Gaz et pétrole de schiste, une révolution encore loin d’être universelle

La diffusion d’une énergie moins chère devrait rester progressive. Les infrastructures nécessaires sont coûteuses et suscitent de vifs débats
S. Berthelet et A. Bonneviot, SMA Gestion

Le développement du pétrole et du gaz de schiste depuis 2005 a bouleversé la carte énergétique nord-américaine. Cette montée en puissance a été mal anticipée mais elle est désormais incontournable: les importations américaines de brut ont baissé de 27% par rapport à 2006.

Les retombées se diffusent lentement toutefois. Le club des «heureux bénéficiaires» est restreint. Les raffineurs, chimistes et autres transformateurs américains situés à proximité des nouveaux gisements ont retrouvé une compétitivité importante et une forte croissance. Mais beaucoup d’acteurs et de consommateurs, notamment ceux situés sur la côte Est, n’en tirent pas profit car les nouveaux bassins de production sont éloignés des circuits logistiques historiques. Faute d’infrastructures, les consommateurs internationaux attendent toujours de pouvoir importer du gaz bon marché sous forme de LNG. Les raffineurs européens sont encore plus mal lotis puisque cette énergie moins chère reste hors de leur portée et les produits raffinés américains exportés sont devenus plus compétitifs.

Un goulet d’étranglement pourrait disparaître avec l’abolition de la loi américaine interdisant l’exportation de pétrole brut. Les producteurs américains, pris en tenaille entre une hausse de la production domestique et un manque de débouché à l’export, œuvrent en ce sens.

Mais même en cas d’évolution législative, la diffusion d’une énergie moins chère devrait rester progressive. Les infrastructures nécessaires sont coûteuses et suscitent de vifs débats. Les pipelines sont l’objet d’âpres luttes politiques et divisent la société civile entre partisans d’une énergie moins chère et partisans d’un environnement mieux préservé. Le transport par rail, solution techniquement intéressante, a aussi connu de récentes avanies (nombreux accidents en 2013). Enfin, la production non conventionnelle nécessite beaucoup de capital en raison d’un taux de déclin extrêmement rapide : un puits a une durée de production de deux ans.

En conclusion, si les «nouveaux hydrocarbures» américains ont changé la donne, la portée de celle-ci dans le temps et dans l’espace doit être appréciée prudemment. Compte tenu des contraintes techniques, politiques et économiques, l’avènement d’une nouvelle ère d’énergie universellement peu chère est peut-être un peu moins proche que ce que les chiffres récents laissent supposer.

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