
Un «say on pay» contraignant n’est pas sans risque pour la gouvernance

Quelle sera la gouvernance des sociétés du CAC 40 dans quelques années ? Dans la quatrième édition de son étude sur la gouvernance des sociétés du CAC 40, Gouvernance en Action s’interroge notamment sur les conséquences du passage au vote contraignant des rémunérations des dirigeants, que s’apprête à imposer la loi Sapin 2 après l’affaire Renault du printemps dernier. Les actionnaires du constructeur automobile n’avaient approuvé qu’à 45,88% la rémunération de leur PDG, Carlos Ghosn. Néanmoins, le conseil d’administration avait maintenu cette rémunération, avant de faire partiellement marche arrière fin juillet en réduisant de 20% la part variable.
Avec ce vote contraignant, «le législateur va, d’une certaine manière, dessaisir les conseils d’une de leurs prérogatives majeures, constate Fabrice Rémon, fondateur de Gouvernance en Action. A terme, cela risque même de mettre entre les mains des actionnaires le choix des dirigeants. En effet, un dirigeant pourrait refuser un poste ou le quitter s’il n’a pas la certitude d’obtenir la rémunération qu’il juge adaptée». De plus, Gouvernance en Action s’interroge sur la nature des actionnaires qui devraient se prononcer sur le say on pay. Un actionnaire de contrôle peut-il voter sur sa propre rémunération ? «Bernard Arnault a partiellement répondu à cette question lors de la dernière AG de LVMH, en déclarant qu’il ne voterait pas avec ses titres détenus en propre. Il s’est toutefois bien gardé d’appliquer le même raisonnement pour ceux qu’il détient au travers de holdings», poursuit Fabrice Rémon. Néanmoins, on ne peut empêcher un dirigeant-actionnaire de voter. «Ce serait donner aux minoritaires le choix de la rémunération du dirigeant. Une possibilité inacceptable et dangereuse pour l’entreprise», ajoute Fabrice Rémon.
L’affaire Renault pourrait aussi inciter les entreprises à quitter la France. Déjà 12,5% du CAC 40 n’est plus français (Airbus, ArcelorMittal, LafargeHolcim, Nokia et Solvay) et trois sociétés (LVMH, Schneider et Unibail-Rodamco) ont opté pour le statut de société européenne (SE). Si ces dernières ont toujours leur siège social à Paris, «un transfert vers un autre pays nécessiterait seulement d’en avertir le marché deux mois avant et l’approbation en AGE, sans avoir à dissoudre puis à créer une nouvelle personne morale», rappelle Fabrice Rémon.
Plus d'articles du même thème
-
Bonus : une nouvelle année morose se profile à Wall Street
Après une année 2022 record, les rémunérations variables versées en 2023 dans les banques d’investissement ont été considérablement réduites. Elles devraient continuer à baisser dans le conseil et le trading actions, anticipe le spécialiste américain Johnson Associates. -
L’été de Stellantis gâché par d’âpres négociations salariales aux USA
Les discussions sur la future convention collective pour les salariés américains du groupe automobile patinent. De quoi alimenter les craintes de grèves à la rentrée sur ce marché crucial pour Stellantis. -
Les politiques salariales divergent dans le transport aérien en Europe
Alors que Ryanair reste inflexible face à ses pilotes en Belgique, Lufthansa et British Airways viennent d’accorder des hausses de salaires significatives.
Sujets d'actualité
- Société Générale : le mythe têtu de la «création de valeur»
- La Société Générale dévoile des ambitions décevantes pour 2026
- Après les années Oudéa, Slawomir Krupa met la Société Générale au régime sec
- L’ancien patron de la Bred, Olivier Klein, arrive chez Lazard
- La zone euro se dirige vers la récession
Contenu de nos partenaires
-
Exclusif
Séisme au Maroc: dans les coulisses du jour le plus long de Mohammed VI
L'Opinion a reconstitué les premières heures post sinistre du roi du Maroc pour répondre à la catastrophe naturelle la plus mortelle de son règne -
Spécial Pologne
« Les Russes veulent revenir » - la tribune d'Eryk Mistewicz
« Il y a 30 ans, le dernier soldat soviétique a quitté la Pologne. À en croire les idéologues de Poutine, les Russes aimeraient aujourd'hui retourner en Pologne et dans toute l'Europe centrale. Nous faisons tout, nous, Polonais et Ukrainiens, Français aussi, tous en Europe et aux États-Unis, pour les en empêcher », explique le président de l'Instytut Nowych Mediówryk. -
Editorial
Antonio Guterres, le prophète de malheur qui ne fait peur à personne
Le Secrétaire Général de l’Onu va crescendo dans les prévisions apocalyptiques