
Paris fait du reporting extra-financier une priorité européenne

Ce ne sont pas des mots anodins. La directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui vise à refondre la directive sur le reporting non financier des entreprises (NFRD), sera «une des priorités de la présidence française de l’Union Européenne», a déclaré ce jeudi Olivia Grégoire, secrétaire d’Etat chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable, dans une intervention filmée lors du Forum ESG organisé par L’Agefi.
Cette directive pourrait ressembler à un simple texte technique, mais elle « dessine les contours du modèle capitalistique européen », assure la ministre. « Nous visons une rédaction des actes délégués au deuxième semestre 2022, une transposition dans les Etats membres dans le courant 2023 et une mise en œuvre à compter de 2024 », précise Olivia Grégoire.
L’Europe, au même titre que les Etats-Unis et l’Asie, va se doter de sa propre norme concernant le reporting. Or, cette ambition européenne n’était pas acquise il y a encore quelques mois. « Nous avons fait des pas de géant en un an. L’Ensemble des Etats membres est aujourd’hui convaincu qu’il faut que l’Europe se dote de sa propre norme », se félicite Olivia Grégoire.
Point d’accès unique
Ces normes, pour être efficaces, doivent aussi être accompagnées d’outils. C’est là qu’entre en jeu la collecte et la gestion des données, véritable pierre angulaire du reporting extra financier. Sur ce point, Olivia Grégoire a dévoilé qu’une proposition législative sera présentée par la Commission européenne fin novembre pour créer un point d’accès unique des données en Europe. « Ce point d’accès unique ne doit pas remplacer les registres nationaux mais il doit les faire converger », précise la ministre. Une précision importante, puisque la France est, par exemple, d’ores et déjà dotée de sa propre plateforme.
Ces progrès de l’Europe sur les normes extra-financières sont notables. Il n’empêche qu’ils sont sous surveillance, non seulement des politiques, mais aussi des représentants de la société civile. Alexandre Holroyd, député LREM, auteur du rapport sur la finance verte de juillet 2020, et réagissant aux propos de la ministre, a souligné que « ce reporting n’est pas un objectif. C’est un outil ». Rien ne servirait en effet de disposer d’un très bel outil si rien n’est fait pour faire progresser les comportements, et notamment ceux visant à décarboner l’économie.
« Nous sommes dans un contexte d’urgence climatique. L’idée que le reporting seul va aider à décarboner l’économie ne fonctionne pas », a estimé pour sa part Lucie Pinson, fondatrice et directrice générale de Reclaim Finance, lors du Forum ESG de L’Agefi. Celle-ci prône une approche plus radicale, visant à pénaliser les entreprises qui n’oeuvrent pas dans le sens de la décarbonation. Si l’Europe avance sur ces sujet, les discussions ne font que commencer.
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Le procès de Bolsonaro « n'était pas une chasse aux sorcières », répond Lula à Trump
Brasilia - Le procès de l’ancien président d’extrême droite brésilien Jair Bolsonaro «n'était pas une chasse aux sorcières», a assuré dimanche l’actuel chef de l’État brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, en réponse aux critiques de son homologue américain Donald Trump. Dans sa première réaction après la condamnation à 27 ans de prison de son opposant, Lula s’est dit «fier de la Cour suprême du Brésil pour sa décision historique» et a affirmé, dans une tribune publiée par le quotidien américain New York Times, que «ce n'était pas une chasse aux sorcières». Le président Trump a qualifié cette semaine la condamnation de Jair Bolsonaro à 27 ans de prison de «très surprenante». Lula a intitulé son texte : «La démocratie et la souveraineté du Brésil ne sont pas négociables». Il est confronté à une crise diplomatique avec les États-Unis en raison du procès contre M. Bolsonaro, principal dirigeant de la droite et de l’extrême droite au Brésil et proche allié de Donald Trump. Le président américain a puni le Brésil en lui imposant des droits de douane de 50%, parmi les plus élevés au monde, sur une grande partie de ses produits. Plusieurs magistrats de la Cour suprême brésilienne font également l’objet de sanctions de la part de Washington pour leur gestion de l’affaire Bolsonaro. L’ancien président, âgé de 70 ans, a été condamné cette semaine pour avoir dirigé un complot infructueux visant à empêcher l’investiture de Lula, qui l’a devancé aux élections de 2022. «Le jugement est le résultat de procédures menées conformément à la Constitution brésilienne de 