ammar al Khudairy. Le groupe ne peut en effet franchir le seuil des 10% du capital.

Le dirigeant a ensuite affirmé à Reuters en marge d’une conférence sur le secteur financier à Riyad que la banque n’en avait pas besoin. «Je ne pense pas qu’ils auront besoin d’argent supplémentaire, a-t-il affirmé. Si vous regardez leurs ratios, ils vont bien. Et ils opèrent sous un régime réglementaire strict en Suisse et dans d’autres pays.» Mais dans le contexte actuel, après les défaillances de trois banques régionales aux Etats-Unis, les propos du premier actionnaire de la banque helvète sonnent comme une alerte.

«Les craintes sur les banques se sont étendues à Credit Suisse, explique Frédéric Rollin, conseiller en investissement chez Pictet AM. L’action est en forte baisse et sa capacité à emprunter s’amoindrit. S’assurer contre un défaut de la banque coûte désormais près de 600 points de base.» Après avoir été suspendue de cotation ce matin, l’action de la banque suisse a touché un nouveau plus bas historique à 1,56 franc suisse et clôturé en baisse de 24,2%. Les CDS (credit default swaps) 5 ans ont progressé au-delà de 750 points de base, soit une probabilité de défaut de près de 50%, selon le marché.

«La banque était déjà très surveillée par les investisseurs mais la situation s’aggrave et le marché commence à craindre une défaillance, après l’annonce par son principal actionnaire qu’il ne la soutiendrait plus financièrement, ce qui aurait d’autres répercussions que les déboires de SVB aux Etats-Unis. Tout le monde coupe ses positions sur les banques», affirme Vincent Boy, stratégiste chez IG Markets. «Credit Suisse est une banque suffisamment importante pour générer des craintes sur l’ensemble du système bancaire», ajoute le spécialiste de Pictet AM.

L’indice Euro Stoxx 50 qui avait débuté la séance en légère baisse l’a finie sur un plongeon de 3,5%. A Paris, l’indice CAC 40 a dévissé de 3,6%, le Dax de 3,3% à Francfort, l’Ibex de 4,4% à Madrid et le FTSE Mib de 4,6% à Milan.

Dans le sillage des places boursières européennes, Wall Street a ouvert en forte baisse. L’indice S&P 500 reculait de 1,5% peu avant 18h30 et le Nasdaq de 0,9%.

Cette nouvelle chute des actions européennes s’accompagne d’un rebond de la volatilité, les investisseurs continuant de rechercher de la protection face aux récents mouvements sur les marchés. L’indice VStoxx de volatilité implicite de l’indice Euro Stoxx 50 rebondit à 32 (+9,2), revenant sur ses niveaux de mi-octobre 2022. L’indice Vix de la volatilité du S&P 500 grimpe, dans le même temps, à 27,7.

Les craintes sur les banques européennes se répercutent sur les marchés de taux où les investisseurs continuent de chercher des actifs pour protéger leurs portefeuilles. Le rendement du Bund 10 ans chute de 31 pb, à 2,14%, la maturité 2 ans baissant de près de 46 pb, à 2,46%, sous le niveau du taux de dépôt de la Banque centrale européenne (BCE). Le rendement des Treasuries 10 ans cède 21 pb, à 3,42% celui des emprunts d’Etats américains à 2 ans de 40 pb à 3,83%. Les craintes sur le secteur bancaire aux Etats-Unis et en Europe alimentent celles sur une probable récession après le resserrement historique des politiques monétaires.

Cette nouvelle chute des marchés actions intervient en outre à la veille de la réunion de la Banque centrale européenne. Les investisseurs ont récemment revu en forte baisse leurs anticipations de taux en réaction à la crise bancaire aux Etats-Unis. «Ces événements ne sont toutefois pas de nature à infléchir la trajectoire de la BCE qui devrait confirmer demain une hausse de 50 pb de ses taux directeurs», poursuit Vincent Boy. En ne le faisant pas, elle risquerait d’abîmer encore sa crédibilité face à l’inflation. «Les banques centrales se trouvent coincées entre le risque inflationniste et la nécessité d’intervenir pour calmer la panique. Ce n’est pas une situation confortable pour elles, et donc pour les investisseurs», estime Frédéric Rollin.

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