
Chez Danone, le choix de la stabilité risque de mal tourner

Face à la fronde d’une partie de ses actionnaires, Danone se met en quête d’un nouveau directeur général. Mais les changements de gouvernance annoncés lundi soir pourraient créer davantage de difficultés à la tête du groupe agroalimentaire.
Dissocier les fonctions de PDG et remplacer Emmanuel Faber au poste de directeur général constituaient certes les principales mesures réclamées par les fonds Artisan Partners et Bluebell Capital, entrés l’année dernière au capital du groupe tricolore. Selon eux, seul un nouveau capitaine peut relancer la dynamique des ventes et permettre au groupe de rattraper son retard de valorisation en Bourse.
Cependant, le maintien d’Emmanuel Faber au poste de président non exécutif du conseil d’administration, avec à ses côtés l’ancienne directrice financière Cécile Cabanis, pose la question de savoir de quelle marge de manœuvre disposera le futur directeur général.
« Ce n’est pas une rupture nette », estiment les analystes de Bernstein. « Cela ne peut conduire qu’à deux types de situations : soit un directeur général qui ne fait qu’exécuter les plans du président, soit un nouveau face-à-face tendu avec les actionnaires dans quelques années », préviennent-ils.
« Les conditions de la dissociation des fonctions ne sont pas optimales pour avoir une transition et une gouvernance apaisées. Avec un PDG devenu président, une ancienne directrice financière, Cécile Cabanis, à la vice-présidence du conseil, et un administrateur référent, Jean-Michel Severino, proche de l’ancien PDG, le futur directeur général aura du mal à avoir la main », abonde Frédéric Genevrier, président d’OFG Recherche, une société d’analyse financière et de gouvernance.
Le conseil renouvelle son soutien à la stratégie
Le conseil d’administration de Danone a d’ailleurs réaffirmé son soutien à la stratégie définie par Emmanuel Faber, que son successeur sera donc logiquement chargé de poursuivre. Le plan présenté en novembre prévoit une réorganisation des activités du groupe par pays et non plus par produits, afin de regagner en compétitivité et en agilité sur certains marchés où Danone perd du terrain.
Cette stratégie est également contestée par les fonds. Pour Jan Bennink, ex responsable de la division laitière de Danone qui conseille aujourd’hui Artisan Partners, il faut au contraire capitaliser sur l’organisation actuelle et concentrer les investissements sur les marques mondiales les plus rentables du groupe. L’expert, qui a échangé avec les administrateurs du groupe, propose de céder 30% des activités des branches Eaux et Produits laitiers et d’origine végétale – une cure d’amaigrissement qui n’est pas sans rappeler celles d’autres groupes du secteur.
Le précédent de Nestlé, mais d’Engie aussi
Pour les analystes d’Oddo BHF, Danone a fait un choix « opportun » en optant pour une certaine continuité de sa gouvernance et de sa stratégie. « Après une année 2020 compliquée et quatre mois d’incertitude sur l’avenir du top management, le groupe a besoin de stabilité. Rappelons en effet que les changements trop violents ne sont pas bons pour un groupe de biens de consommation », commente l’intermédiaire financier.
Un précédent au sein du secteur donne de l’espoir. Nestlé a lui aussi fait le choix d’une transition en douceur en 2017 lorsqu’il a nommé Mark Schneider au poste de directeur général, en 2016, tandis que son prédécesseur Paul Bulcke prenait la présidence du conseil d’administration. Ensemble, ils sont parvenus à redresser les performances du géant suisse.
Mais les marchés ne semblent plus prêts à accorder à Emmanuel Faber le bénéfice du doute. « L’annonce de la vente de la participation dans Mengniu pour distribuer un dividende exceptionnel ne répond pas à la demande des investisseurs qui, plus qu’une rémunération supplémentaire, s’inquiètent depuis l’annonce du dernier plan de réorganisation du risque de dévitalisation de Danone », souligne Frédéric Genevrier.
Les investisseurs ont également en tête des exemples récents de passation de pouvoirs conflictuelles, notamment chez Engie dont la directrice générale Isabelle Kocher a été remerciée avant la fin de son premier mandat.
En dépit du soutien « unanime » du conseil d’administration, la mission d’Emmanuel Faber, qui détaillera son plan stratégique le 25 mars, s’annonce toujours aussi compliquée. Celle du conseil d’administration, qui va devoir recruter un directeur général enclin à composer avec cet héritage de gouvernance, ne sera pas plus simple.
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