Rémunérations et climat animent les assemblées générales 2023

Parmi les résolutions contestées par les actionnaires, 40% concernent les rémunérations, selon Scalens. Les AG physiques sont en danger dans certains pays.
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Les AG restent physiques en France, mais s’installent en virtuel aux Etats-Unis, en Italie et bientôt en Allemagne  - 

La démocratie actionnariale revient sur le devant de la scène. Sur les 708 assemblées générales 2023 déjà tenues en Europe et aux Etats-Unis, dont 110 en France, la fintech Scalens se félicite de la mobilisation exceptionnelle des actionnaires, avec des quorums élevés. Il progresse notamment de 3 points en France à 77%. «Une tendance poussée par l’obligation faite aux investisseurs de rendre à compte à leurs mandants, explique Bénédicte Hautefort, co-directrice générale de Scalens. La généralisation du vote en ligne depuis la crise Covid accentue ce mouvement, même s’il n’entre toujours pas dans les mœurs en France

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Les AG hybrides sont à privilégier

Les perturbations d’assemblée, plus nombreuses cette année, «amènent des débats sur le maintien d’une assemblée physique. Heureusement, les AG restent physiques en France, mais le virtuel s’installe aux Etats-Unis, en Italie et bientôt en Allemagne», s’inquiète Michael Herskovich, en charge de la politique de vote et d’engagement de BNPP AM. Les AG entièrement virtuelles existent presque partout, sauf en France ou aux Pays-Bas, où elles ne sont pas possibles. En Allemagne, elles doivent être autorisées par les statuts. Possibilité adoptée à seulement 75% chez Bayer et 78% chez Allianz. Ce score, plutôt bas, illustre la volonté des actionnaires d’avoir des assemblées physiques, poursuit Bénédicte Hautefort. «L’AG doit rester un lieu d’échange actionnarial. Aussi, nous privilégions des assemblées hybrides, avec la possibilité de poser des questions et de voter à distance et en direct, ce qu’aucune société française ne permet actuellement», ajoute Michael Herskovich.

La montée en puissance des AG virtuelles a entraîné une réduction de 12 minutes du temps moyen des assemblées autour de 1 h 40, sauf en France, où elles durent 10 minutes de plus, au-delà de 2 h 00, constate Scalens. Bonne nouvelle, le temps consacré aux questions augmente de 7 minutes. Il représente en moyenne 30% de la durée de l’AG, allant de 25% en France à 51% au Royaume-Uni.

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Les rémunérations concentrent toujours les oppositions

BNPP AM maintient un niveau d’exigence élevé. La société de gestion s’est opposée à 35% des résolutions (sur 1.360 AG tenues à ce jour dans le monde) contre 33% l’an dernier. Et la rémunération des dirigeants concentre toujours le plus d’oppositions. BNPP AM soutient seulement une résolution sur deux. «Après la pause sur les rémunérations liée à la crise Covid, certaines sociétés ont profité des bonnes performances 2022 pour opérer un rattrapage, explique Michael Herskovich. Si l’on constate des améliorations des pratiques et une meilleure transparence, certains niveaux de rémunérations restent trop élevés, et des critères de performance sont insuffisants.»

L’insertion de critères ESG dans la rémunération «devient la norme en France, mais pas dans le reste du monde, poursuit Michael Herskovich. Ces critères doivent être pertinents, exigeants, contraignants, et surtout alignés sur la stratégie de l’entreprise.»

Parmi les résolutions contestées – adoptées à moins de 80% –, 40% concernent les rémunérations, note Scalens. Et parmi les résolutions rejetées, 41% concernaient les rémunérations, notamment chez Unilever, Telecom Italia, Credit Suisse, ou encore Ipsos.

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Le climat s’installe au cœur des AG

Cette année, les incidents de séance, souvent liés à l’intervention d’activistes climatiques, se sont multipliés. Des tensions qui ont atteint un paroxysme chez ING, où l’assemblée n’a pu arriver à son terme. Malgré cette amplification du débat autour des questions climatiques, seules 17 résolutions «say-on-climate» ont été votées par BNPP AM depuis le début de la saison, contre 40 l’an dernier et 21 en 2021. Une baisse prévisible, certaines sociétés ayant prévenu qu’elles ne présenteraient leur plan climat que tous les trois ans.

BNPP AM a plus contesté que soutenu ces résolutions cette année. «Elles restent concentrées sur quelques sociétés, quelques secteurs et quelques pays (France, Royaume-Uni, Suisse), mais ne prennent pas en Allemagne, en Italie et aux Pays-Bas, constate Michael Herskovich. Ces résolutions peuvent être pertinentes, mais ne constituent pas l’outil miracle». Ces «say-on-climate» ont été adoptés en moyenne à 89%, contre 91% l’an dernier, note Scalens.

Les résolutions d’actionnaires sur les sujets environnementaux et sociaux se maintiennent au même rythme que l’an dernier, surtout aux Etats-Unis. En revanche, «les soutiens des actionnaires baissent, dans le sillage des changements d’approche de grands investisseurs institutionnels américains, précise Michael Herskovich. Mais ce n’est pas la politique de BNPP AM.»

Sur les 120 résolutions déposées par les actionnaires, un tiers concernait le climat. En Europe, ces résolutions climat obtiennent en moyenne un soutien de 24% (et même de 35% chez Glencore) contre 4% en 2022, constate Scalens. En revanche, aux Etats-Unis, les scores sont passés de 28% en 2022 à 4% en 2023. «Deux tendances émergent, souligne Bénédicte Hautefort. Celle de BlackRock, au côté des ONG, et celle de Vanguard, qui soutient les politiques climat des sociétés ».

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L’éthique monte en puissance

Les actionnaires déposent aussi de plus en plus de résolutions sur des sujets d’éthique (23% des résolutions externes), notamment aux Etats-Unis, et sur des questions liées à la Chine (6%), à l’instar d’Apple, Boeing, Goldman Sachs, IBM et Merck, précise Scalens.

Pour le moment, les administrateurs ne sont pas en danger. Ils sont élus ou renouvelés au moins à 96%, un taux stable ou en progression dans tous les pays, note Scalens. «Les actionnaires marquent ainsi un vrai soutien à la gouvernance de l’entreprise, alors qu’ils contestent les rémunérations des dirigeants et qu’ils la challengent sur le climat», poursuit Bénédicte Hautefort. Signe que le dialogue doit encore s’améliorer sur ces deux sujets. En revanche, BNPP AM s’oppose davantage en 2023 aux nominations et réélections d’administrateurs, en raison de la modification de sa politique de vote cette année, exigeant au moins 35% de femmes dans les conseils en Europe et aux Etats-Unis, et au moins 20% en Asie.

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