
Revitaminer l’assurance vie par le digital

Sacha Guitry déclarait fort à propos: «Qui aime la vérité a le courage de la regarder en face.» En ces temps propices à la pédagogie, où la parole politique prône les vertus de l’explication, il semble indispensable de rétablir certaines vérités. En postulant que les deux piliers de la vérité sont la connaissance objective d’une situation et l’appréhension subjective de sa propre situation vis-à-vis de celle-ci, en matière d’assurance vie, sur laquelle le jugement des Français a tendance à se troubler en raison de l’amour qu’ils lui portent, tentons ici le jeu de la pédagogie.
En France, on entend communément par «assurance vie» un produit d’épargne doté de caractéristiques fiscales et financières attractives. Les avantages fiscaux, même s’ils se sont érodés au fil des lois de finances, restent non négligeables en termes tant d’impôt sur le revenu que de droits de succession, en particulier pour les patrimoines importants. Mais pour le plus grand nombre, ce sont bien les caractéristiques financières de l’assurance vie qui séduisent le plus, et en particulier celles des fonds en euros, qui, pendant longtemps, ont été synonymes de sécurité pour leur souscripteur.
Changement de paradigme. Résultat, avec un encours estimé à quelque 1.700milliards d’euros, l’assurance vie est devenue le produit d’épargne préféré des Français, représentant près de 35% de leur épargne financière, mais avec un surinvestissement en fonds euros, lesquels représentent 80% de l’encours total. Un tel succès, initié il y a près de quarante ans, repose sur la caractéristique comptable des fonds euros, qui allie sécurité et liquidité. Sécurité, car le capital est garanti par l’assureur, et les intérêts crédités au compte des épargnants sont définitivement acquis grâce à un effet de cliquet. Ils ne peuvent pas baisser et sont revalorisés chaque année d’un rendement composé du taux minimum garanti par l’assureur et de la participation aux bénéfices. Liquidité, car les épargnants peuvent à tout moment récupérer tout ou partie de leur épargne par le biais de rachats. Mais si les contrats libellés en euros offrent certes une véritable protection de l’épargne en période non inflationniste, c’est au prix d’une contrainte concernant les actifs sous-jacents. Ceux-ci sont majoritairement composés d’obligations à taux fixe, dont les assureurs comptabilisent les seuls coupons à l’exclusion des plus- ou moins-values latentes. L’aplatissement de la courbe des taux d’intérêt a changé la donne.
Nous sommes à la fin d’un cycle, celui de l’époque bénie où les rendements nets servis par les fonds euros étaient très supérieurs à l’inflation. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, où ils atterrissent aux alentours de 1,24% en 2017 alors que l’inflation atteignait 1%. Et demain, les scénarios de brusque hausse des taux, accompagnée ou non d’une résurgence de l’inflation, mettent à mal le mythe du fonds euros sans risque. D’où l’idée de lutter contre cette chimère en s’attaquant à quelques contre-vérités.
En premier lieu, il est faux aujourd’hui d’assurer que les placements en fonds euros sont plus sûrs que les placements en unités de compte. La potentialité de survenance d’une crise majeure de la monnaie européenne, dans un contexte géopolitique instable (imprévisibilité des populismes, crises en Asie-Pacifique, risque italien…), est réelle. L’impact de tels événements sur la construction européenne, et donc sur la solidité de l’euro, est certain. Leur degré est suffisamment large pour induire chez l’épargnant la nécessité d’une stratégie de diversification (monétaire ou géographique) de protection. Aussi, la migration des fonds euros vers les unités de compte, contrairement au sentiment général, n’est guère plus dangereuse que la croyance aveugle en la capacité omnipotente du politique pour soutenir la solidité d’une monnaie telle que l’euro et ce, sur des périodes d’épargne très longues. Or, rappelons qu’un couple de 60ans a 95% de chances de voir l’un des deux partenaires en vie à 100ans. Soit quarante ans plus tard!