1988, promulguée après deux décennies de lutte contre une dictature militaire», a poursuivi Lula dans ce texte publié en anglais. «Des mois d’enquête (...) ont révélé des plans visant à m’assassiner, ainsi que le vice-président et un juge de la Cour suprême», a-t-il ajouté. «Les autorités ont également découvert un projet de décret qui aurait effectivement annulé les résultats des élections de 2022.» Relation «de plus de 200 ans» «Lorsque les Etats-Unis tournent le dos à une relation vieille de plus de 200 ans, comme celle qu’ils entretiennent avec le Brésil, tout le monde y perd», a ajouté Lula. «Président Trump, nous restons ouverts à toute négociation susceptible d’apporter des avantages mutuels. Mais la démocratie et la souveraineté du Brésil ne sont pas négociables». Donald Trump, pour sa part, a déclaré après la condamnation de M. Bolsonaro que ce procès rappelait «vraiment ce qu’ils ont essayé de me faire», en référence à ses propres problèmes judiciaires après la prise du Capitole à Washington par ses partisans, le 6 janvier 2021. La justice brésilienne a tenu l’ancien président pour responsable d’avoir incité à l'émeute du 8 janvier 2023 contre les sièges des pouvoirs publics à Brasilia. Jair Bolsonaro se dit victime de «persécution» et sa défense a annoncé qu’il ferait appel du jugement de la Cour suprême, y compris devant les instances internationales. Dimanche, lors de sa première apparition publique après sa condamnation, il a quitté son domicile pendant quelques heures avec l’autorisation de la justice pour subir une biopsie cutanée. A sa sortie d’un hôpital de Brasilia, il ne s’est pas adressé à la presse et s’est contenté d’observer les dizaines de sympathisants qui l’attendaient avec des drapeaux brésiliens et en chantant l’hymne national. Jair Bolsonaro garde le silence depuis fin juillet, date à laquelle la Cour suprême lui a interdit de s’exprimer sur les réseaux sociaux, estimant qu’il les avait utilisés pour entraver la justice. «Huit lésions cutanées ont été retirées et envoyées en biopsie pour évaluation», a déclaré le docteur Claudio Birolini à la presse. «En raison de toutes les interventions chirurgicales qu’il a subies et de la situation actuelle, (Bolsonaro) est assez affaibli», a-t-il ajouté. L’ancien président a subi plusieurs opérations en raison de complications liées à un coup de couteau à l’abdomen reçu en 2018, alors qu’il était candidat. La Cour suprême doit examiner les recours déposés par la défense de M. Bolsonaro avant d'éventuellement l’envoyer en prison. L’ancien président pourrait demander à purger sa peine à domicile, invoquant son état de santé. © Agence France-Presse -
Sébastien Lecornu « sera censuré, dans quelques semaines ou quelques mois », prévient Marine Le Pen
Bordeaux - Le gouvernement de Sébastien Lecornu «sera censuré, probablement dans quelques semaines ou dans quelques mois», a affirmé dimanche Marine Le Pen, qui avant même sa rencontre avec le nouveau Premier ministre a appelé ses partisans à se préparer à de nouvelles élections législatives. Le rendez-vous à Matignon n’est toujours pas calé, mais la patronne du Rassemblement national a déjà condamné son hôte. «Lorsque ce gouvernement sera censuré, probablement dans quelques semaines ou dans quelques mois, vous serez à nouveau appelés aux urnes (et) vous aurez le pouvoir de faire de Jordan (Bardella) votre Premier ministre», a-t-elle lancé devant plus de 6.000 militants réunis au Parc des expositions de Bordeaux. Sans même évoquer la possibilité d’une négociation avec M. Lecornu - qui assume lui-même ne pas chercher un «accord politique avec le RN» - Mme Le Pen a ironisé sur ce Premier ministre qui «va commencer ses consultations, une expression assez adaptée pour un système malade». «Il va aller un coup chez les socialistes et les écologistes, un autre chez Les Républicains (...) Qui peut croire qu’un grand projet bienfaisant et fédérateur puisse naître de ces bricolages politiciens ?», a-t-elle ajouté. Dans un meeting aux airs de pré-campagne électorale, la triple candidate à la présidentielle a exhorté ses partisans à se préparer au «retour aux urnes». «L’alternance nationale viendra, si ce n’est pas aujourd’hui ce sera demain», leur a-t-elle lancé, fixant à nouveau l'échéance: «Dans quelques semaines, vous aurez à travers nous le pouvoir d’engager le grand redressement tant attendu» et, au passage «de faire de Jordan Bardella votre Premier ministre». «La France ne sera jamais mieux servie que par nous-mêmes», a-t-elle insisté, égrainant par avance un programme de gouvernement dont «la première priorité sera naturellement le rétablissement des comptes publics», suivie des thématiques habituelles du RN, notamment le pouvoir d’achat, la sécurité et l’immigration. «Tout cela, nous pouvons le faire depuis Matignon», a assuré Mme Le Pen, martelant quatre mots aux airs de slogan de campagne: «Demain, nous le ferons». © Agence France-Presse -
