La Turquie profite d’une accalmie pour assouplir sa politique monétaire

Si la baisse des taux directeurs de 50 pb décidée hier reste modeste, elle remet néanmoins en cause la politique de lutte contre l’inflation
Patrick Aussannaire

La période d’accalmie sur les marchés émergents permet à la Turquie de lâcher du lest. La banque centrale (CBRT) a surpris hier en relâchant à hauteur de 50 pb l’étau imposé à son taux directeur en janvier, pour le ramener à 9,5%. Il demeure néanmoins supérieur de 175 pb à ses niveaux d’avant janvier.

En outre, les taux d’emprunts au jour le jour, mais surtout les taux de prêts ont été laissés inchangés à 8% et 12%. En maintenant le taux de prêts à 12% et celui pour les «primary dealers» à 11,5%, la CBRT a élargi l’intervalle de fluctuation de ses taux effectifs en conservant la possibilité de resserrer ses conditions de prêts à 12% si nécessaire.

Depuis début avril, elle a d’ailleurs assoupli ses conditions de liquidités, ce qui avait permis de ramener le taux de dépôt au jour le jour de 10,88% lundi à 8,73% hier, alors que le rendement des obligations d’Etat à 10 ans en devise locale a chuté d’un point haut de 11,01% atteint le 24 mars, à 8,84% hier. Il est revenu ainsi sur ses niveaux de novembre 2013. Les investisseurs se sont même rués sur les obligations adjugées en début de semaine par l’Etat qui a levé 7 milliards de lires, avec un ratio de couverture de 6,8 sur les titres à 2 ans, et 5,3 sur les obligations indexées à 10 ans.

Le resserrement monétaire opéré en urgence en janvier a permis à la lire de se renchérir contre dollar de 12% depuis le 24 janvier et de 7,5% depuis un mois. De quoi permettre une baisse du déficit courant à 60 milliards de dollars sur douze mois glissants fin mars, contre 62,4 milliards en février. Si la CBRT a justifié sa décision par une amélioration «des primes de risque sur l’ensemble des maturités», BNP Paribas CIB, seule à avoir anticipé cet assouplissement, met néanmoins en avant des raisons «plus politiques que macroéconomiques» qui remettent en cause la crédibilité de sa politique ciblée sur l’inflation.

Malgré la hausse récente de la lire, l’inflation a atteint 9,4% en avril, un niveau déjà près de deux fois supérieur à l’objectif de la CBRT. Avec la baisse des taux directeurs décidée hier, les taux d’intérêt réels sont ainsi proches de zéro, et pourraient s’enfoncer en territoire négatif si l’inflation accélère à 10% en mai, comme le prévoit BNP Paribas. A titre de comparaison, le Brésil a également mené une politique monétaire restrictive avec des taux directeurs à 11%, malgré des taux réels autour de 450 pb.

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