Priip menace le marché retail des obligations d’entreprise

Une incertitude sur le texte pousse les émetteurs à délaisser le marché. L’AFME dénonce une diminution du volume de 20 à 25% depuis janvier.
Jean Comte, à Bruxelles

Cela ressemble à un dommage collatéral. Selon des données de l’Association pour les marchés financiers en Europe (AFME), le règlement Priip aurait causé une diminution substantielle - entre 20 et 25% - du marché retail des émissions d’obligations d’entreprises depuis janvier 2018.

En cause, une incertitude sur le champ d’application de ce texte. Ce dernier oblige les distributeurs de certains produits financiers à rédiger des Document d’informations clés (DIC) à destination des consommateurs. Les produits visés sont ceux relatifs à l’assurance ou ceux dont la performance dépend des fluctuations des marchés. Problème: la rédaction très large du texte et des documents de communication qui l’accompagnent laisse penser que toutes les obligations d’entreprise qui comportent une part - même faible - de dérivés doivent être concernées - soit environ 20% de ces obligations selon certaines estimations. Ces émetteurs, peu enclins à rédiger un DIC en plus du prospectus qu’ils sont déjà censés fournir, se désengagent donc du marché de détail.

La Commission européenne ne veut pas intervenir

Au-delà du chiffre avancé par l’AFME, l’impact varie fortement d’un pays à l’autre. L’Italie serait fortement touchée, avec une diminution de 40% du marché selon une source au fait du sujet. «Selon les retours que nous avons obtenus, l’impact est surtout négatif en Allemagne, en Italie, en Grèce, et - dans une moindre mesure - en France», résume Andrew Brooke, directeur à l’AFME - pour qui «cela reste un problème pour tous les pays de l’UE».

Le problème a été porté à l’attention de la Commission européenne fin 2017 par l’AFME et par EuropeanIssuers - le lobby des entreprises cotées en bourse. Selon eux, le problème peut être réglé via une communication spécifique de la Commission européenne, sans rouvrir le règlement Priip. «Il ne s’agit pas d’amender le niveau 1 (i.e, le texte juridique), seulement de clarifier l’intention du législateur à ce niveau», souligne Pedro Pinto, en charge du plaidoyer à l’AFME. Mais, de sources concordantes, la Commission ne compte absolument pas rouvrir Priip - même pas via une communication. Ses services ont répondu que c’est aux émetteurs d’apprécier ou non le besoin d’un DIC - «au cas par cas» précise une source proche du dossier à L’Agefi.

«Le dossier Priip est explosif, et la Commission ne veut surtout pas le rouvrir», résume la source précédemment citée. «Surtout en fin de mandature».

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