Claire Bourgeois optimise la gestion ALM chez Groupama AM

L’équipe a affiné ses expertises en partant des difficultés liées la crise de la zone euro.
Fabrice Anselmi
Claire Bourgeois optimise la gestion ALM chez Groupama AM
 -  Pierre Chiquelin

« Une énergie incroyable » avait marqué Claire Bourgeois lors de son stage d’école de commerce à la Bourse de Chicago, en 1987. C’est aussi ce que dégage la directrice des investissements ALM (actifs-passifs) chez Groupama AM. Entre-temps, elle a enchaîné presque tous les métiers financiers : market maker en options (devises et actions), trader pour compte propre chez CPR, gérante d’obligations internationales puis de fonds d’allocations crédit garantis (CPPI)… En 2007, elle rejoint Groupama AM, forte de ces expériences « toujours utiles pour comprendre les comportements, anticiper les réactions de certains acteurs à court terme », reconnaît-elle.

Crises…

Elle arrive pour diriger les équipes ALM et crédit. Et si Groupama, peu exposé aux produits structurés, passe plutôt bien la période 2007-2008, l’assureur est ensuite touché par la crise de la zone euro. Le plan de réduction des risques alors décidé amène la gestion ALM de sa filiale à collaborer de près avec l’équipe d’investissement de Groupama pour mieux en comprendre les contraintes comptables et réglementaires, travailler sur des couvertures sur actions – sans figer les pertes via une vente, des diversifications géographiques ou sectorielles. « Si on dit à un gérant de limiter son ‘turnover’ sur les actions, il se sent bridé ; si on lui explique qu’il peut bénéficier des mesures transitoires de Solvabilité 2 et diminuer la consommation de capital prudentiel (SCR), il se sent plus efficace », résume Claire Bourgeois. Depuis, elle a développé autour de « doubles profils » gestion et assurance cette équipe, réorganisée en trois pôles lors de la séparation avec la gestion d’OPC (Gaëlle Mallejac) en 2015 : la gestion des mandats pour le groupe en France (46 milliards d’euros d’encours) ; la gestion des mandats pour les tiers, filiales et caisses régionales ou assurances et mutuelles externes (11 milliards) ; un pôle coordination, point d’entrée des investisseurs pour la création de nouvelles solutions et pour le reporting.

La séparation des mandats par taille, avec une compréhension optimale des objectifs et contraintes clients, a permis d’aller plus loin dans la recherche de performances financières et comptables. « En intégrant la profondeur de marché, il est possible d’aller chercher des primes d’illiquidité, de faire des arbitrages de courbes, de secteurs, de titres, d’émetteurs ou de géographies, à risques constants pour minimiser le ‘vieillissement’ du portefeuille », explique Alexandre Piazza, qui dirige les 4 gérants dédiés aux tiers. Son offre de « portage optimisé » est dynamique et adaptée aux éléments de passif, avec l’aide de l’ingénierie financière (Emmanuel Paty) pour améliorer le revenu comptable grâce à des revenus obligataires supplémentaires. Cette stratégie est complétée par la création d’un OPC cristallisant d’autres plus-values moins « traditionnelles » : avec des swaps sur inflation pour ramener des obligations indexées à taux fixe, des swaps de change pour reformater des titres en devises étrangères moins chers que l’équivalent en euro, des produits dérivés par exemple pour couvrir les actions, etc. Cette poche de diversification qui tient en une ligne (en valeur de marché) nécessiterait un traitement comptable plus complexe (selon les instruments) autrement.

Les 5 gérants dédiés au groupe, dirigés par Hamid Louaheb, traitent, eux, des montants plus importants, et des produits structurés complexes, sur lesquels ils ont développé une expertise, en menant une revue régulière de l’offre (avec l’ingénierie financière et le contrôle des risques) pour les filtrer, en évaluer le coût, accompagner le client sur l’enregistrement comptable, les intégrer en vue d’améliorer la performance et/ou la couverture. Ils peuvent par exemple sécuriser un rendement sur un risque souverain et maîtriser la volatilité de la marge de solvabilité via un « spread lock », ou proposer d’autres solutions bancaires de prêts de titres collatéralisés afin d’augmenter les revenus obligataires.

Toute l’équipe suit un unique processus d’allocation remis à jour trimestriellement dans le cadre du processus de gouvernance du client. Chaque mandat part d’un scénario macro-économique à long terme, élaboré par les équipes de Christophe Morel, auquel s’ajoute une revue des valorisations quantitatives pour toutes les classes d’actifs, sur la base de prix théoriques visés à deux ans : une fois ces hypothèses validées par Claire Bourgeois et Gaëlle Mallejac, l’équipe travaille avec l’ingénierie financière pour proposer une allocation « sur mesure » en titres vifs et en parts d’OPC.

… et rapprochements

Le pôle coordination, dirigé par Delphine Poupon (4 professionnels), apporte le soutien nécessaire pour les reportings prudentiels et réglementaires ou les comptes trimestriels, facilités depuis l’intégration d’un système informatique « front-to-back office » avec base de données unique. « Cette organisation permet d’apporter un service adapté à chaque client, entre les assureurs-vie, non vie, selon les différentes juridictions, etc. », confirme Delphine Poupon, évoquant ce mandat pour une compagnie portugaise filiale d’un grand groupe chinois, deux entités qui n’ont pas les mêmes contraintes, notamment de solvabilité. Avec des reportings « clés en mains » pour les clients (en général plus petits) qui donnent accès à leur passif, d’autres uniquement sur les contributions au SCR marché des solutions proposées sinon. « Nous travaillons aussi avec l’ingénierie financière pour modéliser les chocs futurs liés à ces allocations de long terme et voir l’impact sur la marge de solvabilité. Et pour mesurer la performance des mandats, calculée à contraintes égales grâce à un algorithme spécifique », poursuit Delphine Poupon.

En lien avec toutes les fonctions support, elle participe à la pédagogie sur les sujets techniques : en externe, à partir de rencontres trimestrielles organisées pour les directions financières ou générales, et en interne auprès des équipes moins en contact avec les clients. Les sujets ne manquent pas : « Aujourd’hui, l’intégration automatique des critères ESG avec l’aide de notre recherche (Marie-Pierre Peillon) dans le respect de l’article 173, et la mise en place de la norme IFRS 9 (en 2021 pour les assureurs) qui consiste à minimiser la volatilité du résultat liée à la gestion ALM », ajoute Claire Bourgeois. « Il est temps de faire connaître ce savoir-faire en vue de devenir un acteur incontournable de la gestion assurantielle en Europe », conclut Olivier Le Braz, arrivé en 2018 pour développer l’offre à destination des clients externes.


Le parcours de Claire Bourgeois, directrice des investissements ALM

EM Lyon, DESS marchés financiers Dauphine.

  • 1990 : market maker, Crédit Lyonnais.
  • 1994 : trader pour compte propre, CPR.
  • 1999 : gérante puis responsable gestion obligations internationales, Ixis AM.
  • 2005 : gérante chez BNP Paribas AM.
  • 2007 : responsable gestion ALM, puis directrice adjointe solutions d’investissement, Groupama AM.
  • 2015 : directrice des investissements ALM.
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