
L’AMF ajuste à la marge ses mesures sur les offres publiques
Moins d’un an après avoir lancé le débat sur le retrait obligatoire et l’expertise indépendante, dans le sillage de la loi Pacte abaissant de 95% à 90% le seuil du retrait obligatoire, l’Autorité des marchés financiers (AMF) vient de modifier sa réglementation. Le groupe de travail ad hoc de l’AMF a dévoilé ses propositions en septembre dernier et les a soumises à consultation. Le régulateur vient d’en dévoiler la synthèse des réponses. Les modifications adoptées ont «pour objectif de renforcer le rôle des organes sociaux, de mieux protéger et mieux informer les actionnaires minoritaires et de renforcer et mieux garantir l’indépendance et la transparence de l’expertise indépendante», précise Marc Antao, à la direction des émetteurs de l’AMF. Le gendarme boursier n’a pas opéré de modification majeure par rapport au texte soumis à consultation, les différentes opinions s’étant déjà exprimées au sein du large panel du groupe de travail.
Indépendance des administrateurs du comité ad hoc ?
Néanmoins, l’AMF s’est prononcé sur certaines demandes. Pour la composition du comité ad hoc chargé de superviser les travaux de l’expert indépendant, certains répondants voulaient y inclure des administrateurs non indépendants mais «non-conflictés». L’AMF n’a pas voulu entrer dans ce débat qui nécessiterait de définir juridiquement cette notion de «non-conflicté» et a décidé de maintenir l’obligation d’administrateurs indépendants. Si un comité ad hoc comprenant une majorité d’administrateurs indépendants ne peut être constitué, l’expert pressenti doit être soumis à l’AMF qui peut s’opposer à sa désignation. L’expert est rémunéré par la société visée.
En cas d’offre de «fermeture» (quand l’initiateur détient déjà plus de 50% du capital et des droits de vote), le rapport de l’expert indépendant et l’avis motivé du conseil de la société cible seront émis au plus tôt 15 jours de négociations après le dépôt de la note d’information de l’initiateur. Certains répondants souhaitaient étendre cette disjonction des notes pour les offres de prise de contrôle, mais l’AMF a estimé que le point d’équilibre trouvé par le groupe de travail était satisfaisant.
Si des minoritaires souhaitent que le rapport d’expertise reprenne tous leurs arguments, «nous demandons à l’expert indépendant de se limiter aux principaux arguments qui concernent sa mission, précise Marc Antao. L’AMF, qui reçoit aussi les commentaires des minoritaires, veillera à ce que l’expert indépendant ne laisse pas de côté des remarques pertinentes».
L’absence de plan d’affaires doit être justifiée
Face aux nombreux retours sur le contenu de l’avis motivé de la société cible, l’AMF a ajusté sa proposition initiale. «Quand aucun plan d’affaires, voire aucune donnée prévisionnelle pertinente, ne sont transmis à l’expert, l’avis doit expliquer pourquoi aucun de ces éléments n’a été donné à l’expert», explique Marc Antao. Par ailleurs, malgré la demande de plusieurs cabinets d’avocats, l’AMF a maintenu sa proposition exigeant que l’initiateur d’une offre de fermeture précise ses intentions en matière de stratégie et la prenne en compte dans la valorisation de la société cible.
Naturellement, les critères de prix – par rapport à l’actif net comptable, à la moyenne des cours de bourse, et à toute opération significative – ont été commentés. «La règle du ‘comply or explain’ a été maintenue quand ces références de prix sont écartées, poursuit Marc Antao. Cela nous semble un bon équilibre, et nous veillerons aux explications fournies. La référence au cours de bourse a été réduite à 180 jours, mais celui des 18 mois sur les opérations significatives a été maintenu, alors que certains intervenants voulaient le réduire à 12 mois. Ces dispositions sont applicables pour toutes les offres dans laquelle la société visée est contrôlée à plus de 50%, puisque ces offres précèdent souvent un retrait obligatoire ».
En revanche, les propositions relatives à l’expertise indépendante «ont suscité relativement peu de réactions, signe de l’efficacité du débat mené au sein du groupe de travail, poursuit Marc Antao. L’extension du délai de 15 à 20 jours pour la rédaction du rapport de l’expert est bien acceptée. Ce délai peut être réduit pour une mission complémentaire. Ce délai de vingt jours court à compter de la réception des principaux documents que l’expert estime nécessaires pour sa mission».