Faire sauter les verrous conceptuels. En second lieu, il est également faux d’assurer que la sécurité des fonds euros est adéquate à une population vieillissante ayant besoin de son épargne pour financer le grand âge. Le constat de l’allongement de l’espérance de vie est une évidence démographique, d’où l’allongement drastique de la période d’épargne et d’utilisation de l’épargne. Les fonds euros ont une rentabilité si faible que l’érosion de l’épargne est une réalité préoccupante sur le long terme. Couplées au risque d’appauvrissement massif et de perte en capital en cas d’événement systémique majeur sur la monnaie européenne, ces réalités imposent, dans un contexte de rallongement des durées d’épargne et de désépargne, un dégonflement des poches euros et une diversification vers les unités de compte. D’où la nécessité urgente de faire sauter les verrous conceptuels et réglementaires de limite d’âge pour les souscriptions en unités de compte. Il n’est pas exagéré de rappeler, dans cette optique, que l’investissement en fonds euros est la certitude de non-création de richesse dans le long terme.
Pour prévenir ce phénomène, il faut inciter les épargnants à faire migrer leurs actifs, un tel arbitrage s’opérant dans l’intérêt de tous les acteurs de la chaîne de valeur. Vu des épargnants, l’objectif est d’obtenir du rendement, de diversifier son risque en cas de crise de l’euro ou de brusque remontée des taux et de diversifier le risque d’érosion de l’épargne de long terme du fait, entre autres, de l’inflation. Côté assureurs, l’intérêt est d’alléger le coût du capital. Pour les gestionnaires d’actifs, il consiste à restructurer leurs marges. Quant aux pouvoirs publics, l’idée est de neutraliser le risque en cas de remontée brusque des taux d’intérêt pour éviter d’avoir à éponger les dégâts subis par les assureurs, comme ils ont épongé, lors de la dernière crise financière, ceux subis par les banques. Les ratios d’endettement sur PIB ne le permettent plus. Rappelons qu’une première digue a été élevée contre ce risque puisque, depuis le 9 décembre 2016, la loi Sapin 2, dans son article 49, autorise à suspendre, retarder ou limiter les retraits d’argent ou arbitrages sur l’assurance vie en cas de «menace grave et caractérisée» pour le système financier. Cette mesure emblématique, anxiogène et mal expliquée à l’épargnant, a révélé la crainte systémique de la part des autorités politiques et mis au grand jour la préoccupation et l’inquiétude qu’une surpondération des contrats en euros fait peser sur le secteur des assurances dans son ensemble en cas d’une remontée brutale des taux d’intérêt.
Depuis plusieurs années déjà, les assureurs ont pris conscience du problème et ont mis en place des mécanismes d’incitation pour orienter l’épargne nouvelle vers les unités de compte. Mais ces dispositifs ne concernent que les flux. Reste la problématique du stock (1.700milliards). Ne se prendrait-on pas, alors, à rêver d’un outil permettant un rééquilibrage du stock et une migration sans douleur des fonds euros surinvestis vers un peu plus de rendement, une fois mis en conformité le risque théorique estimé par l’épargnant lui-même en fonction de ses objectifs d’investissement et le risque réel de son portefeuille bien trop souvent inadéquat? Ces outils existent; ils sont digitaux. Ils permettent en transparence pour l’épargnant d’appréhender son risque théorique, de calculer son risque réel et, par l’observation de leur inadéquation, de faire migrer en toute connaissance de cause tout ou partie de ses fonds euros en unités de compte, plus dynamiques et diversifiées. Et ce, en fonction de son profil, de ses projets, de ses objectifs de rendement, de son degré d’aversion au risque. Pouvoir est ainsi rendu à l’épargnant de gérer avec clairvoyance, souplesse et simplicité ses différents encours afin de mieux les faire cadrer à ses objectifs et à ses espérances, et ce, en toute transparence.
Faciliter la révolution culturelle. Certains first-movers ont d’ores et déjà adopté ces outils de migration digitale, mais de manière encore trop anecdotique. Renversant les paradigmes de pouvoir de l’assureur vers l’assuré, ces moyens, aux multiples vertus nous l’avons vu, s’appuient pourtant sur la responsabilité de l’épargnant, sur sa capacité à comprendre ce qui est bon pour lui-même mieux que quiconque et à décider en conséquence. Une révolution culturelle qu’il est urgent de faciliter pour tous les acteurs.
