
Le gouvernement veut donner sa chance aux prêts participatifs

C’est une décision logique. Le gouvernement a déposé un amendement au projet de loi de finances pour 2022 destiné à allonger le délai d’octroi des prêts participatifs (PPR) et des obligations Relance jusqu’au 31 décembre 2023. Ces outils étaient initialement censés être distribués jusqu’au 30 juin 2022. « L’allongement d’un an de cette période d’octroi permettra de garantir la disponibilité de ces instruments de financement subordonnés soutenus par l’Etat lorsque les dispositifs de soutien d’urgence mis en œuvre par le gouvernement au plus fort de la crise ne seront plus accessibles pour les entreprises », explique-t-il dans l’exposé sommaire de l’amendement. « Allonger la période d’octroi va permettre aux PME et ETI de disposer de plus de temps pour élaborer et financer leurs projets de développement à long terme. C’est une demande que la Fédération française de l’assurance avait formulée, visant à une plus forte contribution des prêts participatifs et obligations Relance au financement de la reprise économique », se félicite Franck Le Vallois, directeur général de la Fédération française de l’assurance (FFA).
En début de semaine, Bruno Le Maire avait confirmé la prolongation des prêts garantis par l’Etat (PGE) jusqu’au 30 juin 2022. Le dispositif, qui devait initialement prendre fin le 30 juin 2021 et avait déjà été repoussé de 6 mois, est de fait passé dans une autre philosophie pour accompagner la relance. Les prêts participatifs, censés prendre le relais du dispositif destiné à gérer l’urgence, se devaient donc de suivre la tendance. « Nous donnons plus de visibilité aux entreprises sur cet outil de quasi fonds propres », explique Bercy.
Simplification
La concurrence entre les deux dispositifs ne disparaîtra donc pas avant 6 mois alors que le taux des PPR n’est pas compétitif par rapport aux PGE : 4% pour les PME et 5% pour les ETI. D’autant que l’enveloppe des PGE est loin de se tarir : sur les 300 milliards d’euros prévus au début de la crise, les banques françaises n’ont distribué « que » 142,7 milliards d’euros de PGE à 692.755 entreprises au 15 octobre. Les entreprises ayant déjà contracté un PGE sont d’ailleurs éligibles au PPR dans la limite de 10% du chiffre d’affaires pour les PME et de 5% pour les ETI.
Mais les raisons du manque d’intérêt pour le dispositif - seuls quelques centaines de millions d’euros ont été distribués sur les 11 milliards d’euros mobilisés par les assureurs et la Caisse des Dépôts -, sont plus profondes. Au-delà des taux, ils sont parfois jugés complexes. « Nous avons travaillé sur la facilitation de la distribution », avance Bercy : « Du côté demande, nous allons simplifier les contrats pour faciliter la distribution, notamment au niveau de la note qui permettra d’octroyer des PPR à des groupes et des entreprises détenus par des fonds. Nous pourrons monter jusqu’à 6 ans de différé de paiement dans certains cas. » Des modifications saluées par Franck Le Vallois : « Les ajustements apportés par les investisseurs aux prêts participatifs Relance permettent à un plus grand nombre de PME et ETI d’être éligibles au dispositif, ce qui est une bonne chose pour la relance économique. »
Au niveau comptable, ils sont considérés comme des instruments de dette par le droit en matière d’insolvabilité mais aussi par l’Autorité des normes comptables, bien qu’assimilés à des quasi-fonds propres. « Il n’y aura pas de changement en matière de comptabilité car le cadre européen s’impose à nous. Il est toutefois important de distinguer analyse comptable et analyse financière », défend Bercy. « C’est un produit complémentaire à ceux existants en matière de fonds propres afin de soutenir la réalisation des projets d’investissements, notamment de transition énergétique et numérique, indispensables pour le développement des PME et ETI », abonde la Fédération bancaire française.
Accord de la Commission européenne
Les banques sont aussi pointées du doigt. Déjà peu rentables pour elles, les prêts participatifs sont aussi des outils inhabituels à distribuer dans leurs réseaux. Pas de quoi motiver même les plus volontaires. « Il y a eu un gros travail avec les banques. Nous allons diffuser un document de communication sur ces prêts participatifs centrés sur des études de cas », rassure Bercy. Un document, qui rassemble les cas types de différentes banques à travers plusieurs exemples, existe déjà. Il pourrait être actualisé, relate une source à L’Agefi.
La prolongation reste toutefois conditionnée à l’accord de la Commission européenne sur le régime de garantis d’Etat autorisé en avril 2021 pour une période allant jusqu’en juin 2022. « Le 17 novembre, le Commission européenne doit publier le cadre temporaire révisé du régime des garanties d’Etat. A ce titre, elle envisage la prolongation de certaines actions dans le cadre temporaire existant et envisage de pouvoir le compléter par une nouvelle section d’outils davantage tournés vers la relance dans laquelle pourrait s’intégrer les prêts participatifs et les obligations Relance », détaille Bercy.
Lancement des obligations Relance
Deuxième outil consacré à la relance dans le cadre du régime de garanties d’Etat autorisé par la Commission, les obligations Relance avaient bien besoin de cette prolongation. Ces obligations subordonnées assimilables à des quasi-fonds propres et remboursables au bout de huit ans n’ont toujours pas été lancées. « Les obligations Relance sont en phase de finalisation. Le closing du fonds aura lieu dans les prochains jours », informe Bercy, qui croit au dispositif : « C’est un outil proche des PPR mais qui vise sans doute plus les grosses PME ou les ETI plus familières de ce genre d’outil encore plus proche des fonds propre car à remboursement in fine. »
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