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RDC: à Ntoyo, dans le Nord-Kivu, les survivants des massacres commis par les ADF enterrent leurs morts
Ntoyo - Lundi soir, les habitants de Ntoyo, un village de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), s’apprêtaient à assister à des funérailles quand une colonne d’hommes armés a surgi de la forêt. «Parmi eux, il y avait de très jeunes soldats», raconte à l’AFP Jean-Claude Mumbere, 16 ans, rescapé d’un des deux massacres commis par les rebelles ADF (Forces démocratiques alliées) dans la nuit de lundi à mardi, l’un à Ntoyo et l’autre dans un village distant d’une centaine de kilomètres. Le bilan de ces attaques, au moins 89 tués selon des sources locales et sécuritaires, a peu de précédent dans une région pourtant en proie à une instabilité chronique, victime depuis trente ans de multiples groupes armés et conflits. Les ADF, groupe armé né en Ouganda et qui a prêté allégeance à l’Etat islamique, est connu pour une extrême de violence à l'égard des civils. «Ils étaient nombreux et parlaient une langue que je ne comprenais pas. De loin, ils portaient des tenues qui ressemblaient à celles des militaires», se souvient le jeune homme, venu assister mercredi aux funérailles de sa soeur, l’une des victimes de ce nouveau massacre perpétré dans la province du Nord-Kivu. Plus de 170 civils ont été tués par les ADF depuis juillet dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, selon un décompte de l’AFP. Plus au sud, malgré les pourparlers de paix de ces derniers mois, des affrontements se poursuivent entre l’armée congolaise (FARDC) et affiliés, et le groupe armé antigouvernemental M23, soutenu par le Rwanda et son armée, qui s’est emparé des grandes villes de Goma et de Bukavu. A Ntoyo, Didas Kakule, 56 ans, a été réveillé en sursaut par les premiers coups de feu. Il dit avoir fui avec femmes et enfant à travers les bananeraies pour se réfugier dans la forêt voisine, avec d’autres habitants. Tapis dans l’obscurité, les survivants n’ont pu que contempler leurs maisons consumées par les flammes. «Les coups de feu ont retenti longtemps. Ma maison a été incendiée, ainsi que le véhicule qui était garé chez moi. Chez nous, heureusement, personne n’a été tué», dit Didas Kakule. Jean-Claude Mumbere, lui, a été touché par une balle pendant sa fuite. «Ce n’est qu’après m'être caché dans la forêt que j’ai réalisé que je saignais», affirme-t-il. «Inaction» Mercredi, Ntoyo, 2.500 habitants, n'était plus qu’un village fantôme, et la plupart des survivants partis se réfugier dans l’agglomération minière voisine de Manguredjipa. Une dizaine de corps étaient encore étendus sous des draps ou des bâches, battus par une forte pluie. Des volontaires ont creusé des tombes, assistés par des jeunes des environs, et planté 25 croix de bois dans la terre humide. Une partie des dépouilles avait déjà été emportée par les familles, les cercueils ficelés à la hâte sur des motos. Parmi les quelques proches de victimes venus aux funérailles, Anita Kavugho, en larmes devant la tombe de son oncle. Il est mort "à cause de l’inaction des autorités qui ne réagissent pas aux alertes», peste la jeune femmme, une fleur à la main. Des pickups de l’armée congolaise stationnent non loin, devant un véhicule calciné. Le déploiement de l’armée ougandaise (UPDF) aux côtés de l’armée congolaise dans le nord-est de la RDC depuis 2021 n’a pas permis de mettre fin aux multiples exactions des ADF, groupe formé à l’origine d’anciens rebelles ougandais. Quatre militaires congolais étaient présents à Ntoyo au moment de l’attaque. Les renforts stationnés à environ 7 km à Manguredjipa sont arrivés trop tard. «C’est leur faillite, on signale aux militaires que les assaillants sont tout près, et ils n’arrivent pas à intervenir», lâche Didas Kakule, amer. Cette énième tuerie risque d’aggraver la «fissure» entre l’armée et la population, estime Samuel Kakule, président de la société civile de Bapere. Les ADF «se dispersent en petits groupes pour attaquer nos arrières», répond le lieutenant Marc Elongo, porte-parole de l’armée congolaise dans la région, présent à Ntoyo mercredi. Quelques jours auparavant, les forces ougandaises et congolaises s'étaient emparées d’un bastion ADF dans le secteur et avaient libéré plusieurs otages du groupe, selon l’armée. Mais comme souvent, les ADF se sont dispersés dans la forêt, et ont frappé ailleurs. Une stratégie pour attirer les militaires loin de ses bases, selon des sources sécuritaires. © Agence France-Presse