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Festival international du film de Toronto: le monde du cinéma s'affronte autour d'un documentaire israélien sur le 7-Octobre
Toronto - Un documentaire sur un ancien militaire israélien, qui doit être présenté en avant-première au festival du film de Toronto après avoir initialement été retiré du programme, cristallise les profondes divisions d’Hollywood sur le conflit à Gaza. «The Road Between Us: The Ultimate Rescue» retrace comment le général israélien à la retraite Noam Tibon a sauvé sa famille et d’autres personnes lors des attaques du Hamas du 7 octobre 2023. Il sera projeté mercredi au plus grand festival de cinéma d’Amérique du Nord. Le film, produit au Canada, utilise notamment des images de caméras corporelles du Hamas lors des attaques qui ont fait 1.219 morts en Israël, principalement des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur les données officielles. Les organisateurs avaient initialement évoqué le manque de «clarté juridique» autour de ces images pour retirer le film de la programmation, le mois dernier. Avant de le réintégrer face aux multiples accusations de censure. Plus de 1.000 personnalités de l’industrie du divertissement, dont Amy Schumer et Debra Messing, avaient signé une pétition accusant le festival de réduire les voix juives aux silences. Et ce week-end, le réalisateur Barry Avrich a balayé ce prétendu problème juridique. «Pour autant que je sache, le Hamas ne dispose pas d’un organe de gestion des droits d’auteur», a-t-il ironisé dans une table ronde. Dans un communiqué, les organisateurs du festival ont finalement déclaré avoir trouvé «une solution pour satisfaire les importantes préoccupations en matière de sécurité, de légalité et de programmation», tout en s’excusant pour «la douleur et la frustration» provoquées par leur réponse initiale. Hollywood opposé "à lui-même» Barry Avrich a salué, sur le site spécialisé Deadline, la «réaction de la communauté cinématographique de Hollywood». Le sujet est pourtant loin d’y faire l’unanimité. Dans une tribune publiée lundi dans le New York Times, la vétéran du divertissement Sharon Waxman a estimé que la guerre à Gaza déclenchée par Israël après le 7-Octobre «oppose Hollywood à lui-même». Pour une industrie à la fois progressiste et influencée par un puissant lobby pro-israélien, la question «reste un sujet explosif, avec des convictions profondes et exacerbées» de part et d’autre, écrit-elle. Lundi également, plus de 1.500 acteurs et professionnels du cinéma, dont Olivia Colman et Mark Ruffalo, se sont engagés dans une lettre ouverte à ne pas travailler avec des organisations cinématographiques israéliennes, qu’ils ont accusées d'être «impliquées dans un génocide» à Gaza. La guerre déclenchée par Israël sur le territoire palestinien après les attaques sans précédent du Hamas a tué près de 65.000 personnes à Gaza, selon les chiffres du ministère de la Santé dirigé par le gouvernement du Hamas, considérés comme fiables par les Nations unies. «Une famille, pas un pays» Avant la première mercredi de «The Road Between Us» et d'éventuelles manifestations, le réalisateur a déclaré à Deadline vouloir faire appel à sa propre équipe de sécurité pour compléter celle du festival. La police de Toronto a fait état à l’AFP d’une «forte présence» sur les lieux du festival, sans autre précision. Le documentaire raconte comment le général Tibon a «voyagé de Tel Aviv au kibboutz Nahal Oz pour tenter de sauver son fils», journaliste de renom, ainsi que d’autres membres de sa famille. Il s’appuie sur des interviews inédites, des images de caméras de sécurité du kibboutz et des caméras portées par des combattants du Hamas. Et il a été monté selon les codes des «thrillers», son auteur qualifiant même le soldat comme un héros du monde réel rappelant le film d’action «Taken», avec Liam Neeson. «On le regarde comme un homme qui finalement, ce jour-là, a montré du leadership», estime Barry Avrich. Mais «ce n’est pas vraiment un film politique. Il est enveloppé dans le drapeau d’une famille, pas d’un pays», a-t-il assuré au Hollywood Reporter. Une précision qui pourrait avoir échappé au microcosme hollywoodien. Andrew MARSZAL and Ben SIMON © Agence France-Presse -
Alzheimer: pour l'heure, sceptique, la HAS refuse le remboursement du Leqembi
