
Pour recruter, le private equity sort la carte jeune

Ils n’ont jamais été aussi puissants ni aussi rémunérateurs, et pourtant ils doivent s’employer à attirer les jeunes diplômés dans leurs filets.
Les fonds de capital-investissement semblent même voir leur attrait reculer auprès des étudiants d’écoles de commerce et d’ingénieurs, selon la deuxième édition d’une étude menée par Junior Essec et AlumnEye, un spécialiste de la formation et de la chasse de têtes. Ils sont 57% à juger peu ou pas intéressante une carrière dans le private equity. Les plus motivés par le secteur – ceux qui se déclarent «vraiment intéressés» – voient même leur proportion reculer de 9 points, à 18%. Cette enquête s’appuie sur l’avis de 591 étudiants d’écoles de commerce et d’ingénieurs, sur les retours de 77 anciens stagiaires de 25 fonds et sur une étude qualitative des acteurs du capital-investissement.
Beaucoup plus marquée chez les ingénieurs que chez les profils écoles de commerce, plus familiers du secteur, cette apparente désaffection doit être relativisée, selon Michael Ohana, associé chez AlumnEye (lire ‘La Parole à…’). Un taux de 43% de candidats potentiels à une carrière dans le private equity reste appréciable. Les fonds ont en outre longtemps négligé cette population. Il y a vingt-cinq ans, un étudiant de HEC ou de l’Essec pouvait effectuer sa scolarité sans avoir entendu parler de cette industrie alors naissante.
En France, les sociétés de gestion (general partners, GP) restaient de petite taille. Leurs besoins de recrutements étaient ponctuels, sans commune mesure avec les bataillons de juniors que les banques d’investissement et les cabinets de conseil consommaient chaque année en se présentant sur les forums d’étudiants. Elles privilégiaient alors des profils avec plusieurs années d’expérience, issus par exemple des fusions-acquisitions.
42 milliards
La croissance impressionnante du secteur ces dernières années a changé la donne. En 2021, les acteurs français du capital-investissement et des infrastructures ont levé près de 42 milliards d’euros, selon les chiffres de l’association professionnelle France Invest. Le double de 2017. «La capacité de sourcing des opérations et la vitesse d’exécution ont de plus en plus de prix. Il faut des profils plus nombreux dans les équipes», indique Alexis Dupont, directeur général de France Invest.
Les grands noms du secteur, en France, ont appris à fréquenter les forums étudiants pour se faire connaître, ce qui n’est toutefois ni nécessaire ni suffisant. Au classement AlumnEye des sociétés les plus appréciées, l’américain Blackstone se classe deuxième alors qu’il n’a même pas de bureau à Paris, grâce à la puissance de son nom à l’échelle mondiale.
France Invest s’efforce pour sa part de mieux faire connaître le métier. Elle a mis sur pied un conseil d’administration des moins de 35 ans. Les réflexions vont aussi bon train sur l’attractivité du secteur : à un moment où le plein emploi règne chez les profils très qualifiés, les success stories de la tech font davantage rêver les nouvelles générations. Elle organise aussi plusieurs fois par mois des webinars à destination des étudiants, en partenariat avec Level 20, une association chargée d’accroître la part des femmes qui entrent dans le capital-investissement… et qui y restent. Les fonds peuvent y présenter leur activité et donner des conseils très pratiques aux candidats à l’embauche : à qui envoyer son CV, comment se préparer aux entretiens…
Diversification
L’étude AlumnEye livre d’intéressants enseignements à cet égard. La parité homme-femmes est un critère important pour quatre étudiants sur dix. En France, où la voie royale des grandes écoles de commerce et d’ingénieurs est puissamment normative, la diversité dépasse cependant les questions de genre. «Nous essayons d’encourager la diversification des profils, d’abord parce que les viviers traditionnels finiront par être saturés et surtout parce que la diversité est un facteur de performance. Pourquoi ne pas attirer des étudiants d’autres filières, comme les sciences humaines ou sociales ?», souligne Alexis Dupont.
Pour soigner leur marque employeur, les fonds doivent aussi montrer patte blanche sur d’autres critères. L’engagement et la communication active d’un fonds au sujet de sa stratégie de responsabilité sociale et d’impact sont jugés importants pour 58 % des répondants et en particulier pour les ingénieurs. Le développement des compétences, la qualité des transactions ou encore l’exposition offerte lors des stages ont aussi leur poids. Pas étonnant que l’on retrouve dans le « Top 10 » beaucoup de fonds (Ardian, Rothschild FAPI, Goldman Sachs, CVC, KKR…) coutumiers des gros rachats à effet de levier.
Une photographie trop réductrice ? «Les fonds de capital-risque et de capital-développement connaissent aujourd’hui la plus forte croissance parmi nos membres, et offrent aux jeunes diplômés la possibilité de travailler dans des équipes à taille humaine», rappelle Alexis Dupont. A eux de sortir de l’ombre.

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