
Les avocats d’affaires cherchent leur équilibre

Partout, l’épidémie de Covid-19 aura rebattu les cartes. Y compris au sein des cabinets d’avocats d’affaires. D’une journée de télétravail en moyenne dans la plupart des grands cabinets, c’est tout le quotidien qu’il a fallu apprendre à gérer différemment au moment du confinement, en réalisant notamment des closings entièrement dématérialisés via des outils tels que Zoom ou Teams. Des changements d’habitudes qui n’ont pas toujours été faciles à appréhender, mais qui ont cependant souvent porté leurs fruits grâce à leur flexibilité. Et amené les avocats à repenser leur manière d’exercer sur le long terme…
Frédéric Bouvet, managing partner de Herbert Smith Freehills Paris, se souvient qu’avant le confinement, la journée de télétravail hebdomadaire proposée aux membres du cabinet ne rencontrait pas un franc succès… « Aujourd’hui, nous avons une demande claire de nos collaborateurs pour avoir davantage de télétravail, à raison d’une ou deux journées par semaine, assure-t-il. Cela se ressent jusque dans nos recrutements ; les candidats nous demandent aujourd’hui systématiquement notre politique en matière de télétravail. C’est une véritable évolution. » Un changement qui ne devrait pas poser grand problème dans la mesure où, comme le révèle l’associé gérant, « il n’y aura pas de retour à 100 % dans les bureaux ». Avant les annonces du 28 octobre, le bureau de Paris était repassé à un système 60 % en présentiel et 40 % en télétravail.
Cette méthode de travail plus agile apparaît comme une opportunité de se réinventer… Et de faire quelques économies sur l’immobilier. Bernard Lamon, associé fondateur du cabinet spécialisé en droit du numérique et de l’innovation Nouveau Monde Avocats, a même envisagé un temps de passer au « zéro locaux ». « Nous avons pris un peu de recul par rapport à cette idée, glisse-t-il. L’homme est un animal social qui a malgré tout besoin de contact humain. » Afin de trouver un équilibre entre bureaux virtuels et locaux dispendieux, la profession réfléchit actuellement à des solutions hybrides, à mi-chemin entre le présentiel, le flex office et le télétravail. « La tendance du ‘near shore’ semble notamment se dessiner, à savoir des cabinets qui vont conserver leurs bureaux mais qui vont permettre à une partie de leur équipe de travailler plus loin, dans des locaux moins coûteux, directement chez le client ou même dans des lieux partagés de type WeWork, analyse Bernard Lamon. On va également voir de plus en plus de cabinets ne garder que quelques espaces de travail restreints et organiser un système de roulement en présentiel. » Une réduction des surfaces donc, mais pas une suppression totale. « Nous avons non seulement besoin de conserver des espaces pour accueillir nos clients, mais également en interne, car même les personnes qui plébiscitent le télétravail souhaitent par ailleurs conserver des bureaux, confirme Frédéric Bouvet. Bien sûr, comme tout le monde, nous allons mener une réflexion sur notre immobilier. La difficulté va être de savoir où placer le curseur, et de trouver la bonne dynamique entre le télétravail et la nécessité de conserver un lien social. »
Maintenir le lien
Lors du déménagement du cabinet Jeantet en début d’année, Catherine Saint Geniest, co-managing partner de la structure, avait insisté sur l’importance de l’outil immobilier, selon elle partie prenante de la stratégie d’une entreprise. Le cabinet a su s’adapter aux nouveaux modes de travail, en aménageant dans ses nouveaux locaux des espaces de travail ouverts, des bulles pour s’isoler et de petits bureaux vitrés. Malgré ces anticipations, le confinement n’a, là non plus, pas été simple à gérer. « L’enjeu était de parvenir à maintenir un lien et un sentiment d’appartenance entre les équipes, explique Catherine Saint Geniest. Il a ainsi fallu rappeler certaines règles, comme le fait de se connecter régulièrement à distance et d’ouvrir les caméras. Aujourd’hui, nous proposons aux avocats comme aux salariés du cabinet un jour de télétravail par semaine. Nous avons besoin de nous voir physiquement de manière régulière, tout en facilitant la vie des uns et des autres. »