Paris - Le Leqembi, un nouveau traitement contre la maladie d’Alzheimer, ne sera pas remboursé dans l’immédiat en France. Sa Haute autorité de santé (HAS) se montre sceptique, évoquant des effets secondaires bien trop lourds au regard de bénéfices insignifiants. «L’accès précoce à Leqembi n’a pas été retenu», a résumé Pierre Cochat, président de la commission de la transparence de la HAS, à l’occasion d’un avis rendu mardi par l’institution et très attendu par les spécialistes de la maladie d’Alzheimer, la plus courante des démences avec des dizaines de millions de malades dans le monde. Le Leqembi (lécanémab), développé par les laboratoires Biogen et Eisai, est l’un des principaux espoirs auxquels s’accrochent les associations de patients et de proches, ainsi qu’un traitement au fonctionnement semblable, le Kisunla (donanémab) d’Eli Lilly. Lors de leurs essais cliniques, ces médicaments ont permis de ralentir légèrement le déclin de patients dont la maladie commençait. Nombre de spécialistes y voient donc une avancée majeure, alors que la recherche de médicaments anti-Alzheimer patine depuis des décennies. Mais d’autres regrettent un espoir illusoire, estimant que les bénéfices observés sont si maigres qu’ils ne font pas de différence pour les patients, d’autant que des effets graves et parfois mortels - hémorragies et œdèmes cérébraux - sont clairement avérés. Vive controverse Selon ces sceptiques, la faible efficacité de ces médicaments signifie que la recherche se concentre depuis trop longtemps sur une piste inadéquate, suivie par Leqembi comme Kisunla: chercher à limiter la formation de plaques de protéines dites amyloïdes dans le cerveau des malades. La HAS, dont les avis sont consultatifs mais généralement suivis par le gouvernement, s’exprime donc à un moment où la controverse reste vive et où d’autres autorités sanitaires se sont déjà prononcées. Les Etats-Unis ont déjà approuvé ces traitements et l’Union européenne (UE) a fait de même. Mais, après avoir initialement refusé son feu vert, celle-ci n’a finalement donné son approbation qu’au printemps dernier, la restreignant aux patients les moins à risque d’effets graves. Surtout, autorisation ne veut pas dire remboursement, et ce alors que ces médicaments ont un coût élevé: ils coûtent plusieurs dizaines de milliers de dollars par an aux Etats-Unis. Signe que la distinction est importante, le Royaume-Uni a déçu les associations en autorisant ces traitements sur le principe, mais sans valider leur remboursement. C’est sur ce dernier point que la HAS devait se prononcer et, plus spécifiquement, sur le bien-fondé d’un «accès précoce». Celui-ci signifie que le médicament peut, dès maintenant, être remboursé à un prix fixé par son fabricant. Cela permet de ne pas attendre la procédure normale. L’intérêt est pour les patients de disposer d’un traitement innovant, et pour le laboratoire de vite commercialiser son médicament. Bénéfices «très insuffisants» Ce ne sera pas le cas pour le Leqembi. La HAS conclut, au vu des études fournies par les laboratoires, que rien ne justifie d’accorder un tel traitement de faveur. «On sait bien à quel point tout le monde avait beaucoup d’espoir», a reconnu M. Cochat. Mais il met en regard des bénéfices «très insuffisants par rapport à ce qu’on attendait» avec «des effets secondaires qui ne sont pas faibles du tout». Cela ne remet pas en cause la possibilité que le Leqembi soit un jour remboursé en France. La HAS, qui se prononcera d’ici à quelques mois sur l’opportunité d’une procédure normale, assure que rien n’est exclu. Mais «c’est évident qu’on ne peut pas s’attendre à une évaluation mirobolante», a prévenu M. Cochat. Au sein du monde médical, cette décision a suscité des réactions contrastés, entre convaincus et sceptiques du Leqembi. «Il y a quand même une déception», admet auprès de l’AFP le chercheur Bruno Dubois, neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), appelant à ne pas négliger l’intérêt de «quelques mois en plus à pouvoir parler à ses petits-enfants ou aller au théâtre». Au contraire, «c’est la meilleure décision pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer et leurs familles», assure à l’AFP le psychiatre britannique Rob Howard, spécialiste du grand âge à l’University College de Londres, selon qui des données plus récentes confirment que Leqembi et Kisunla «ne modifient pas réellement la maladie». Julien DURY © Agence France-Presse -
