La justice suisse perturbe le modèle économique des banques privées

Le Tribunal fédéral a étendu l’obligation de rétrocession aux clients des commissions versées par les filiales de gestion des banques privées
Antoine Landrot

Début novembre, UBS faisait connaître son choix de sacrifier une partie de sa banque d’investissement pour préserver sa banque privée. Mais l’économie de son métier historique est également sur la sellette en Suisse.

Le Tribunal fédéral – dans une décision qui devrait affecter l’ensemble de la profession – a généralisé l’obligation pour les gérants de fortune de restituer à leurs clients les commissions de rétrocession dont ils ont pu bénéficier de la part d’une société de gestion, même si cette commission provient d’une filiale.

Il est d’usage qu’une société de gestion rende une partie du prix payé par la banque privée après l’achat de produits de placements pour le compte de ses clients, en signe de reconnaissance. La plus haute cour du pays vient donc de bouleverser les rapports du secteur en deux décisions simultanées. Elle a d’une part rejeté un recours déposé par UBS suite à la décision du 31 janvier de la Cour suprême du canton de Zurich permettant à un client d’exiger de la banque qui gère son portefeuille la restitution des commissions reçues des fournisseurs tiers. Surtout, le tribunal a confirmé le recours d’un client qui exigeait qu’UBS lui restitue les commissions versées par des sociétés liées à la banque.

UBS a déclaré qu’elle évaluerait les réclamations de chaque client au cas par cas. Mais la position du tribunal fédéral dépasse largement UBS et affecte l’ensemble de la gestion de fortune en Suisse. Les rétrocessions – par le risque de conflit d’intérêts qu’elles portent – font également l’objet d’intenses débats dans le cadre de la révision de la directive sur les marchés d’instruments financiers (MIF 2), même si le sujet a été récemment retiré des discussions au Parlement européen.

Fitch a réagi vendredi dernier. «Le reversement des commissions de rétrocession aux clients par les banques qui gèrent leurs actifs pourrait conduire à des provisions exceptionnelles importantes si la mesure était appliquée rétrospectivement», indique l’agence de notation dans sa note. «Afin de compenser cette perte de revenu, les banques pourraient modifier la structure de leurs frais de gestion afin de maintenir leurs marges brutes – lesquelles sont comprises généralement entre 90 et 110 points de base [0,9% et 1,1%] des actifs sous gestion», ajoute-t-elle, tout en précisant que ces remboursements amélioreront la transparence pour les clients des banques privées en Suisse.

Un évènement L’AGEFI

Plus d'articles du même thème

ETF à la Une

Contenu de nos partenaires

A lire sur ...