La Turquie n’arrive pas à enrayer la dévalorisation de la livre

La devise au plus bas, la banque centrale turque est de nouveau intervenue sur le marché hier. Mais ses réserves ne sont pas illimitées
Olivier Pinaud

La Turquie jette toutes ses forces dans la bataille pour protéger sa monnaie. La banque centrale a injecté plus de 1,1 milliard de dollars supplémentaires dans le système monétaire hier pour tenter d’enrayer la chute de la livre. Celle-ci avait atteint quelques heures auparavant un nouveau plus bas à 1,995 pour un dollar, un niveau inconnu depuis 1981. Elle s’est légèrement redressée après l’annonce de la mesure. Il y a dix jours, la banque centrale turque avait déjà porté la borne haute des taux d’emprunts au jour le jour à 7,75%, soit un resserrement de 50 points de base. Cette mesure suivait une précédente hausse de 75 pb du taux plancher en juillet.

Malgré cette mobilisation, la banque centrale de Turquie peine à convaincre les cambistes. Elle a déjà mobilisé près de 9,5 milliards de dollars depuis le mois de juin pour soutenir sa monnaie. En vain. La monnaie n’a jamais été aussi faible. Elle a perdu près de 12% depuis le début de l’année et 7% au cours des seuls trois derniers mois. Les marchés savent que la banque centrale turque ne dispose pas de moyens illimités pour protéger la livre. Ses réserves de changes s’élèvent à 109 milliards de dollars, trois fois moins que son homologue brésilienne qui devrait avoir mobilisé près de 100 milliards de dollars rien que cette année pour enrayer la dévalorisation du réal. Signe de ces doutes: les contrats de protection contre le risque de défaut de la dette souveraine turque sont montés hier à leur plus haut niveau de ces 14 derniers mois.

Comme les autres devises émergentes, la livre turque est une victime collatérale de la politique de la Réserve fédérale américaine. Après avoir profité indirectement pendant des années de l’afflux de liquidités généré par le programme d’assouplissement quantitatif de la Fed, les marchés émergents souffrent, en sens inverse, de son ralentissement annoncé. Le mouvement est amplifié par les maux propres à la Turquie, symbolisés par une balance des paiements déficitaire de plus de 7%. Le ministre turc du Développement a promis de ramener le taux sous les 7% d’ici à la fin de l’année, mais celui-ci resterait le plus élevé de tous les pays émergents de la zone Europe-Moyen Orient-Afrique. Le double resserrement des taux appliqué cet été par la banque centrale risque aussi de ralentir un peu plus la croissance du PIB, tombée à 2,2% en 2012 contre 8% en 2011. Elle est attendue à 3% cette année.

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