JPMorgan, un concurrent sérieux pour les banques de détail françaises

A la différence de Goldman Sachs, le géant américain a des arguments à faire valoir pour sa banque mobile Chase, qu’il compte lancer en Allemagne et en France. Explications.
Jamie Dimon
Jamie Dimon a annoncé le lancement prochain de Chase en Allemagne  -  Bloomberg

Entre les deux géants de Wall Street, le contraste est saisissant. Pendant que Goldman Sachs panse les plaies d’une diversification ratée dans la banque de détail, JPMorgan confirme ses ambitions auprès des particuliers en Europe. Présent dans la banque en ligne au Royaume-Uni depuis septembre 2021 sous la marque Chase, le géant américain a officialisé le 21 juillet le prochain lancement de son activité en Allemagne, en attendant la France. «Il a toujours été clair pour nous que nous voulons introduire Chase non seulement au Royaume-Uni, mais aussi en Allemagne et dans d’autres pays européens, a déclaré Jamie Dimon, PDG de JPMorgan, dans un entretien au Handelsblatt. Nous avons des plans ambitieux.»

Une ambition prise beaucoup plus au sérieux, de ce côté-ci de l’Atlantique, que ne l’avait été celle de Marcus, la banque en ligne de Goldman Sachs. «On ne s’improvise pas banquier retail. JPMorgan connaît le métier et ne fera pas les mêmes erreurs que Goldman Sachs, qui a embarqué des mauvais risques et a offert des taux de rémunération élevés pour collecter des dépôts quand les taux d’intérêt étaient encore nuls», juge le patron d’une banque mobile française.

Le numéro un bancaire américain a des arguments pour être un concurrent sérieux en Europe. Au Royaume-Uni, Chase dit avoir collecté 15 milliards de livres de dépôts (17,4 milliards d’euros) et conquis 1,6 million de clients en dix-huit mois… soit autant que les clients cumulés en France de Hello Bank (BNP Paribas), Fortuneo (Arkéa) et BforBank (Crédit Agricole) à fin 2022, alors que Boursorama, le leader français, en compte 5 millions en portefeuille. Elle traite aussi un million de transactions par jour. Simple marque, Chase UK ne communique pas ses résultats financiers, dilués dans le segment «Other Corporate» des comptes de JPMorgan.

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Pour accélérer son développement, le groupe s’est appuyé sur la fintech britannique de gestion d’épargne en ligne, Nutmeg, rachetée il y a deux ans. Ses services sont désormais accessibles depuis février sur l’application Chase, et vice-versa. Les clients semblent satisfaits, à en juger par les British Bank Awards du site Smart Money People, où les consommateurs sont invités à noter leur banque : Chase y a été désignée en 2023 meilleure banque britannique, meilleur fournisseur de compte courant et meilleur fournisseur d’épargne.

Une capacité d’investissement «sans égale»

A la différence des fintechs qui ont attaqué ce marché il y a une dizaine d’années, JPMorgan offre toute la palette d’une banque traditionnelle. Ce poids lourd des paiements, des cartes de crédit et de la gestion patrimoniale maîtrise déjà l’offre sur son marché domestique. Lors de sa dernière journée investisseurs, le 22 mai, sans évoquer Chase et Nutmeg outre-Manche, le groupe a insisté sur ses dépenses en technologie. Celles-ci atteindront 3 milliards de dollars en 2023 dans la banque de détail et commerciale aux Etats-Unis. «Notre capacité d’investissement est sans égale, nos concurrents ne peuvent pas investir au même niveau que nous», a claironné Marianne Lake, co-directrice générale de la banque de détail (commercial & community banking). «Ces investissements représentent un levier de performance opérationnelle pour les années à venir», a-t-elle ajouté.

L’offensive de JPMorgan intervient en outre alors que beaucoup de concurrents «pure players» sont affaiblis, ont disparu (ING Direct, Orange Bank…) ou se cantonnent, comme les Big Tech, à la brique paiement du métier de banquier. «En réalité, à part les banques en ligne filiales d’acteurs bancaires, comme Fortuneo depuis plusieurs années ou Boursorama à partir de 2023, aucun acteur n’a réussi à devenir structurellement rentable, même si la hausse des taux devrait permettre à certains de le devenir. La raison tient principalement à l’équipement, toujours très inférieur aux acteurs traditionnels», note Nicolas Darbo, associé du cabinet de conseil Accuracy, dans un post LinkedIn.

Dans ce contexte, «je ne vois que deux acteurs étrangers pouvant être de sérieux concurrents à l’échelle européenne, conclut le patron de la banque française. Le premier est Revolut, qui a désormais une base de 30 millions de clients particuliers à équiper au-delà du transfert d’argent et du change. Et le second, JPMorgan».

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