Gaza: Tsahal va intensifier son offensive avec une «puissace accrue» et appelle les civils à fuir
Jérusalem - L’armée israélienne a affirmé mardi qu’elle allait opérer avec une «puissance accrue» dans la ville de Gaza, sommant ses habitants de partir en vue d’en prendre le contrôle, malgré les inquiétudes internationales sur le sort des civils. Près de deux ans après le début de la guerre, déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, l’armée israélienne a intensifié ces dernières semaines ses bombardements et opérations terrestres dans la ville, la plus grande de la bande de Gaza, qu’elle présente comme le dernier grand bastion du mouvement islamiste palestinien. Disant contrôler 40% de l’agglomération, elle affirme vouloir s’en emparer pour venir à bout du Hamas et libérer les otages capturés le 7-Octobre. L’ONU, qui estime à environ un million de personnes la population de la ville et ses environs, a mis en garde contre un «désastre». «A tous les habitants (...) l’armée de défense est déterminée à vaincre le Hamas et agira dans la zone de la ville de Gaza avec une puissance accrue», a écrit sur les réseaux sociaux le colonel Avichay Adraee, porte-parole arabophone de l’armée. «Evacuez immédiatement par l’axe al-Rachid», la grande route côtière allant du nord au sud de la bande de Gaza, a-t-il ajouté. Des avions ont largué sur la ville des centaines de tracts portant le même message, a constaté un photographe de l’AFP. Lundi, après plusieurs appels similaires lancés ces derniers jours, des images de l’AFP près de Nousseirat (centre) ont montré de nombreux Gazaouis fuyant vers le sud, à bord de véhicules ou charrettes surchargées, à vélo ou même à pied. Saeb al-Mobayed a expliqué avoir été «obligé de partir» d’un secteur au nord de Gaza-ville par «l’intensification des bombardements d’artillerie et des frappes aériennes israéliennes». «Qu’ils ouvrent les postes-frontières, qu’ils mettent fin à la guerre et qu’ils permettent à la vie de revenir à la normale, comme avant. Ça suffit», a pour sa part plaidé Ahmed Shamlakh, déplacé de Gaza. «Que le début» «Ce n’est que le début de l’intensification des opérations terrestres dans la ville de Gaza. Je dis aux habitants: vous avez été prévenus, partez maintenant!», a lui-même averti lundi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. «Tout cela n’est qu’un prélude, juste l’ouverture à l’opération principale qui s’intensifie - la manoeuvre terrestre de nos forces, qui s’organisent et se rassemblent actuellement pour entrer dans la ville de Gaza», a-t-il ajouté. Le Hamas a dénoncé «un acte explicite de déplacement forcé» des habitants de la ville de Gaza, qui constitue une violation «flagrante et sans précédent des lois et conventions internationales». Le mouvement a par ailleurs salué, sans la revendiquer, une attaque armée perpétrée à Jérusalem-Est lundi par deux assaillants palestiniens, qui ont tué six Israéliens à une station de bus avant d'être abattus. La Défense civile de Gaza a indiqué que les frappes aériennes israéliennes s'étaient poursuivies dans la nuit, notamment sur la ville de Gaza. L’armée y a détruit lundi, après un appel des habitants à évacuer, une nouvelle tour d’habitation - la quatrième en trois jours - à Gaza-ville, accusant le Hamas - qui dénonce un mensonge - d’utiliser ces immeubles pour opérer. Elle a annoncé le même jour la mort de quatre soldats dans l’explosion d’un engin lancé sur leur char dans le nord du territoire. Selon un bilan de l’AFP basé sur les données de l’armée, 468 soldats ont été tués depuis le début de l’offensive terrestre dans la bande de Gaza le 27 octobre 2023. L’attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles. D’après l’armée, 47 captifs restent retenus à Gaza dont 25 présumés morts, sur un total de 251 personnes enlevées ce jour là. L’offensive de représailles israéliennes a fait au moins 64.522 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas à Gaza, dont les chiffres sont jugés fiables par l’ONU. Elle a dévasté le territoire, dont les quelque deux millions d’habitants assiégés font face à une catastrophe humanitaire. © Agence France-Presse