Que ce soit dans le cadre d’un télétravail qui se généralise, d’un reconfinement ou de tout autre changement organisationnel au sein des cabinets, l’une des priorités est d’accompagner et d’encadrer les équipes dans ces évolutions, en particulier les plus jeunes et les stagiaires. « Les juniors ont besoin de formation, et donc de davantage de communication et d’interactions, confirme Catherine Saint Geniest. Ce n’est pas évident à gérer à distance. C’est pourquoi il est important que l’esprit d’équipe joue, et qu’il y ait notamment plus de relais entre les ‘mids ’ et les plus jeunes. » Un point de vue partagé par Bernard Lamon, qui tient néanmoins à tempérer : « S’il est effectivement plus facile de passer une tête dans l’entrebâillement d’une porte pour poser une question, cela peut se remplacer par des outils d’échange tels que Slack ou Teams. » Pour l’avocat, ces transformations doivent cependant aller de pair avec une évolution des pratiques managériales. « Le travail à distance suppose d’éviter le micro-management, c’est à dire le ‘flicage’, souligne-t-il. On est souvent plus productifs en télétravail, mais beaucoup de professionnels du droit ont encore du mal à franchir le cap. »
NB: Cette enquête a été réalisée avant le reconfinement.
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Après la chute de Bayrou, des rassemblements improvisés dans plusieurs villes de France
Paris - Des manifestants fêtent lundi soir dans différents endroits de France la chute du gouvernement de François Bayrou devant des mairies, à l’appel du mouvement «Bloquons tout» le 10 septembre. A Nantes, quelque 300 personnes, selon la préfecture, se sont rassemblées en début de soirée, en musique et sous des pancartes marquées «Bye bye Bayrou» et «le 10/09 on bloque tout», quelques confettis survolant le regroupement. «On en profite pour échanger sur les différentes actions prévues le 10 septembre, les informations circulent», rapporte Inès Guaaybess, 30 ans, qui prévoit de se mobiliser mercredi. A Rennes, quelques centaines de personnes, pour beaucoup des étudiants, se sont réunis place de la mairie autour d’une table avec quelques bouteilles et du pain, sur fond de musique et de confettis. Les manifestants se sont ensuite rendus place Sainte-Anne au centre ville, haut lieu de la vie étudiante rennaise. «On est au bout du système» avec «une alternance droite gauche qui ne remet pas en cause le côté capitaliste libéral. Il va falloir bifurquer», assure Jérémie, ingénieur de 37 ans, venu en vélo avec son enfant. A Paris, des rassemblements étaient organisés devant plusieurs mairies d’arrondissement. Dans le 20e, au moins 200 personnes se sont réunies place Gambetta dans une ambiance bon enfant. «C’est une grande victoire ce soir! Le prochain gouvernement devrait penser aux pauvres et aux retraités. Tout est cher, tout augmente. Macron, je voudrais qu’il s’en aille, pourtant j’ai voté deux fois pour lui pour faire barrage» à l’extrême droite, explique Amina Elrhardour, 60 ans. Selon Marius, 25 ans, «il y a vraiment de la démocratie locale qui s’organise» en vue du 10 septembre, tandis que Xavier Keller, 25 ans lui aussi, dit que «le Nouveau Front populaire doit gouverner. On est capable de faire accepter un budget de gauche, je n’ai aucun doute là-dessus». A Bordeaux, plus d’une centaine de personnes, dont de très nombreux jeunes, ont applaudi et crié de joie à l’annonce de la chute du gouvernement Bayrou, au son d’une fanfare. «Il faut qu’on soit visible, on est nombreux à en avoir ras le bol et n’avoir plus confiance en Macron», lance Mathilde, trentenaire ceinturée d’une banane Confédération paysanne. Un rassemblement a également été organisé en fin d’après-midi à Pau, ville dont M. Bayrou est le maire. Le chef de l’Etat a dit vouloir nommer un nouveau Premier ministre «dans les tout prochains jours». © Agence France-Presse