Matières premières : l’Europe cherche la voie pour réduire ses dépendances

La Commission européenne a identifié trente «matières premières critiques», à la fois clés sur le plan économique et présentant un risque élevé de pénurie d’approvisionnement.
Clément Solal, à Bruxelles
Réunion informelle des ministres européens de l'Industrie et du Marché intérieur à Lens les 31 janvier et 1er février 2022.
Réunion informelle des ministres européens de l'Industrie et du Marché intérieur à Lens les 31 janvier et 1er février 2022.  -  Capture écran European Union.

Comment réduire les fortes dépendances de l’Union européenne (UE) dans le domaine des matières premières ? Telle est la question très complexe à laquelle les ministres chargés de l’Industrie et du Marché intérieur se sont efforcés de trouver des réponses communes lundi et mardi à Lens lors d’une réunion informelle organisée par la présidence française du Conseil de l’UE. Leurs réflexions ont en particulier porté sur « la sécurisation de l’approvisionnement de l’Europe » en métaux et terres rares. Un sujet primordial pour développer la fameuse « autonomie stratégique » du Vieux Continent.

Dans les années à venir, les dépendances européennes sont en effet susceptibles de « créer des difficultés d’approvisionnement menaçant notre capacité à verdir et numériser notre économie », alerte une note de la présidence française. Fournies très majoritairement par la Chine, les « terres rares » sont ainsi utilisées dans la confection de batteries de voitures électriques, de puces de smartphones, d’écrans d’ordinateurs, de radars mais également de panneaux photovoltaïques, ou encore d’éoliennes. Produits pour lesquels la demande est vouée à exploser ces prochaines années.

Autre exemple emblématique : le cobalt, dont la production mondiale est effectuée à 60% en République démocratique du Congo, alors même que les besoins européens pourraient être multipliés par 15 d’ici 2050 pour les seules batteries électriques de véhicules. Au total, 30 matières premières sont identifiées comme « critiques » par la Commission européenne: elles sont en même temps les plus importantes sur le plan économique et celles qui présentent un risque élevé de pénurie d’approvisionnement.

Les solutions à l’étude

Parmi les solutions étudiées par les ministres : renforcer les capacités de recyclage de métaux critiques des industries du continent, recourir à des politiques de stockages stratégiques au niveau européen et, surtout, diversifier les approvisionnements par la signature de nouveaux « partenariats structurants » avec des « Etats tiers clés en Afrique, avec l’Inde, l’Indonésie ou encore l’Australie ». Paris propose ici la création d’un nouvel organisme européen responsable à la fois d’établir une « cartographie des ressources », et d’effectuer des investissements stratégiques et des achats de matières premières à l’étranger.

Les discussions ont enfin porté sur les possibilités d’extraction et de production de ces matières premières critiques sur le territoire européen, et sur les modalités de leur financement. Lancée par la Commission en 2020, l’Alliance européenne pour les matières premières (Erma) estime par exemple que l’Europe pourrait, grâce à ses propres réserves inexploitées de terres rares, couvrir 20% de ses besoins domestiques sur ces matières d’ici 2030. L’alliance plaide pour le lancement d’un projet européen important d’intérêt commun (PIIEC) sur le sujet, autorisant les Etats à subventionner des projets industriels en dérogeant aux règles sur les aides d’Etats. Problème : l’extraction et le raffinage de ces éléments sont réputés toxiques pour l’environnement.

« L’acceptabilité sociale de l’extraction reste un enjeu sensible, qui se traduit en des procédures d’approbation des projets particulièrement longues, reconnaît la présidence française de l’UE. Ce risque peut néanmoins se transformer en opportunité, le respect de hautes normes sociales et environnementales étant un avantage comparatif des produits miniers européens », conclut en même temps la note. Cette première discussion avait pour objectif « de partager le diagnostic » et de «construire collectivement une feuille de route qui pourra ensuite être formalisée au niveau du Conseil compétitivité formel de Bruxelles » fin février, a indiqué la ministre française chargée de l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher. Le chemin est encore long.

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