Turquie : avant une audience cruciale pour le CHP, des dizaines de milliers de personnes défilent à Ankara
Ankara - Des dizaines de milliers de personnes ont défilé dimanche à Ankara, à la veille d’une audience cruciale devant la justice pour le CHP, le principal parti d’opposition au président turc Recep Tayyip Erdogan, dont la direction pourrait être chamboulée en raison d’une accusation de fraudes. L’audience est prévue pour débuter à 10h00 heure locale (07h00 GMT), devant le 42e tribunal civil de première instance de la capitale turque. Selon certains observateurs, l’affaire s’apparente à une tentative des autorités de saper le plus ancien parti politique de Turquie, qui a remporté une énorme victoire contre l’AKP (Parti de la justice et du développement, conservateur) du président Erdogan aux élections locales de 2024 et gagne en popularité dans les sondages. Le CHP (Parti républicain du peuple, social démocrate) rejette les accusations et estime que le gouvernement tente de l’affaiblir en tant que force d’opposition. Sa popularité a augmenté depuis qu’il a organisé les plus grandes manifestations de rue de Turquie en une décennie, déclenchées par l’emprisonnement en mars de son candidat à la présidence de la République, le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu. «Fraude électorale» L’audience doit statuer sur la possible annulation des résultats du congrès du CHP en novembre 2023. Pendant ce congrès, les délégués avaient évincé le président de longue date du parti, Kemal Kilicdaroglu, tombé en disgrâce, et élu Özgür Özel. L’acte d’accusation désigne M. Kilicdaroglu comme étant la partie lésée et réclame des peines de prison pouvant aller jusqu'à trois ans pour M. Imamoglu et 10 autres maires et responsables du CHP, accusés de «fraude électorale». Si la justice le décidait, M. Özel pourrait donc se voir démettre de ses fonctions à la tête de cette formation. Le 2 septembre, un tribunal a destitué la direction de la branche d’Istanbul du CHP en raison d’accusations d’achats de votes au cours de son congrès provincial et nommé un administrateur pour prendre le relais. Cette décision, qui a été largement perçue comme pouvant faire jurisprudence, a déclenché de vives protestations et entraîné une chute de 5,5% de la Bourse, faisant craindre que le résultat de lundi ne nuise également à la fragile économie de la Turquie. Si le tribunal d’Ankara déclarait les résultats du congrès du CHP nuls et non avenus, cela pourrait annoncer le retour de son ancien leader Kemal Kilicdaroglu, qui a accumulé une série de défaites électorales ayant plongé le parti dans une crise. Dans une tentative de protéger sa direction, le CHP a convoqué un congrès extraordinaire le 21 septembre. Si le tribunal destituait M. Özel et rétablissait M. Kilicdaroglu, les membres du parti pourraient donc tout simplement réélire Özgür Özel six jours plus tard. «Ce procès est politique» À la veille de l’audience, des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées en soutien au CHP dans le centre de la capitale turque. «Ecoute cette place Erdogan», a lancé M. Özel dimanche soir devant les manifestants qui scandaient «Erdogan, démission !». «Aujourd’hui, nous sommes confrontés aux graves conséquences de l’abandon du train de la démocratie par le gouvernement démocratiquement élu en Turquie, qui a choisi de gouverner le pays par l’oppression plutôt que par les urnes. Quiconque représente une menace démocratique pour lui est désormais sa cible», a affirmé M. Özel. «Ce procès est politique, les allégations sont calomnieuses. C’est un coup d'État et nous résisterons», a-t-il martelé. «Il ne s’agit pas du CHP mais de l’existence ou de l’absence de démocratie en Turquie», a déclaré pour sa part Ekrem Imamoglu aux journalistes vendredi, après avoir comparu devant un tribunal pour des accusations sans lien avec cette affaire. Lorsque Özgür Özel a pris sa direction en novembre 2023, le CHP était en crise mais, en mars 2024, il a conduit le parti à une éclatante victoire aux élections locales. Depuis l’arrestation du maire d’Istanbul en mars dernier, M. Özel a su galvaniser les foules, s’attirant les foudres du pouvoir en organisant chaque semaine des rassemblements, jusque dans des villes longtemps considérées comme des bastions du président Erdogan. Burcin GERCEK © Agence France-Presse